Il est de plus en plus difficile pour les consommateurs de financer l’achat de motomarines, bateaux et autres véhicules récréatifs, qui restent plus longtemps dans la cour des concessionnaires, constate BRP. Après avoir fracassé des records ces dernières années, des mois plus « difficiles » — qui s’accompagnent de mises à pied — attendent maintenant l’entreprise.

« Des concessionnaires nous disent qu’il y a une augmentation des refus de crédit du côté des clients avec un revenu discrétionnaire moins élevé, a observé le président et chef de la direction de BRP, José Boisjoli, jeudi en conférence téléphonique pour commenter les résultats du troisième trimestre. Cette clientèle a plus de difficulté à financer ses achats en raison des taux d’intérêt élevés et je crois que les banques sont plus restrictives. »

PHOTO ROBERT SKINNER, ARCHIVES LA PRESSE

José Boisjoli, président et chef de la direction de BRP

Stimulé par la demande pour les produits récréatifs depuis le début de la pandémie, le constructeur des Ski-Doo, Sea-Doo et Can-Am avait habitué ses actionnaires ainsi que les analystes à une croissance constante de ses profits et revenus. Le vent a cependant tourné entre les mois d’août à octobre.

Un coup de frein s’est observé du côté de la demande, notamment dans des marchés comme l’Europe, l’Asie-Pacifique ainsi que le Moyen-Orient. Résultat : l’entreprise établie à Valcourt a affiché un déclin de son bénéfice net ainsi que de son chiffre d’affaires au troisième trimestre ayant pris fin le 31 octobre dernier (voir tableau), en plus de réviser à la baisse certaines cibles financières.

La réaction des investisseurs n’a pas tardé. À la Bourse de Toronto, à la fermeture, le titre de BRP abandonnait 11,8 %, ou 11,20 $, pour se négocier à 83,80 $.

Ralentissement généralisé

Même les États-Unis — le principal marché de la société — montrent des signes d’essoufflement malgré un bas taux de chômage et une inflation qui ralentit.

« La confiance des consommateurs a fléchi depuis juillet et les soldes de carte de crédit atteignent un niveau record, a expliqué M. Boisjoli. Il y a des signaux de ralentissement aux États-Unis. Combinés aux conditions à l’international et les deux conflits (Ukraine/Russie et Israël/Hamas), nous préférons demeurer prudents. »

Dans ce contexte, le dirigeant de BRP a dit s’attendre à quelques trimestres « difficiles ». Néanmoins, la demande demeure vigoureuse pour les produits haut de gamme, notamment du côté des motos à trois roues et des autoquads biplaces (véhicules côte à côte), affirme M. Boisjoli.

Ce sont les consommateurs avec un revenu discrétionnaire moins élevé qui sont plus hésitants.

José Boisjoli, président et chef de la direction de BRP

En baisse

Pendant le troisième trimestre, les ventes des concessionnaires ont notamment décliné du côté des motomarines, des motos à trois roues et des pontons. Ce déclin a été contrebalancé par une augmentation observée du côté des motoneiges, des autoquads biplaces et des véhicules tout-terrain.

Bon nombre d’analystes financiers se demandaient jusqu’à quel point la multinationale québécoise serait en mesure de continuer à dépasser les attentes en dépit du ralentissement économique. À la Banque Scotia, Jonathan Goldman estime que le troisième trimestre était en quelque sorte le coup de frein anticipé par plusieurs.

« Nous croyons qu’un grand nombre d’investisseurs demeuraient sur les lignes de côté en raison des inquiétudes à l’égard des bénéfices et d’une éventuelle réduction des prévisions », a écrit l’analyste, dans une note envoyée à ses clients.

La baisse de la demande contraint néanmoins BRP à s’adapter. L’entreprise a ajusté sa production à la baisse pour éviter que les stocks ne s’accumulent chez ses concessionnaires. À la fin d’octobre, les stocks étaient en hausse de 52 % chez les concessionnaires par rapport à la même période il y a un an. Cela s’est déjà traduit par des réductions d’effectifs au Mexique, où l’entreprise est bien présente. Il y aura aussi des ajustements au Québec en 2024.

« Au Mexique, des réductions d’effectifs ont déjà eu lieu par attrition naturelle et nous regardons si, au cours des prochains mois, des changements additionnels vont être nécessaires, a indiqué Émilie Proulx, porte-parole de BRP. À Valcourt, nous avons annoncé à nos employés des mises à pied temporaires de quelques semaines pour le printemps. »

Mme Proulx n’a pas voulu donner de détails sur l’ampleur des réductions.

En ce qui a trait à ses prévisions, BRP s’attend à voir son chiffre d’affaires annuel augmenter de 4 à 5 %. Sa prévision antérieure tablait sur une augmentation allant de 7 à 10 %. Le bénéfice d’exploitation ajusté devrait pour sa part demeurer stable. BRP anticipait auparavant une croissance allant de 9 à 13 %.

En savoir plus
  • 14
    Nombre d’usines exploitées par BRP dans le monde. L’usine québécoise se trouve à Valcourt.
    SOURCE : brp