Les inondations ont fait baisser le prix de vente finale des maisons au Canada de 8,2 %, révèle une rare étude sur le sujet réalisée par des chercheurs du Centre Intact d’adaptation au climat de l’Université de Waterloo. Dans les communautés touchées par les inondations, on note une baisse de 44,3 % du nombre de maisons mises en vente pendant une période de 6 mois après la catastrophe.

C’est à Gatineau que la chute du prix a été la plus brutale, selon le rapport. Le montant final des ventes de propriétés en zones inondées a baissé de 17,1 %. Si on compare aux zones non inondables de la même ville, le nombre de maisons mises en vente a chuté de 91,4 %. Seul Toronto a fait pire avec aucune maison vendue dans un tel secteur (soit un taux de 100 %).

Autre donnée qui ressort : les propriétés des zones inondables vont passer en moyenne 19,8 % plus de temps sur le marché qu’une propriété en zone non inondable.

Les chercheurs se sont penchés sur cinq villes canadiennes qui ont subi des inondations catastrophiques de 2009 à 2020 pour leur étude Nager sur place : les effets des inondations sur le marché de l’habitation du Canada. Les répercussions des inondations ont été mesurées sur des périodes de six mois avant et après les évènements.

Consultez l’étude Nager sur place : les effets des inondations sur le marché de l’habitation du Canada

Impacts réels sur le marché immobilier

Si l’on connaît déjà les effets négatifs des inondations sur les primes d’assurance habitation, qui ont notamment augmenté de 20 à 25 % au Canada entre 2015 et 2019, les chercheurs affirment qu’il s’agit du premier rapport qui quantifie les impacts réels des inondations sur le marché immobilier résidentiel canadien.

« Bien que l’analyse des données pour ce rapport n’ait pas été difficile, l’obtention de données a été problématique et longue », explique Joanna Eyquem, directrice générale, infrastructures résilientes au climat, au Centre Intact d’adaptation au climat de l’Université de Waterloo.

« Nous ne pouvions pas obtenir de données directement par l’intermédiaire de l’Association canadienne de l’immeuble (ACI), poursuit-elle. Nous avons dû établir des relations avec des courtiers immobiliers individuels à travers le Canada, dans les communautés touchées par les inondations, puis dépendre de ces agents pour sécuriser les données de leurs chambres immobilières locales. »

Depuis 10 ans, la province de Québec a eu son lot d’inondations. Que ce soit à Gatineau et à Sainte-Marthe-sur-le-Lac en 2019, dans plusieurs villes, de Montréal jusqu’en Gaspésie, en 2017, sans oublier celles de la Montérégie en 2011.

Les inondations examinées sont celles survenues de 2009 à 2020. Au cours de cette période, les pertes assurées liées à une catastrophe naturelle ont atteint une moyenne d’environ 2 milliards de dollars par année, comparativement à 422 millions par année pour la période de 1983 à 2008, précise le rapport.

Prévenir les risques

En analysant les effets des sinistres catastrophiques sur les valeurs immobilières, les chercheurs observent que c’est finalement le propriétaire résidentiel qui court le plus grand risque financier associé aux répercussions des changements climatiques.

« On a peur de publier une carte qui montrerait clairement les zones inondables aux futurs acheteurs, parce qu’on craint que ce soit néfaste pour le marché immobilier et que ça fasse baisser le prix des maisons. Or, le rapport démontre qu’il y a déjà un impact sur les prix sans ce type de carte », précise en entrevue Joanna Eyquem.

Dans leur rapport, les chercheurs suggèrent d’ailleurs six mesures pour limiter les risques d’inondation pour le secteur de l’immobilier résidentiel au Canada. Les municipalités, les banques, les assureurs et les associations immobilières devraient, par exemple, communiquer des conseils aux propriétaires pour réduire le risque d’inondation des sous-sols. De leur côté, les collectivités devraient délimiter et protéger les zones à haut risque d’inondation.

Le gouvernement fédéral devrait, selon eux, avoir un programme d’évaluation des maisons en matière d’adaptation au climat, s’assurer que les cartes des risques d’inondation soient diffusées au public et restaurer les infrastructures naturelles (forêts, prairies, milieux humides) pour limiter les risques d’inondation.