« Nous avions l'obligation professionnelle et morale d'agir, de nous réinventer nous-mêmes sans que ça nous soit imposé... »

Quand Simon Brault a pris la direction du Conseil des arts du Canada, en 2014, sa réflexion était déjà avancée sur la nécessité de procéder à un réalignement stratégique de l'organisme de soutien aux artistes dont il avait assumé la vice-présidence au cours des 10 années précédentes.

Après de vastes consultations au pays et maintes rencontres à travers le monde, le C.A. du CAC - que préside Nathalie Bondil, directrice du Musée des beaux-arts de Montréal - a adopté en octobre le nouveau plan de financement des arts au Canada dont les grands axes ont été rendus publics hier.

Comme Simon Brault l'avait annoncé il y a deux semaines à la tribune du Conseil des relations internationales des Montréal (CORIM), le Conseil des arts du Canada passera, d'ici 2017, de 147 programmes axés sur les disciplines artistiques à six ensembles de programmes rassemblés autour d'autant d'objectifs stratégiques.

Cette transformation spectaculaire, écrit le CAC, vise à simplifier les demandes de subventions, « répondre de façon proactive et constructive aux tendances et enjeux actuels du domaine des arts, et maximiser les répercussions sociales, créatives et économiques des arts au Canada », et ce, au bénéfice de tous les Canadiens.

La nouvelle stratégie se déploie sur les six axes suivants (voir conseildesarts.ca) : Explorer et créer arrive en appui direct à la mission première du CAC qui est de soutenir le monde de la création, individus, collectifs ou organisations. Le programme Enraciner et partager, de son côté, s'adresse aux organismes qui travaillent en continu dans les communautés en produisant et en présentant des activités artistiques « courantes, viables et de grande qualité ».

Selon Simon Brault qui évoque les conclusions de la Commission de vérité et réconciliation du Canada (publiées hier), le « timing est plutôt bon » pour la mise en place du programme Créer, connaître et partager l'art autochtone qui sera administré par des autochtones, incluant les Inuits et les Métis.

Renouveler la pratique artistique, par ailleurs, s'adresse aux professionnels pour soutenir « l'innovation, la collaboration et l'adaptabilité » - face à la réalité numérique, notamment -, et les aider à concilier « la pratique artistique professionnelle et l'administration d'un organisme artistique ».

Rayonner au Canada aidera à la diffusion d'oeuvres canadiennes « excellentes » dans l'ensemble du pays tandis que le programme Rayonner à l'international, tout orienté vers la performance, soutiendra la circulation des artistes canadiens et de leur art à l'étranger.

Les demandes d'accès à ces nouveaux programmes continueront d'être évaluées par des jurys de pairs qui s'attarderont à l'aspect qualitatif des projets. « Un « pair » a toujours été un artiste de la même discipline, explique Simon Brault. Il y aura peut-être lieu d'élargir cette définition quand viendra le temps d'évaluer les projets en matière de leur alignement avec les objectifs stratégiques... »

Le chef de la direction du CAC en est bien conscient : la mise en place, même progressive, de ce plan apporte en même temps « attentes, espoirs et angoisses » chez les quelque 5000 artistes et organismes que soutient le CAC avec des subventions annuelles totalisant 152 millions de dollars (sur un budget de 180 millions). « Nous allons respecter tous nos engagements actuels, tout en formant notre personnel pour aider les artistes à se reconnaître dans les nouveaux programmes. »

« Les gens de ma génération ont beaucoup profité de ce système », dira Simon Brault en évoquant l'impact du Conseil des arts du Canada depuis sa fondation en 1957. « Un système que je veux contribuer à améliorer au profit des générations qui nous suivent... »