Airbus est prête à fournir sa part d’efforts pour aider Spirit AeroSystems, un important fournisseur de l’A220 qui impute une partie de ses déboires financiers à l’ancienne C Series, mais le géant américain devra aussi trouver des moyens de redresser la barre, prévient la multinationale européenne.

Le géant américain des pièces d’aéronautique a répété à maintes reprises qu’il souhaitait renégocier les termes de son entente avec l’avionneur en ce qui a trait à l’A220, l’un des programmes à l’origine de ses soucis. Le mois dernier, Spirit a été en mesure de s’entendre avec Boeing, son autre grand client, afin d’obtenir de la souplesse financière.

« On est obligés de le prendre en compte », affirme le président-directeur général d’Airbus Canada, Benoît Schultz, en entrevue avec La Presse, jeudi, en marge d’une allocution devant la Chambre de commerce du Montréal métropolitain (CCMM). « C’est un partenaire important de l’avion. »

Devant un parterre de gens d’affaires, M. Schultz était notamment venu confirmer une expansion d’Airbus à Mirabel – dont une partie avait été éventée par La Presse en juillet dernier – en plus de dévoiler une étude commandée à PwC pour témoigner des retombées économiques du programme développé par Bombardier et contrôlé par l’avionneur européen depuis 2018.

Spirit joue un rôle important dans la chaîne d’approvisionnement de l’A220 – dans lequel l’État québécois détient une participation de 25 % après y avoir injecté pas moins de 1,7 milliard depuis 2015. L’entreprise construit une partie du fuselage, les ailes de l’avion ainsi que les pylônes de l’appareil, le composant qui relie le moteur à l’aile ou au fuselage.

Une montée de la cadence de production qui tarde à prendre son envol, des difficultés à obtenir certaines pièces et la montée des salaires donnent du fil à retordre au fournisseur américain, contraint de dépenser plus que prévu. Ses demandes surviennent cependant à un moment où Airbus tente toujours de faire sortir l’A220 du rouge et de continuer à réaliser des économies auprès de ses fournisseurs.

Airbus peut y aller d’un effort, affirme M. Schultz, avant d’ajouter qu’elle ne pourra tout faire seule.

« Spirit, c’est un acteur mondial ; moi, j’attends d’un acteur mondial qu’il soit capable d’implanter des plans d’amélioration, affirme le dirigeant d’Airbus Canada. On l’aide, nous sommes présents sur site, mais c’est sa responsabilité d’implanter les améliorations. C’est un partenaire qui gère le risque sur le programme. »

Expansion dans les Laurentides

L’A220 devrait être rentable une fois que 14 avions par mois sortiront des usines de Mirabel et de Mobile, en Alabama. Airbus a souvent répété que cette cible serait atteinte vers le « milieu de la décennie ». L’entreprise évoque 2026 de manière plus catégorique.

Cette accélération de la cadence semble finalement s’observer. À la fin d’octobre, cinquante exemplaires de l’A220 avaient été remis à des clients, un nombre en hausse de 28 % par rapport à l’an dernier.

D’ici à ce que la rentabilité soit atteinte, la multinationale européenne bonifiera son empreinte à Mirabel. Elle y aménagera un centre d’essais en vol dans un bâtiment voisin de l’usine en plus d’y construire un centre de livraison – un outil utilisé par l’avionneur dans d’autres centres de production dans le monde.

« Regardez les sites d’Airbus dans le monde qui ont des centres d’essais en vol, explique M. Schultz. Il n’y en a pas énormément. Le centre d’essais en vol d’Airbus en Europe est à Toulouse. C’est le seul. »

En ce qui a trait au centre de livraison, La Presse avait éventé les détails en juillet dernier. Le coût pour la structure est estimé à environ 44 millions de dollars et le maître d’œuvre du chantier est Magil Construction. La somme de 44 millions ne comprend pas tout ce qui concerne l’outillage de ce nouveau complexe.

ILLUSTRATION FOURNIE PAR AIRBUS

Un centre de livraison jouxtera l’usine d’Airbus à Mirabel.

Pour les constructeurs d’avions, un centre de livraison est l’endroit où une compagnie aérienne devient officiellement propriétaire d’un appareil. Ce processus se concrétise au terme de plusieurs jours d’inspections et de vols. On inspecte par exemple l’intérieur de la cabine et la peinture pour repérer les éventuels défauts et effectuer les retouches.

À Mirabel, cette étape s’effectue à l’intérieur des hangars actuels, où il faut libérer de l’espace pour assembler davantage d’appareils.

En savoir plus
  • 5,7 milliards
    Contribution de l’A220 au produit intérieur brut du Canada entre 2018 et 2022
    Source : PwC
    35,2 milliards
    Contribution estimée du programme sur le produit intérieur brut d’ici 2038
    Source : PwC