Le ministère allemand de l'Intérieur souhaiterait pouvoir espionner les ordinateurs des terroristes présumés en leur envoyant par courrier électronique des «chevaux de Troie», sortes de virus informatiques, selon un document interne au gouvernement révélé mercredi par la presse.

Le ministère allemand de l'Intérieur souhaiterait pouvoir espionner les ordinateurs des terroristes présumés en leur envoyant par courrier électronique des «chevaux de Troie», sortes de virus informatiques, selon un document interne au gouvernement révélé mercredi par la presse.

Dans le cadre du projet de loi actuellement en discussion sur l'extension des pouvoirs antiterroristes de la police fédérale allemande (BKA), le ministère de l'Intérieur souhaiterait autoriser l'usage de «remote forensic softwares», ou «logiciels d'analyse à distance». Ils s'installeraient sur l'ordinateur ou l'assistant personnel de la personne visée à son insu, selon ce document révélé par plusieurs journaux, et dont le gouvernement a confirmé mercredi l'authenticité.

Le virus informatique pourrait être placé dans l'ordinateur visé par des policiers qui s'introduiraient discrètement au domicile du suspect. Mais il pourrait également, dans «des cas exceptionnels et fondés sur des raisons valables», être introduit dans le système informatique à espionner par le biais d'un courrier électronique, que les autorités enverraient sous une fausse identité.

Le «cheval de Troie» examinerait alors les données de l'ordinateur, puis enverrait à la police le résultat de son analyse, par le biais d'Internet.

Les porte-paroles des ministères de l'Intérieur et de la Justice, Stefan Kaller et Henning Plöger, ont confirmé mercredi l'existence de ce projet, mais se sont refusés à tout commentaire sur ce qu'ils ont qualifié de «document de travail».

La question de la surveillance policière des ordinateurs, une mesure actuellement illégale mais ardemment souhaitée par le ministre de l'Intérieur Wolfgang Schäuble, suscite un vif débat depuis plusieurs mois en Allemagne, où le souvenir de l'Etat policier omniprésent sous le régime nazi reste vif.

Le Parti social-démocrate (SPD), partenaire des conservateurs au sein du gouvernement d'Angela Merkel, s'est toujours montré très sceptique sur ce projet. Mercredi, un de ses responsables, le ministre régional de l'Intérieur du Schleswig-Holstein (nord), Ralf Stegner, a appelé à «garder la tête froide».

«Ce qui est clair, c'est que le SPD ne prendra pas part à une réforme constitutionnelle simplement pour autoriser les perquisitions en ligne», a dit ce ministre régional au quotidien Leipziger Volkszeitung de jeudi. De telles surveillances doivent être «nécessaires, réalisables et conformes à la Constitution», a fait valoir M. Stegner, émettant des doutes sur ces trois points.

A l'inverse, le vice-président du groupe chrétien-démocrate au Bundestag, Wolfgang Bosbach, a défendu le projet. L'usage de virus informatiques pour espionner les terroristes présumés est nécessaire car «on ne peut pas faire de l'espionnage en ligne avec un marteau, une pince et un chalumeau», a-t-il fait valoir.

De toutes façons, de telles surveillances, si elles étaient autorisées, ne pourraient être mises en oeuvre que «cinq fois par an, dix au maximum», a argumenté le président de la police criminelle BKA, Jörg Ziercke, dans une interview au magazine Stern. En effet, un virus informatique spécifique devrait être mis au point pour chaque opération de surveillance, a-t-il expliqué.