Des actionnaires de Xebec Adsorption estiment avoir été induits en erreur par le fournisseur de solutions aux producteurs d’énergies avant qu’il ne se place à l’abri de ses créanciers. Pour éviter de se retrouver les mains vides, ils demandent à être impliqués dans le processus judiciaire en cours.

L’actionnaire derrière cette démarche est Simon Arnsby, qui se présente comme un porteur de titre « important » de l’entreprise québécoise depuis 2012. Dans une lettre envoyée mercredi au juge Christian Immer, de la Cour supérieure du Québec, l’investisseur adresse plusieurs reproches à Xebec.

Il demande la mise sur pied d’un comité pour représenter les petits actionnaires. À son avis, ces derniers ne sont actuellement « pas représentés » et « n’ont pas les moyens de participer » à la procédure en cours ou de la « comprendre ».

Les actionnaires n’ont absolument pas été avertis que Xebec risquait de déposer son bilan, ce qui leur aurait permis d’évaluer le risque pour [leur investissement] et d’avoir le temps de se préparer à cette éventualité.

Simon Arnsby, dans une lettre au juge Christian Immer

Celui-ci affirme que ce scénario n’a pas été évoqué dans les informations diffusées par l’entreprise ou les déclarations publiques de ses dirigeants.

Établie à Montréal, Xebec s’est tournée vers la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies (LACC) le 29 septembre dernier. Le processus pourrait mener à la vente des actifs, ce qui permettrait aux créanciers garantis de récupérer leur mise en totalité ou en partie. Les actionnaires ne font pas partie de ce groupe.

Au 31 août dernier, le passif de l’entreprise s’élevait à 282 millions, comparativement à 503 millions pour ses actifs.

« Il y a une probabilité raisonnablement élevée de générer de la valeur pour les actionnaires », écrit M. Arnsby, qui exprime le souhait de voir le juge approuver un plan de rétention d’employés clés ainsi que de sommes pour garantir leur rémunération.

De cette façon, les actionnaires seront mieux représentés, dit-il.

Pas d’avertissement

Fondée en 1967, Xebec se spécialise dans des technologies de capture du carbone ainsi que de production d’hydrogène, de gaz naturel renouvelable, d’oxygène et d’azote. Elle emploie près de 600 personnes mondialement, dont 157 au Québec, et exploite une usine à Blainville.

En 2021, ses revenus annuels s’élevaient à 126 millions.

Rendu public le 10 août dernier, le rapport financier du deuxième trimestre de Xebec contenait quelques mauvaises nouvelles, sans toutefois évoquer de scénarios dramatiques.

« Ce dépôt [en vertu de la LACC] s’est effectué dans un contexte d’augmentation considérable des revenus et de croissance rapide du carnet de commandes », avance l’actionnaire mécontent.

Si le chiffre d’affaires de Xebec était en croissance, l’entreprise avait néanmoins annoncé une réduction d’environ 13 % de son effectif nord-américain en juillet dernier.

De 2019 à 2021, l’entreprise a réalisé pas moins de 20 transactions, ce qui a permis d’asseoir sa croissance. L’intégration de ces acquisitions a pesé sur ses résultats financiers.

Le Fonds de solidarité FTQ (15 millions), la Banque Nationale (7 millions) et Exportation et développement Canada (15 millions US) figurent parmi les principaux créanciers de la société. La Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ) était le principal actionnaire de Xebec (7,05 %) après y avoir injecté 50 millions en 2020.

Trop de proximité ?

Dans sa missive, M. Arnsby remet également en question certaines décisions récentes de Xebec en alléguant des conflits d’intérêts. Il souligne que l’entreprise est représentée par Osler, Hoskin & Harcourt LLP alors que Brian Levitt, un des administrateurs de Xebec, a déjà été coprésident de ce cabinet d’avocats.

Un autre membre du conseil d’administration, Peter Bowie, a déjà été à la tête de Deloitte Chine et des activités canadiennes du cabinet comptable. Or, le contrôleur au dossier est Deloitte, écrit M. Arnsby. Finalement, la Banque Nationale est chargée du processus de sollicitation d’investissement et de vente même si elle apparaît sur la liste des créanciers de Xebec.

Invitée à commenter les observations de M. Arnsby, Xebec n’avait pas répondu aux questions de La Presse, mercredi après-midi.

En savoir plus
  • - 80 %
    À la Bourse de Toronto, l’action de Xebec avait abandonné environ 80 % de sa valeur depuis le début de l’année. Elle valait 51 cents quand l’entreprise s’est tournée vers la LACC.
    Source : groupe tmx