Après une restructuration, le détaillant montréalais Reitmans revient sur l’écran radar des investisseurs.

L’action de Reitmans a quadruplé sa valeur depuis l’été et un gestionnaire de portefeuille pense que le titre peut encore doubler, voire tripler, d’ici peu.

« Reitmans sort de la pandémie avec un bilan beaucoup plus sain et des opérations rationalisées », affirme Jesse Gamble, de la firme Gestion d’actifs Donville Kent.

Les confinements ont été un moment décisif pour Reitmans, souligne-t-il dans un rapport d’investissement qu’il vient de rédiger.

Reitmans avait fait appel à la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies en mai 2020 avant d’émerger de ce processus au début de l’année dernière.

« Suite aux fermetures de magasins imposées par le gouvernement, Reitmans a stratégiquement restructuré l’entreprise en fermant plus de 30 % de ses magasins, consolidé ses bannières (de 5 à 3), licencié 1600 employés, et payé 50 cents par dollar pour régler dettes et obligations. »

Jesse Gamble soutient que ce processus a permis de fermer les magasins non rentables de manière moins coûteuse et de renégocier des baux à un moment opportun. « Ils ont économisé 10 % des coûts de location sur leurs sites de premier plan et plus de 60 % sur leurs sites de second plan. »

Aujourd’hui, dit-il, l’entreprise dispose de 68 millions en liquidités, n’a aucune dette, a déclaré un bénéfice net d’environ 60 millions au cours des 12 derniers mois, possède quelque 240 millions de dollars de biens immobiliers à Montréal, alors que la capitalisation boursière s’élève à 200 millions.

Il ajoute que les revenus tirés des ventes en ligne sont en croissance rapide et représentent désormais 25 % du chiffre d’affaires, tout en notant des tendances positives en matière de recherche en ligne, une augmentation du revenu par pied carré et une diminution du coût par pied carré. « La rentabilité est durable », affirme-t-il.

Reitmans est un des rares détaillants ayant une clientèle en croissance, selon Jesse Gamble. « Nous estimons que leur marché cible (femmes matures et tailles fortes) croît de 3,3 % par an. »

En entrevue téléphonique, Jesse Gamble soutient que Donville Kent détient un peu plus d’un million d’actions de Reitmans et que la firme a encore acheté des actions la semaine dernière.

Il s’attend à ce que le titre soit réévalué de façon importante cette année si la direction choisit de verser un dividende, de racheter des actions à des fins d’annulation et décide de monétiser certains actifs immobiliers.

À cet effet, il évalue que le siège social de la rue Sauvé vaut 118 millions et que le centre de distribution du boulevard Henri-Bourassa vaut 123 millions.

Il estime que l’espace de bureaux est sous-utilisé et s’attend à ce que les actionnaires demandent à Reitmans de monétiser des biens immobiliers. Selon lui, la famille Reitman pourrait acheter les édifices et ensuite louer les espaces à l’entreprise.

« Cela permettrait aux investisseurs d’investir uniquement dans les activités de commerce de détail. »

Jesse Gamble souligne que la pandémie a permis à Reitmans d’avoir une position de force pour négocier des baux de location avec d’importants propriétaires immobiliers comme SmartCenter, connu pour être l’un des plus stricts dans l’industrie.

« Au cours des quatre derniers trimestres, Reitmans a payé 10 % de moins par pied carré que les quatre trimestres précédents dans les établissements de SmartCenter. Ça représente environ 15 % de tous les magasins Reitmans. »

Il se montre aussi particulièrement impressionné par le succès remporté par l’enseigne Penningtons. « Ce succès est dû en grande partie à l’absence de concurrence dans un segment de marché où la clientèle potentielle est en croissance. »

Penningtons est l’enseigne que Reitmans prévoit développer en 2023 en ajoutant 10 sites au total, souligne le gestionnaire de portefeuille.

Le titre demeure bon marché, selon Jesse Gamble, principalement en raison de la complexité et de la confusion entourant la procédure de restructuration judiciaire.

Il évalue que le titre vaut 8 $ en analysant uniquement les activités d’exploitation dans le commerce de détail, et 12 $ en tenant compte notamment de rachats d’actions et de la vente d’actifs immobiliers.

L’entreprise familiale est dirigée depuis deux ans par Stephen Reitman, qui a pris le relais après la mort de son frère Jeremy.

Depuis l’abandon des enseignes Thyme Maternité et Addition Elle, la direction – qui a décliné notre demande d’entrevue pour ce reportage – se concentre dorénavant sur la gestion de Penningtons, RW&Co. et Reitmans.

Dans le cadre du processus de restructuration, l’action a été retirée de la Bourse de Toronto à la fin de juillet 2020 et réinscrite à la Bourse de croissance de Toronto quelques semaines plus tard. Le titre de Reitmans a clôturé la séance de lundi à 4,02 $ à la Bourse de croissance.