Mener une entreprise, c’est avant tout une affaire de stratégie. Des dirigeants révèlent quelques éléments de leur plan de match et de leur vision.

Malgré les signaux d’un ralentissement dans le secteur du bâtiment, l’entreprise montréalaise Atwill-Morin maintient ses ambitions de croissance dans le marché de la réparation de maçonnerie et de structure de béton.

« Pour 2023, notre carnet de commandes est aligné sur une croissance des revenus totaux de l’ordre de 30 % à tout près de 200 millions de dollars. C’est un taux de croissance important alors que les conditions économiques sont de plus en plus incertaines », indique Matthew Atwill-Morin, président et chef de la direction de la firme fondée par son grand-père, et reprise des mains de son père en 2004. Ses deux frères, Mark et Jonathan, sont aussi des hauts dirigeants et coactionnaires d’Atwill-Morin.

« À ce rythme, nous projetons d’approcher les 300 millions de chiffre d’affaires d’ici cinq ans », soutient-il lors d’une entrevue avec La Presse, dans la foulée des acquisitions et de la consolidation de filiales réalisées depuis un an.

D’où proviennent ces ambitions de croissance ?

D’abord, de l’Ontario, où Atwill-Morin est implantée depuis quelques années à peine. Rendu à 15 % du chiffre d’affaires, le marché ontarien devrait en représenter 30 % d’ici un an.

Nous sommes en expansion importante de nos parts de marché dans les régions d’Ottawa-Gatineau et de Toronto. En 2023 seulement, nous anticipons de doubler au moins nos revenus dans la région d’Ottawa, et de les augmenter de l’ordre de 25 % dans la région de Toronto.

Matthew Atwill-Morin

« Combinés, les marchés des régions de Toronto et d’Ottawa dans notre secteur d’activité sont tout de même trois fois plus gros que celui de la région de Montréal. Cela dit, ce marché en Ontario est occupé par quelques entreprises beaucoup plus grosses que nous. Mais nous misons sur notre agilité et notre bonne réputation d’affaires pour aller chercher des parts de marché. »

Par ailleurs, en parallèle des gains de clientèle en Ontario, Atwill-Morin a un œil sur « la recherche d’opportunités d’acquisitions qui pourraient se présenter, surtout dans la région de Toronto », indique son président.

Marché en rotation

Entre-temps, Atwill-Morin appuie aussi ses ambitions de croissance sur la bonne tenue de son marché principal dans la grande région de Montréal et ailleurs au Québec.

« Bon an, mal an, nous livrons environ 1200 projets par an, dont l’envergure varie de quelques centaines de milliers de dollars à quelques millions de dollars. Ces temps-ci, notre plus gros contrat est de l’ordre de 50 millions », indique Matthew Atwill-Morin.

Par ailleurs, la vigueur soutenue du marché de la réparation de bâtiments institutionnels et d’infrastructures routières du secteur public permet d’outrepasser le ralentissement dans le marché des bâtiments résidentiels et commerciaux du secteur privé.

« Nous sommes habituellement à 75 % de nos revenus dans le secteur privé et à 25 % dans le secteur public. Mais pour 2023, avec le ralentissement du bâtiment dans le privé, nos principaux contrats en cours et notre carnet de commandes sont déjà réalignés à 60 % dans le secteur privé et à 40 % dans le secteur public. »

Il cite en exemple le chantier de réfection et de renforcement du pont autoroutier de l’Île-aux-Tourtes, sur l’A40 entre l’ouest de l’île de Montréal et Vaudreuil, afin d’en prolonger la durée de vie jusqu’à son remplacement éventuel par un nouveau pont.

Dans le secteur privé, alors que la construction ralentit, le marché des inspections et des réparations de façades d’immeubles de cinq étages et plus (obligatoires tous les cinq ans depuis 2016) demeure vigoureux, de même que celui des inspections et des réparations de structures de stationnements étagés, en souterrain ou en surface.

Par ailleurs, souligne Matthew Atwill-Morin, l’entreprise « travaille fort depuis un an pour développer des occasions d’affaires dans le secteur des bâtiments industriels et des grandes infrastructures comme des barrages hydrauliques, ce qu’[elle a] déjà fait pour Hydro-Québec ».

Main-d’œuvre

Côté main-d’œuvre, le président d’Atwill-Morin soutient que l’entreprise parvient à relever le défi des pénuries de travailleurs signalées dans de nombreux métiers spécialisés du bâtiment.

En 2022, par exemple, l’entreprise a pu recruter près d’une centaine de travailleurs de métiers dans les régions de Toronto et de Montréal.

« Ces embauches représentent près de 10 % de notre effectif total d’un millier d’employés. Dans un contexte de pénurie de travailleurs de métiers en construction, nous sommes plutôt fiers d’avoir réussi à attirer ces dizaines de travailleurs d’expérience », souligne Matthew Atwill-Morin.

Depuis 2008, Atwill-Morin s’est dotée de son propre centre de formation. Les plans de cours ont été élaborés et sont gardés à jour en collaboration étroite avec des instances comme la Commission de la construction et la Régie du bâtiment du Québec, ainsi que les syndicats ou les regroupements de travailleurs des principaux métiers en construction.

« Chaque année, durant la saison hivernale qui est au ralenti dans le bâtiment, notre centre de formation accueille une cinquantaine de nouveaux employés ou déjà en poste. Un tel effort en formation demeure peu commun parmi les employeurs en construction. Mais de notre point de vue chez Atwill-Morin, il s’agit d’un élément très important de notre culture d’entreprise », indique son président.

Forces

  • Expertise établie en projets complexes de réfection de maçonnerie et béton sur des bâtiments et des ouvrages d’infrastructure
  • Bonne réputation basée sur la satisfaction des clients
  • Culture d’entreprise inspirée par des hauts dirigeants de troisième génération

Faiblesses

  • Améliorer le processus d’intégration des nouveaux employés provenant de fusions ou d’acquisitions
  • Rehausser l’informatisation de certaines tâches transactionnelles avec les fournisseurs et les sous-traitants
  • Rehausser l’informatisation de certaines tâches de documentation et de facturation auprès des clients de projets complexes