Antoine Desilets, photographe de presse dont le talent et l’audace ont révolutionné le métier au Québec, s’est éteint à l’âge de 92 ans jeudi soir, entouré de ses proches.

Sa famille en a fait l’annonce sur son profil Facebook.

Le légendaire photographe a encouragé des générations entières à se procurer un appareil et à immortaliser des moments à travers les lentilles. Son influence au Québec est incontestable. Son nom a d’ailleurs été donné au prix qui récompense le meilleur de la photographie de presse dans la province.

« C’était la personne à suivre pour tous les jeunes photographes. Antoine, c’était un photographe avec une vision différente de la vie. Il voyait vraiment les choses à sa manière », a dit Pierre McCann, qui a travaillé à ses côtés comme photographe à La Presse.

« Il disait aux jeunes : “Ce n’est pas difficile de prendre des photos, ce qui est difficile, c’est d’apprendre à voir” », a ajouté M.  McCann.

Antoine Desilets a notamment travaillé à La Presse de 1961 à 1974, puis au journal Le Jour pendant deux ans.

Il a été nommé photographe de presse de l’année en 1966, 1968 et 1969 par la National Press Photographers Association of North America, section Canada et État de New York. En 1967, il a obtenu une mention spéciale au concours de la World Press Photo, une première au Canada.

Avec plus de 700 000 exemplaires vendus, ses livres de photographie ont connu un succès monstre, comme il s’en voit rarement dans le domaine.

Bernard Brault, photographe à La Presse, a été un de ceux qui ont suivi le sentier tracé par Antoine Desilets. « À mes débuts, j’étudiais ses livres de photo. C’est un peu grâce à lui que j’ai commencé ma carrière », a raconté M.  Brault, qui n’a pas caché son admiration pour l’artiste.

PHOTO MARIE-FRANCE COALLIER

Le photographe de La Presse Bernard Brault et Antoine Desilets

« C’était un maître, a-t-il ajouté. Pour moi, c’est sûr que c’est le plus grand photographe québécois en photojournalisme. »

Passionné jusqu’à la fin, Antoine Desilets avait fait l’objet d’une exposition l’été dernier à Drummondville.

« Je pense que même quand il dormait, il avait une caméra dans le cou », a déclaré Pierre McCann.

En 1982, la Ville de Paris lui a remis le premier prix du Musée de la photographie pour son livre Découvrez le monde merveilleux de la photographie. Il a été professeur invité à l’École du CESTI de l’Université de Dakar, où il a enseigné le photojournalisme.

Jacques Nadeau, photographe au Devoir, a été attristé par la nouvelle. Il a rencontré Antoine Desilets plus d’une fois au cours de sa vie. En plus de son immense talent, M.  Nadeau se souviendra d’un homme qui avait beaucoup d’esprit.

« C’est assez incroyable. La première fois que je suis allé le voir, il m’a dit qu’il allait avoir une grosse opération à la jambe. Je pensais aller voir un vieux monsieur couché dans son lit, mais en fin de compte, on a parlé de son état de santé pendant 30 secondes, puis on a divagué sur la photographie pendant quatre heures ! »

« Il a mis le Québec sur la map, a souligné M.  Nadeau. Je le lui ai même dit en personne. »

— Avec La Presse canadienne