Il semble que chaque semaine apporte sa manifestation dénonçant les compressions budgétaires en culture par le gouvernement Harper. Cette semaine, à Québec, c'était au tour de Robert Lepage de faire entendre sa colère, qualifiant les coupes de «chasse aux idées, une course qui vise à censurer la liberté d'expression, à réduire les possibilités de circulation de la culture à l'étranger».

On parle beaucoup du rayonnement de nos artistes à l'étranger - j'y reviens d'ailleurs cette semaine avec un reportage sur les artistes qui tournent - rappelant qu'un pays n'a pas meilleur ambassadeur que sa culture.

Or, en entrevue cette semaine, Daniel Meilleur, président fondateur des Deux Mondes, soulevait un autre effet pervers des coupes: la capacité réduite d'accueillir des artistes provenant de l'étranger.

Elles se comptent déjà sur les doigts d'une seule main, les salles montréalaises qui incluent dans leur programmation un volet international. Bonne nouvelle: le Théâtre La Chapelle, dont l'avenir était compromis il y a un an, renaît cette saison avec une programmation qui propose entre autres des spectacles allemand, sud-africain, new-yorkais et belge. Pour prendre le pouls de ce qui se fait ailleurs sans prendre l'avion, il reste aussi l'Usine C, même si ce lieu de diffusion a choisi cette année de prendre un virage plus «québécois». Sinon, il reste toujours le centre MAI, si vous parlez anglais. Et heureusement, il y a le Festival TransAmériques, pour voir le meilleur de la production internationale.

Dans une lettre adressée au gouvernement Harper, le FTA soulevait que les coupes des conservateurs allaient forcer le FTA à réduire le nombre de directeurs de théâtre et de festivals invités à cet événement. Moins de programmateurs verront les artistes d'ici. C'est vrai.

Mais en restreignant ainsi la mobilité internationale, on se présente comme une culture fermée sur elle-même et peu intéressée par ce qui se fait ailleurs. Dans un tel contexte, pourquoi des artistes allemands, français, belges, anglais ou néerlandais, habitués à des cachets beaucoup plus élevés que ce qu'on alloue ici, traverseraient-ils l'Atlantique pour venir jouer chez nous?

En mai dernier, à New York, je bavais d'envie en lisant la section des arts du New York Times, qui accordait sa première page à la couverture d'un spectacle londonien dont la distribution était à 100% composée d'Indiens. Rien contre le fait «d'acheter local», mais je rêve du jour où les programmations des théâtres montréalais céderont leurs scènes à des productions d'ailleurs. Parce que tourner, c'est bien beau. Mais parfois, aussi, il faut inviter.