Traduire le concept de crise identitaire québécoise en tamoul, une langue vieille de 3000 ans parlée par 60 millions d'Indiens: voilà le défi relevé par des professeurs de français indiens qui diffusent en tamoul les écrits d'auteurs québécois tels que Michel Tremblay et Anne Hébert.

Invités à Québec par l'Institut national de recherche scientifique et le ministère des Relations internationales, trois professeurs de l'Université de Pondichéry, en Inde, ont participé hier à une cérémonie pour le lancement de deux recueils de nouvelles québécoises traduites en tamoul: L'anthologie de la nouvelle québécoise actuelle, un recueil constitué par Gilles Pellerin, et La distraction, de Naïm Kattan.

Près de 200 000 Indiens étudient le français dans leur pays, soit l'équivalent de la population universitaire totale du Québec! Six mille professeurs y enseignent la langue de Molière. Les étudiants polyglottes ne font pas que maîtriser l'orthographe et la prononciation, ils s'imprègnent de la culture en lisant La littérature québécoise: une introduction en tamoul. Environ huit oeuvres québécoises ont été traduites à ce jour.

Choc des cultures

Les professeurs sont aux prises avec des défis de taille: «Les Tamouls ne comprennent pas la crise d'identité québécoise, dit le professeur Madanagobalane. Ils pensent que le Québec fait partie du Canada, tout simplement.» Lorsqu'on vit dans un pays comptant plus de 1600 langues, dont 18 officielles, on peut difficilement envisager les enjeux sociaux du Québec, parcelle francophone de l'Amérique du Nord.

«L'Université de Pondichéry inscrit des livres traduits en tamoul au programme», affirme le traducteur R. Kichenamourty, un des apôtres du Québec en Inde. «C'est une gloire pour nous.».

77 millions

Des communautés tamoules existent sur tous les continents: au Sri Lanka, en Malaisie, dans l'île Maurice, dans les Antilles françaises, etc. Au total, 77 millions de personnes parlent cette langue millénaire, l'équivalent de 65% des francophones du monde.

La France a fondé au XVIIe et au XVIIIe siècle des établissements au pays des épices, sur le territoire de Pondichéry, au sud.

La langue française a ainsi pris racine en Inde, et trouve son utilité dans le contexte mondialisé actuel. Il suffit de songer aux centres d'appels implantés en Inde par des compagnies multinationales.

Polyglottes

Les Indiens ont-ils une facilité naturelle à apprendre des langues? «Oui bien sûr! s'exclame le Dr Kichenamourty. Les Indiens parlent facilement trois ou quatre langues.

Les mariages mixtes sont fréquents. Par exemple, mes enfants parlent le télégou et le tamoul, et ils étudient en anglais.»

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