Dan Bigras a trouvé une excellente façon de célébrer l’étape de rémission de son cancer : il va plonger la tête première dans un projet loin de sa zone de confort. Le chanteur a en effet accepté d’animer tout l’été une émission d’affaires publiques sur les ondes du 98,5 FM.

L’homme de dizaines et de dizaines de chansons, celui qui est nettement plus à l’aise avec les dièses et les doubles croches, occupera dans quelques jours le fauteuil que Bernard Drainville laissera vacant durant ses vacances. « Bernard aborde surtout des sujets politiques, m’a confié Dan Bigras lors d’une entrevue la semaine dernière. Je serai plus affaires publiques, plus sujets de société. »

Celui qui a récemment choisi de vivre à la campagne a été le premier surpris quand cette offre est arrivée. 

« Ils m’ont téléphoné et c’est devenu un truc d’acteur. J’ai passé une audition, puis j’ai eu un recall. Ils m’ont ensuite fait faire une entrevue avec un politicien de mauvaise foi, un de bonne foi, un chroniqueur, etc. Finalement, ils m’ont dit qu’ils me voulaient. » — Dan Bigras 

L’animateur a seulement quelques jours devant lui pour maîtriser certains aspects techniques du métier d’homme de radio qui doit composer avec le direct et les aléas du chrono. « À un moment donné, on m’a demandé de “closer” l’émission. J’avais 30 secondes, j’en ai pris 40. J’ai parlé dans le beurre pendant 10 secondes. Il y a encore des trucs du métier qui doivent rentrer. C’est une pression que j’aime. Et puis, il y a ma vieille chum Marie-Claude Lavallée qui va m’aider. »

Un vieux rêve

Dan Bigras a touché à beaucoup de choses au cours de sa carrière. Son expérience de la scène l’a amené à devenir acteur et réalisateur. Depuis 1991, il est le porte-parole du Refuge des jeunes. Chaque année, il devient le maître d’œuvre d’un grand spectacle-bénéfice. Il reste cependant certaines sphères dans lesquelles il n’a pas encore osé entrer. La radio fait partie de celles-là.

« Quand j’étais jeune, je me disais que j’aimerais dire à mon enfant [il n’avait pas son fils à ce moment-là] : “Papa a fait tout ce qu’il voulait dans sa vie !” Faire de la radio a toujours été un de mes fantasmes. J’avais oublié ce rêve… Quand ils m’ont téléphoné et m’ont demandé si j’étais libre cet été, cette chose est remontée à la surface. »

Dan Bigras est connu pour son franc-parler. A-t-il l’impression qu’on lui mettra des balises lorsqu’il sera derrière le micro ? « Le 98,5 est l’une des radios les moins orientées, dit-il. Je sens que personne ne me dira de me fermer la gueule. »

À moins d’avoir des chansons en chantier, Dan Bigras a une routine quotidienne qui lui permet de s’abreuver de l’actualité du jour. « Sans être un junkie de l’information, j’aime bien savoir dans quel monde je vis. Je filtre certaines choses. Je lis des articles et des chroniques qui vont forger ma pensée. En revanche, quand ça fait huit fois que l’on me parle de Trump, je ferme ma télé. Cela dit, est-ce que je vais parler de lui à la radio ? Ça se pourrait bien ! Je pourrais même composer une p’tite toune pour lui. »

Quel genre d’intervieweur sera-t-il dans cette quotidienne de trois heures ? Dan Bigras n’a surtout pas l’intention de se prendre pour un journaliste. « Je serai d’abord un citoyen, dit-il. C’est le citoyen qui voudra comprendre certaines choses. Je vais poser mes questions et quand je vais sentir qu’on n’y répond pas, je vais les reposer. »

Rester soi-même

Il est tout de même étonnant que Radio-Canada, avec tous les artistes-chanteurs qu’elle met à son antenne, n’ait jamais pensé à confier une émission musicale à Dan Bigras. Le principal concerné n’est pas très surpris de cela.

« À part Michel C. Auger, on parle encore un peu à la française à Radio-Canada. Je crois que je ne fitte pas là. Faire de la radio, c’est comme faire des chansons : il faut articuler, il faut se faire comprendre. Mais tu dois rester toi-même. » — Dan Bigras

Rester soi-même, voilà sans doute le plus grand projet qu’a mené Dan Bigras au cours des dernières décennies. Dans son ouvrage autobiographique Le temps des seigneurs, il refait son parcours d’écorché. Il raconte comment il a eu la force de mettre un frein aux excès. Il faisait partager au public ses expériences au moment d’entreprendre des traitements de chimiothérapie pour combattre un cancer colorectal venu le frapper de plein fouet il y a un an et demi. En rémission depuis quelques mois, il s’est remis à la création. La proposition d’animer une émission de radio ne pouvait mieux tomber.

Au cours des prochaines semaines, Dan Bigras sera sans doute plus attentif à l’actualité. La télé, la radio et les journaux vont devenir ses meilleurs amis. L’équipe du 98,5 FM qui l’entoure a commencé à lui soumettre des sujets afin de mieux comprendre ses champs d’intérêt. Tel un athlète, il se prépare à affronter ce défi exigeant.

« Les journées vont commencer tôt, je le sais. On va regarder ce qui se passe. Mais on va aussi laisser parler nos envies. Il y a deux recherchistes qui m’entourent. Une est un sosie de Speedy Gonzales, l’autre est plus calme. Elles se complètent très bien. On va avoir du fun. Je crois qu’on va passer un bel été. »

Drainville PM avec Dan Bigras, du lundi au vendredi de 12 h à 15 h, au 98,5 FM, à compter du 21 juin