Chaque samedi, un de nos journalistes répond, en compagnie d’experts, à l’une de vos questions sur l’économie, les finances, les marchés, etc.

Pourriez-vous expliquer ce qu’est le “ratio de couverture de la dette” utilisé par les prêteurs hypothécaires lors de leur analyse d’une demande de prêt ? Quelle importance a-t-il dans la décision d’accorder ou non un prêt ?

M. Villeneuve

La question de M. Villeneuve concernant les normes d’admissibilité à un emprunt hypothécaire est très pertinente au terme d’une année marquée par la forte hausse des taux d’intérêt par la Banque du Canada, afin de freiner l’inflation qui a atteint un niveau record en 40 ans.

De fait, la remontée vigoureuse des taux d’intérêt hypothécaires depuis un an – de l’ordre de 4 % à 5 % selon le type de prêts – entraîne des tensions financières considérables chez les emprunteurs hypothécaires en devenir, ainsi que chez ceux qui s’apprêtent à renouveler leur prêt.

« Les emprunteurs devront s’armer de patience, car les taux d’intérêt de détail resteront vraisemblablement à des niveaux historiquement élevés encore plusieurs trimestres », indiquent les économistes du Mouvement Desjardins dans leurs plus récentes « Prévisions de taux d’intérêt » publiées en décembre.

Et même si le récent repli des taux de rendement obligataires à long terme permet d’anticiper une stabilisation des taux d’intérêt, « il faudra probablement attendre plus tard en 2023 avant que des baisses ne soient observées ».

Entre-temps, soulignent les économistes de Desjardins, « le contexte de récession pourrait inciter les institutions financières à être plus prudentes quant à leurs politiques d’octroi de prêts et de crédit ».

En d’autres mots, ce sont à des prêteurs plus exigeants en matière de normes de qualification financière que font face désormais les emprunteurs hypothécaires.

Dans ce contexte, une meilleure connaissance des principaux critères d’admissibilité à un prêt peut s’avérer un atout important dans la préparation d’une demande de financement hypothécaire. Surtout pour un nouveau prêt pour l’achat d’une propriété, mais aussi pour un renouvellement de prêt existant avec des conditions et des taux plus coûteux.

Dans leur processus d’examen d’une demande de prêt hypothécaire, les prêteurs utilisent deux mesures, ou « ratios » dans le vocabulaire financier, afin de déterminer le montant maximal du prêt auquel un emprunteur est admissible.

Mais au lieu du « ratio de couverture de la dette » auquel réfère M. Villeneuve dans sa question à La Presse, les prêteurs utilisent en fait le « ratio d’amortissement brut de la dette » et le « ratio du service total de la dette ».

Ces deux mesures font aussi partie des normes établies par les autorités financières au Canada, en particulier la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL). Cette société d’État fédérale est le principal fournisseur d’assurance prêt hypothécaire au Canada pour les emprunteurs qui ont moins de 25 % en capital dans leur achat immobilier.

Le calcul des ratios

Comment se calculent ces deux mesures de qualification financière d’un emprunteur hypothécaire ?

D’abord, le ratio d’amortissement brut de la dette, ou ABD dans le vocabulaire de la SCHL, est basé sur le calcul du montant mensuel total des versements hypothécaires (capital et intérêt), des taxes foncières et des services publics (énergie et chauffage), ainsi que la moitié des frais de copropriété le cas échéant.

Ensuite, le prêteur hypothécaire divise ce montant mensuel total par la somme du revenu brut mensuel du demandeur de prêt.

Si le ratio résultant de cette division ne dépasse pas 32 %, qui est la première norme établie par la SCHL, l’emprunteur réussit alors le premier niveau de qualification pour sa demande de prêt hypothécaire.

Quant au deuxième niveau d’admissibilité, il s’agit du « ratio d’amortissement total de la dette », ou ATD, auprès de la SCHL (aussi désigné « ratio d’endettement » par des analystes).

Ce ratio est basé sur un calcul semblable à celui de l’ABD. Mais le prêteur y ajoute les débours mensuels pour les dettes déjà au bilan financier personnel du demandeur de prêt hypothécaire : prêt ou location-bail automobile, prêt personnel, marge de crédit, soldes de cartes de crédit, etc.

Ce montant total mensuel des débours financiers et fonciers est ensuite divisé par le revenu mensuel brut de l’emprunteur hypothécaire.

Si le ratio résultant de cette division est inférieur à 40 %, qui est la seconde norme établie par la SCHL, l’emprunteur satisfera alors au deuxième critère d’admissibilité pour sa demande de prêt hypothécaire.

Des « normes directrices »

En question supplémentaire : que se passe-t-il en cas d’échec du demandeur de prêt hypothécaire à l’une ou l’autre de ces étapes de qualification financière ?

« Si votre ABD ou votre ATD dépasse la norme émise par la SCHL, vous devrez envisager d’augmenter votre mise de fonds (sur le prix d’achat de la propriété convoitée) et de rembourser une partie des autres dettes personnelles existantes avant de soumettre une nouvelle demande de prêt hypothécaire », lit-on sur le site internet de la firme ratehub.ca, spécialisée en infoconseils de crédit hypothécaire.

Par ailleurs, souligne ratehub.ca, « les niveaux maximums de 32 % pour l’ABD et de 40 % pour l’ATD sont des normes directrices et non des règles absolues ».

Si un demandeur d’emprunt a une cote de crédit déjà élevée, ou s’il détient déjà des biens et des actifs de valeur significative, il pourrait être admissible à un prêt hypothécaire selon des critères particuliers à chaque prêteur.

Quelques outils

Voulez-vous estimer votre capacité d’emprunt hypothécaire ? Voici des calculateurs de base accessibles sur l’internet.

Consultez le calculateur de Desjardins Consultez le calculateur de la Banque Nationale Consultez le calculateur de la SCHL

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