La Banque Laurentienne se réorganise après avoir tenté sans succès de trouver un acquéreur.

La direction de la banque a annoncé jeudi avoir terminé son exercice de révision stratégique et juge que la meilleure voie à suivre pour maximiser la valeur pour ses actionnaires est d’accélérer l’évolution de son plan stratégique.

Durant le processus de révision, la vente de la banque a été envisagée. La Laurentienne a reçu des offres d’achat dans le cadre de cet examen, dont au moins une pour la totalité de la banque, selon nos informations.

La valeur des propositions reçues n’aurait toutefois pas été jugée avantageuse pour les actionnaires.

Toujours d’après nos informations, des acteurs auraient manifesté leur intérêt la semaine dernière encore pour la banque ou une de ses divisions. Des prétendants ayant précédemment quitté le processus auraient même décidé d’envisager de nouveau une transaction en cours de route cet été.

La valeur à accorder à la Laurentienne peut être débattue, mais deux éléments importants doivent être considérés pour comprendre pourquoi une vente de la banque n’a pu être bouclée. Alors que le contexte macroéconomique invite à la prudence, le récent resserrement des exigences en matière de capital pour les six grandes banques du pays a pu complexifier le dossier.

En juin, le Bureau du surintendant des institutions financières du Canada a augmenté pour la troisième fois en deux ans le niveau de réserves que les grandes banques doivent détenir pour assurer une capitalisation adéquate permettant d’absorber des chocs, une décision reflétant la croissance des vulnérabilités potentielles.

Plus les banques sont tenues de maintenir des réserves élevées, moins elles ont de moyens à leur disposition pour réaliser des acquisitions.

Une vente peu probable

L’analyste Mike Rizvanovic, de la firme Keefe, Bruyette & Woods, parle d’une fin décevante pour le processus de revue stratégique avec peu de clarté sur la façon dont le plan stratégique actuel pourrait évoluer d’ici à ce que la banque présente sa performance de fin d’exercice au début du mois de décembre.

L’action de la Laurentienne a cédé 13 % de sa valeur jeudi pour terminer la journée à 31,40 $ à la Bourse de Toronto.

Le titre valait 33 $ avant l’annonce en juillet qu’un examen des options stratégiques était mené. L’action avait monté jusqu’à 43 $ dans la foulée de cette annonce avant de se replier au fur à mesure que le marché considérait que les chances d’assister à une vente de la banque s’amenuisaient.

« Bien qu’il soit possible qu’une institution financière tente à nouveau d’acheter la Laurentienne éventuellement, la probabilité d’une telle éventualité d’ici 18 à 24 mois est très faible », affirme Darko Mihelic, chez RBC.

Cet expert pense maintenant que la Laurentienne pourrait ne pas être en mesure d’atteindre certains de ses objectifs à moyen terme, notamment celui concernant son ratio d’efficacité. Il doute que la banque soit en mesure de générer une croissance des revenus suffisante par rapport à ses dépenses. Des mesures plus agressives (c’est-à-dire une restructuration) pourraient être nécessaires, selon lui.

Remaniement

La structure organisationnelle de la banque est entre-temps simplifiée. Deux hauts dirigeants quittent l’organisation : Karine Abgrall-Teslyk, qui était responsable des services bancaires aux particuliers, et Yves Denommé, qui était à la tête du secteur et des équipes des opérations de la banque.

Éric Provost, actuellement à la tête des services aux entreprises, ajoute la responsabilité des services bancaires aux particuliers à ses responsabilités, tandis que Sébastien Bélair devient chef des services administratifs, assumant dorénavant la responsabilité des opérations en plus de son rôle actuel de chef des ressources humaines.

Dans les deux cas, il s’agit d’un transfert de responsabilités qui appartenaient à des dirigeants à Toronto vers des cadres à Montréal, ce qui peut être perçu comme une bonne nouvelle pour le Québec.

De la même façon, la décision de ne pas vendre la banque fait en sorte que le Québec garde un siège social même si encore plusieurs dirigeants exercent principalement leurs fonctions à Toronto.

Je ne suis pas certain que se concentrer sur l’efficacité et la simplification pour stimuler la croissance suffira à apaiser le marché.

Joe Ng, de Barclays

La banque entend se concentrer sur les secteurs où elle croit pouvoir réaliser des gains et sur ses produits les plus rentables.

Cela veut dire se concentrer sur des activités où la banque peut se démarquer, comme dans le secteur commercial avec le financement d’inventaires et d’équipement, ce qui est le moteur de croissance de l’organisation.

Une revue du plan stratégique sera présentée en janvier à l’occasion d’une journée pour les investisseurs. Ces derniers voudront notamment savoir comment la direction compte s’y prendre pour produire des résultats permettant de ramener l’action au minimum à sa valeur comptable de 59 $ par action.

La PDG Rania Llewellyn n’était pas disponible pour répondre à nos questions jeudi.

La Banque Laurentienne en bref

  • Siège social : Montréal
  • Année de fondation : 1846
  • Nombre d’employés : 3000
  • Actif au bilan : 50,7 milliards
  • Capitalisation boursière : 1,4 milliard
  • PDG : Rania Llewellyn