(Montréal) Québec et Ottawa doivent changer leurs critères d’appels d’offres en matière de transport afin de prioriser l’achat local et mettre fin à la règle du plus bas soumissionnaire, plaide Marc Bédard, président et fondateur de Lion Électrique.

Le dirigeant du constructeur d’autobus et de camions électriques a exprimé ce souhait lors d’un discours organisé par le Cercle canadien de Montréal, lundi. Il souligne que de nombreux pays ont adopté des critères favorisant l’assemblage local.

Il donne en exemple le « Buy American Act » qui contraint l’entreprise de Saint-Jérôme à assembler les véhicules commandés aux États-Unis dans son usine de l’Illinois. Cette usine devrait entrer en fonction dans la deuxième moitié de l’année 2022.

« Au Canada, aucune règle de ce type n’existe présentement. On est vraiment désavantagé », déplore-t-il.

« Encore pire, la règle du plus bas soumissionnaire est encore présente dans plusieurs offres de services, poursuit le dirigeant. Cette règle doit être complètement revue. C’est un “tue-innovation” et ça encourage la production dans les pays qui n’ont pas les mêmes critères sociaux et environnementaux qu’au Canada. »

Enlever la règle du plus bas soumissionnaire ne voudrait pas dire que les gouvernements accepteraient n’importe quel prix, assure M. Bédard en point de presse en marge de son discours. « C’est quand même possible de le faire intelligemment. »

Il donne l’exemple de la Californie qui évalue la qualification de ses soumissionnaires en leur attribuant une note, selon différents critères. Le prix devient un enjeu uniquement après cet appel de qualification. « Ce n’est pas un chèque en blanc ! »

Prioriser l’achat local amènerait d’importantes retombées économiques locales, selon lui. « On sait que chaque emploi dans le secteur manufacturier crée entre sept à 10 emplois indirects. Ce n’est pas rien. »

Pas encore de cellules locales

Il reste encore du chemin à faire pour produire localement les cellules qui composent les batteries électriques, répond M. Bédard après la conférence. « À chaque fois qu’on parle aux gens du gouvernement du Québec ou du Canada, on leur pose la même question. Est-ce que ça s’en vient parce qu’on aimerait ça acheté des cellules québécoises ou canadiennes ? Aucun doute qu’on aimerait ça. Aujourd’hui, ça n’existe pas. »

Il note que les appels d’offres aux États-Unis comporteront des exigences en matière de cellules américaines. « Ils commencent à le faire. C’est en ayant une vision que ça va pouvoir exister d’ici quelques années. »

Le Canada perd au change quand les minerais extraits pour produire les cellules sont exportés en Asie pour y être transformés et revenir en Amérique du Nord. « C’est le pire de tous les mondes. »

Cette production n’est pas très rentable tandis que le Canada pourrait obtenir une meilleure valeur ajoutée en étant présent dans toutes les étapes de la production, de la mine jusqu’au recyclage des batteries, explique M. Bédard.

L’entrepreneur a toutefois de bons mots pour le gouvernement du Québec, qui veut développer cette filière. « Quand on se promène dans le monde, il y a beaucoup de gens qui veulent faire ce que le Québec essaie de faire. »

Au lendemain des élections municipales, le dirigeant s’est également dit heureux de voir plusieurs « jeunes » candidats « verts » remporter leur pari. Il s’agit d’une bonne nouvelle pour une entreprise qui mise sur l’électrification des transports.

Il ne les a pas nommés, mais Valérie Plante à Montréal, Catherine Fournier à Longueuil, Stéphane Boyer à Laval et Évelyne Beaudin à Sherbrooke font partie de cette vague. « Les élections d’hier, c’est une excellente nouvelle. C’est comme plus jeune. Les mairesses et les maires sont verts. »