Les travaux préparatoires effectués par Northvolt sur la Rive-Sud de Montréal sont visés par une demande d’injonction. Le Centre québécois du droit de l’environnement (CQDE) veut faire « suspendre et cesser immédiatement » l’activité sur le terrain qui doit accueillir une méga-usine de cellules de batteries.

Dans une demande déposée jeudi auprès de la Cour supérieure du Québec, les demanderesses plaident l’urgence d’agir pour éviter un « préjudice sérieux à l’environnement » alors que la machinerie lourde a déjà commencé à s’activer sur le site qui chevauche Saint-Basile-le-Grand et McMasterville.

« Les milieux humides dans le bassin de la rivière Richelieu, en particulier, sont si rares qu’ils ne parviennent pas à remplir leurs fonctions écologiques essentielles », plaident les avocats du CQDE, dans le document de 31 pages.

En principe, la demande devrait être entendue ce vendredi, au palais de justice de Montréal.

Travaux préparatoires

Après avoir obtenu une autorisation du ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs (MELCCFP) la semaine dernière, la jeune pousse suédoise a donné le coup d’envoi aux travaux préparatoires de son complexe au début de cette semaine.

Le chantier affectera notamment 13 hectares de milieux humides. Le terrain de 170 hectares abrite également une zone de nidification du petit blongios, un oiseau considéré comme une espèce vulnérable dont la présence a été détectée à trois reprises depuis 2016.

Des batraciens communs ont aussi été observés, ainsi que la tortue molle à épine.

« En ce moment, le CQDE demande une injonction pour suspendre les travaux le temps que l’on puisse déterminer si l’autorisation [ministérielle] est valide, affirme son avocat Marc Bishai, dans un entretien téléphonique. En ce moment, l’autorisation semble avoir été délivrée de manière incohérente. »

« Deux poids, deux mesures »

Pas plus tard qu’en mars dernier, Québec avait bloqué un projet immobilier sur le terrain où s’installera Northvolt en évoquant des préoccupations pour la biodiversité sur le site. Il semble y avoir « deux poids, deux mesures », affirme le Conseil. L’ex-propriétaire de l’endroit, Quartier MC2 – un consortium dans lequel on retrouve l’homme d’affaires Luc Poirier – souhaitait construire plus de 2400 habitations près de la gare de train de banlieue de McMasterville.

« Nous prenons connaissance de la demande et vous reviendrons », a répondu Northvolt, jeudi après-midi, dans une déclaration.

Les travaux préparatoires prévoient notamment l’abattage d’environ 14 000 arbres vivants et morts. On doit aussi effectuer du nivellement de terrain, des travaux de déboisement – sur plusieurs hectares –, d’excavation et de remblaiement. Il ne s’agit pas, pour l’instant, de la construction des bâtiments du complexe, pour laquelle d’autres autorisations seront nécessaires.

Appuyé par trois citoyennes, le CQDE affirme que le cas de Northvolt témoigne de l’importance de se munir d’un registre public environnemental, prévu par la loi depuis 2018. Ce registre permettrait au public d’avoir accès aux renseignements du projet et à ses conditions.

Cet accès à l’information est d’autant plus important, selon l’organisme, que la construction de l’usine de Northvolt n’a pas été assujettie « à la procédure d’examen et d’évaluation des impacts sur l’environnement, incluant des audiences publiques devant le Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) ».

Northvolt devra compenser la perte de milieux naturels pour la biodiversité que ses premiers travaux occasionneront en restaurant, créant ou conservant de 30 à 50 hectares de milieux naturels contigus, le plus près possible de son site.

Québec lui accorde un délai de 36 mois pour déposer et faire approuver un plan, puis un autre délai de 36 mois pour le mettre en œuvre, soit six ans au total.

Le complexe de Northvolt est estimé à 7 milliards. Ottawa et Québec financent sa construction à hauteur de 2,75 milliards. Les deux ordres de gouvernement ont aussi promis jusqu’à 4,6 milliards en subventions à la production.

Avec La Presse Canadienne