La surchauffe du marché immobilier pendant la pandémie va laisser des traces dans le prochain rôle d’évaluation de l’agglomération de Montréal qui sera présenté le 14 septembre. La valeur des propriétés résidentielles de moins de 5 logements devrait bondir de 30 à 40 % par rapport aux valeurs inscrites au rôle municipal actuellement en vigueur.

Les chiffres proviennent d’une étude réalisée par la firme de données immobilières JLR pour le compte exclusif de La Presse.

Cette augmentation rapide est liée à l’emballement du marché immobilier montréalais pendant la pandémie, en 2020 et 2021.

Selon cette étude qui a analysé quelque 20 000 transactions survenues en 2021, année servant de référence à la confection du prochain rôle, les propriétaires de maison devraient s’attendre à une hausse de valeur légèrement supérieure à 40 % en moyenne, tandis que la valeur des copropriétés fera un bond plus près de 30 %.

Quant aux propriétaires de petits immeubles à revenus de 2 à 5 logements, communément appelés plex, ils devraient voir la valeur de leur immeuble s’apprécier d’un pourcentage se situant entre 30 et 40 %.

La hausse attendue sera deux fois plus importante qu’au rôle 2020-2021-2022, qui prenait 2018 comme année de référence. Il affichait une hausse moyenne de 13,6 % des valeurs résidentielles.

Le rôle antérieur, celui de 2017-2018-2019, affichait une hausse moyenne encore plus faible de 5,8 % pour le secteur résidentiel.

Il importe de rappeler qu’une hausse spectaculaire des valeurs au rôle ne se traduit pas automatiquement par une hausse du compte de taxes municipales. L’impôt foncier est calculé en fonction de la valeur foncière, certes, mais aussi du taux de taxation, qui est déterminé par le conseil municipal lors de l’adoption du budget annuel. Logiquement, une hausse des valeurs de 25 %, par exemple, sera compensée par une baisse du taux de taxation du même ordre pour maintenir à peu près constants les revenus de taxation.

Estimation semblable

L’estimation de JLR rejoint celle faite par l’évaluateur de la Ville de Montréal, Bernard Côté, en janvier dernier lors de sa comparution devant la Commission des finances de la Ville.

M. Côté avait accepté de donner aux élus municipaux un aperçu de ce à quoi ressemblera le rôle d’évaluation 2023-2024-2025 de la Ville de Montréal.

« C’est clair que c’est un rôle qui est — pour le résidentiel – à la hauteur de 30 % [d’augmentation] », avait alors indiqué le fonctionnaire municipal.

Contrairement au rôle en vigueur (où l’est de l’île avait connu de faibles hausses de valeur), cette fois-ci, les variations de valeur sont relativement homogènes entre les villes de l’île de Montréal, de même qu’entre les arrondissements de la Ville de Montréal.

Le gros des secteurs connaît des hausses de l’ordre de 30 à 50 % dans le cas des maisons. Les quartiers plus cossus, toutefois, verront une progression des valeurs inférieure à la moyenne. C’est le cas de Westmount, d’Outremont et de Mont-Royal. C’est le contraire pour les villes de l’ouest de l’île, comme Dollard-des-Ormeaux, où la croissance des valeurs frôle les 50 %.

Le centre-ville a souffert

Dans le cas de la copropriété, la fourchette des hausses des valeurs est plus étendue, allant de 25 à 40 % pour la vaste majorité des quartiers.

Exception à cette règle, les copropriétés du centre-ville et de Griffintown, qui ont été désertées pendant la pandémie, souligne Francis Cortellino, économiste à la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL).

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, LA PRESSE

Tours de copropriétés à Griffintown

La Presse avait demandé à M. Cortellino de consulter l’évolution du prix médian des logements revendus par le truchement du système Centris entre 2018 et 2021. Centris est la base de données centrale des courtiers immobiliers.

La perte de popularité du centre-ville et de Griffintown se reflétera dans le nouveau rôle. La hausse des valeurs des condos devrait tourner autour de 20 %, moins pour certaines zones à l’intérieur de ces deux quartiers.

Le rôle, qui entrera en vigueur le 1er janvier 2023, sera valide pour trois ans. Il est censé refléter les conditions du marché prévalant à la date de référence du rôle 2023‐2024‐2025, soit le 1er juillet 2021.

Méthodologie

L’analyse de JLR donne une bonne idée du prochain rôle foncier, sans parvenir à des résultats identiques. La Ville segmente l’île en près de 3800 secteurs homogènes (unités de voisinage). La variation moyenne est obtenue en comparant les prix de vente de 2018, année de référence du prochain rôle, aux valeurs inscrites au rôle en vigueur à l’ensemble des propriétés de l’unité de voisinage. Les variations sont aussi corroborées par l’application d’autres méthodes d’évaluation. De son côté, JLR compile les ventes en fonction des arrondissements et des villes de banlieue. Par exemple, si la firme dénombre 101 transactions de maisons en 2018 dans un arrondissement donné, elle calcule le ratio entre le prix payé et l’évaluation de chacune des 101 transactions. JLR retient ensuite le ratio médian, soit le ratio qui découpe l’échantillon en deux parties égales. Les ventes de propriétés neuves sont exclues de l’analyse, tout comme les ventes qui ne sont pas représentatives du marché.