Chaque samedi, un de nos journalistes répond, en compagnie d’experts, à l’une de vos questions sur l’économie, les finances, les marchés, etc.

J’ai 40 ans. Je n’ai jamais connu de récession en tant que chef de famille. Pas même en tant qu’adulte — sauf peut-être pour la courte frousse de 2008 ! Je perçois la récession comme un gros nuage noir qui plane au-dessus de nos têtes. La réalité est que j’ignore complètement ce que ça englobe. À quoi peut-on s’attendre en matière de durée ? Comment se prépare-t-on à une récession ?

Annie, Rigaud

On parle beaucoup d’une récession probable au Canada pour l’année prochaine. Cette semaine, la ministre fédérale des Finances, Chrystia Freeland, sans prononcer le mot commençant par un R, nous a prévenus que les mois à venir allaient être exigeants pour les Canadiens.

Mais exigeants à quel point ?

Cela est très variable d’une personne à l’autre, selon nos situations, explique Stephen Gordon, directeur du département d’économique de l’Université Laval.

Une bonne partie de la population traversera la récession, s’il devait y en avoir une, avec assez d’aisance, explique-t-il. D’autant que le vent inflationniste nous prépare déjà à la tempête.

Pour mieux comprendre, rappelons simplement qu’une récession est un recul de l’économie, techniquement durant deux trimestres consécutifs. Plusieurs signaux mesurent ce ralentissement, dont une hausse du taux de chômage.

Qui dit perte d’emplois dit diminution de la consommation. Si on achète moins, l’activité économique tourne inévitablement au ralenti et la rentabilité de certaines entreprises sera réduite, voire compromise.

Cette morosité dure typiquement de 12 à 18 mois, explique Stephen Gordon, bien qu’au début des années 1980, on ait traversé une récession plus longue.

« Une récession n’est pas agréable », avertit tout de même le professeur de l’Université Laval qui précise néanmoins que les ralentissements ne sont pas que négatifs, particulièrement dans un marché de l’emploi déséquilibré comme c’est le cas actuellement.

Normalement, une récession est marquée par une augmentation du chômage. Actuellement, on est dans une situation de pénurie de main-d’œuvre. Alors pour l’instant, on parle de réduire les postes vacants.

Stephen Gordon, directeur du département d’économique de l’Université Laval

Si les employeurs affichent moins de postes, inévitablement ceux et celles qui sont au chômage auront plus de difficulté à retrouver du boulot. La prudence est donc de mise pour tous, dès maintenant, quant à la gestion de nos finances personnelles.

Mieux vaut bien évaluer ses moyens avant de se lancer dans un projet dispendieux, réno ou voyage, durant une récession.

Une telle période est aussi critique pour les jeunes qui veulent accéder au marché du travail.

« C’est vraiment difficile pendant une récession pour quelqu’un qui veut trouver son premier emploi », explique Stephen Gordon, qui précise que de commencer sa vie professionnelle avec de moins bonnes conditions laisse des traces longtemps après ce départ.

Pour l’ensemble de la population, toutefois, la tempête aura moins d’impact, voire peu, malgré la hausse des taux d’intérêt et des prix, explique Stephen Gordon.

« Oui, dit-il, s’il faut renouveler son hypothèque, c’est problématique. »

En fait, cette pression sur nos finances personnelles est déjà bien amorcée, avec l’inflation qui réduit pour beaucoup de gens le budget discrétionnaire et oblige à revoir les dépenses compressibles, comme la nourriture.

Cela a mené plusieurs personnes à revoir le budget et à évaluer où va l’argent, maintenant, avec les nouveaux prix des aliments et des loyers.

Si ça n’est pas déjà fait, c’est à mettre en haut de sa liste des priorités.

Les spécialistes en finances personnelles conseillent également à ceux qui ont des dettes de se faire un plan de remboursement réaliste ou de revoir celui en cours, avec cette nouvelle donne. On commence par les paiements qui ont des taux d’intérêt très élevés.

Les économies faites là permettront peut-être d’épargner pour créer ou bonifier un fonds d’urgence.

À deux mois de Noël, c’est peut-être le temps de réduire certains pôles de dépenses : pourquoi ne pas essayer ces applications antigaspillage qui permettent de vraiment économiser sur le panier d’épicerie, si cela convient à votre mode de vie ?

Pourquoi ne pas opter pour des sorties gratuites durant quelques mois ? Il y en a beaucoup avant les Fêtes, partout au Québec.