Quiconque passe du temps sur ChatGPT, Bard ou d’autres robots d’IA finit par tomber sur ce que l’on appelle des « hallucinations » : des informations erronées concoctées à l’occasion par des machines.

Votre robot déduit quoi répondre à partir d’informations puisées dans tout l’internet : parfois, il se trompe, c’est inévitable. Vous cherchez une recette de gâteau de fête, il vous triple la mesure de farine : ça gâche vraiment le dessert après avoir chanté Joyeux anniversaire…

Alors comme l’intelligence artificielle (IA) est de plus en plus présente dans nos vies, il est crucial de savoir comment bien l’utiliser. Je viens de passer deux mois à tester des dizaines d’outils d’IA : d’après moi, on sous-utilise cette technologie, principalement parce que les entreprises technologiques nous donnent de mauvaises indications.

Contrôler ce que l’IA consulte

Les robots conversationnels déçoivent lorsqu’on leur pose des questions et qu’on s’attend à l’exactitude de ce qu’ils trouvent eux-mêmes dans tout le web. Mais si on leur demande d’utiliser des sources fiables (sites crédibles, documents de recherche, etc.), l’IA peut accomplir des tâches utiles avec un degré élevé de précision.

« Si vous leur donnez la bonne info, ils peuvent en faire des choses intéressantes », dit Sam Heutmaker, fondateur de Context, une petite firme d’IA.

Mais, laissés à eux-mêmes, 70 % de ce qu’ils génèrent est inexact.

Sam Heutmaker, fondateur de Context, une petite firme d’IA

Juste en précisant avec quelles données travailler, on obtient des robots d’IA des réponses intelligibles et des conseils utiles. Ce truc a fait de moi un utilisateur convaincu de l’IA, alors que j’étais hostile et sceptique il y a deux mois. Quand je suis parti en voyage avec un itinéraire préparé par ChatGPT, tout s’est bien passé, car ses recommandations venaient de mes sites de voyage préférés.

Orienter les robots d’IA vers des sources de haute qualité – sites de médias fiables et publications universitaires – peut aussi réduire la production et la diffusion de faussetés. Voici quelques trucs pour obtenir de l’aide en matière de cuisine, de recherche et de planification de voyages.

À table

Les robots d’IA comme ChatGPT et Bard peuvent rédiger des recettes appétissantes sur papier, mais immangeables en pratique. Lors d’une expérience du New York Times en novembre 2022, un des premiers outils d’IA a créé des recettes pour l’Action de grâce : la dinde était extrêmement sèche et le gâteau, dur.

Les recettes de fruits de mer générées par l’IA étaient souvent décevantes. Mais les choses ont changé quand j’ai essayé des modules d’extension de ChatGPT (des plug-ins : grosso modo, ce sont des applis ChatGPT faites par des tiers ; seuls les abonnés [20 $/mois] à ChatGPT4, la dernière version, peuvent utiliser les modules, qui s’activent dans « Paramètres »).

Dans le menu des modules de ChatGPT, j’ai sélectionné Tasty Recipes, qui extrait des données du site Tasty appartenant au média BuzzFeed. Puis, j’ai demandé au robot de puiser dans ce site des repas comprenant des fruits de mer, du porc haché et des accompagnements de légumes. Les menus étaient inspirants : banh mi au porc et à la citronnelle, tacos au tofu grillé, pâtes. Chaque suggestion de repas était hyperliée à une recette sur Tasty.

Pour les recettes tirées d’autres sites, j’ai utilisé Link Reader, un module qui permet de coller un hyperlien pour générer des menus à partir d’autres sites crédibles. ChatGPT y a puisé des données pour créer des menus et m’a demandé de visiter ces sites web pour y lire les recettes. C’est plus de travail, mais c’est mieux qu’un repas concocté par l’IA.

Chercher sur le web

Pour préparer un article sur des jeux vidéo populaires, j’ai demandé à ChatGPT et à Bard de me rafraîchir la mémoire sur les jeux passés et sur leurs intrigues. Tous deux se sont trompés sur des détails importants concernant les histoires et les personnages.

J’ai testé de nombreux autres outils d’IA : en matière de recherche, il est capital de choisir des sources fiables et de vérifier sur-le-champ l’exactitude des données. J’ai fini par trouver un outil qui répond à ces exigences : Humata.AI, une appli web gratuite prisée des chercheurs universitaires et des avocats.

Humata.AI permet de télécharger un document – PDF ou autre –, puis un robot d’IA répond par écrit à vos questions juste à côté du document, surlignant les parties pertinentes.

Lors d’un test, j’y ai téléchargé un article trouvé sur PubMed, un moteur de recherche gouvernemental de la littérature scientifique. En quelques minutes, Humata. AI a bien résumé ce long document, un processus qui m’aurait pris des heures. J’ai jeté un coup d’œil aux passages surlignés pour vérifier que la version condensée était exacte.

Cyrus Khajvandi, cofondateur d’Humata, établie à Austin, au Texas, a développé l’application lorsqu’il était chercheur à Stanford et qu’il devait lire beaucoup d’articles scientifiques denses. Les robots comme ChatGPT ont un défaut : ils s’appuient sur des modèles obsolètes du web, de sorte que les données peuvent manquer de contexte, dit-il.

Partir en voyage

Lorsqu’une collègue du Times a demandé à ChatGPT de préparer son itinéraire de visites à Milan, le robot l’a guidée vers un quartier qui était désert parce que c’était un jour férié en Italie. Il y a eu d’autres ratés.

Je m’en suis mieux tiré quand j’ai demandé un itinéraire de vacances pour ma femme, moi-même et nos chiens dans le comté de Mendocino, en Californie. J’ai utilisé la même méthode que pour les repas. J’ai demandé à ChatGPT d’intégrer des suggestions provenant de sites de voyage fiables comme Thrillist et la section voyage du Times.

En quelques minutes, ChatGPT a généré un itinéraire comprenant des restaurants et des activités adaptées aux chiens, notamment une ferme proposant des accords vins et fromages et un train menant à un sentier de randonnée populaire. Cela m’a épargné plusieurs heures de planification et, surtout, les chiens ont passé un excellent moment.

En bref

OpenAI, qui collabore étroitement avec Microsoft, et Google affirment qu’ils s’efforcent de réduire les hallucinations de leurs robots d’IA. Mais on peut déjà profiter de l’IA en déterminant quelles données ces machines utilisent pour générer des réponses.

Autrement dit, le principal avantage de ces robots ayant accès à d’énormes ensembles de données est qu’ils utilisent le langage pour imiter le raisonnement humain, explique Nathan Benaich, un investisseur qui finance des entreprises d’IA. Notre responsabilité, a-t-il ajouté, est d’apparier cette capacité à des informations de haute qualité.

Cet article a été publié dans le New York Times.

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