En attendant de savoir si elle pourra continuer d’abattre des arbres et d’empiéter sur des milieux humides, Northvolt met sur pause les travaux préparatoires sur le site qui doit accueillir sa future usine de cellules de batteries sur la Rive-Sud. L’arrêt est en vigueur jusqu’à mardi prochain, sauf si les tribunaux en décident autrement.

Vendredi, l’audience de la Cour supérieure du Québec qui devait se pencher sur la demande d’injonction déposée la veille par le Centre québécois du droit de l’environnement (CQDE) a été repoussée à la semaine prochaine, à la demande des avocats de l’entreprise suédoise et du gouvernement du Québec. Ces derniers déploraient de ne pas avoir eu suffisamment de temps pour prendre connaissance du volume « assez grand » de pièces déposées par l’organisme.

« Ma cliente a droit à une défense pleine et entière, c’est impossible avec ce délai », a affirmé MNathalie-Anne Béliveau, du cabinet Fasken, qui représente Northvolt. « Si l’injonction provisoire est accordée, notre cliente va subir des préjudices irréparables. »

Une injonction provisoire se traduirait par un arrêt des activités pendant 10 jours.

Le CQDE demande la « suspension immédiate » des travaux, qui se sont amorcés en début de semaine sur l’immense terrain de 170 hectares qui chevauche les municipalités de Saint-Basile-le-Grand et de McMasterville.

L’organisme affirme qu’une injonction est nécessaire pour déterminer si l’autorisation gouvernementale permettant à Northvolt d’aller de l’avant avec des travaux préparatoires a été accordée dans les règles de l’art. Le CQDE en doute.

« On veut s’assurer de faire la lumière sur le dossier, a affirmé son avocat, MMarc Bishai, à sa sortie du tribunal. Il n’y a pas eu, jusqu’à maintenant, de participation significative du public. Nous allons recevoir beaucoup de documents. Des déclarations sous serment du procureur général, du gouvernement et de l’entreprise. »

Des milieux sensibles

En Montérégie, la première phase des travaux prévoit l’abattage d’environ 14 000 arbres vivants et morts. Le chantier affectera notamment 13 hectares de milieux humides. Le site abrite une zone de nidification du petit blongios, un oiseau considéré comme une espèce vulnérable dont la présence a été détectée à trois reprises depuis 2016. Des batraciens communs ont aussi été observés, ainsi que la tortue molle à épine.

Northvolt a obtenu son autorisation ministérielle même si Québec avait bloqué un projet immobilier au même endroit en mars dernier. Il s’agit d’un exemple de « deux poids, deux mesures », affirme le CQDE.

Devant le juge David R. Collier, l’entreprise a accepté de cesser l’abattage d’arbres dans les milieux humides ainsi que dans un rayon de 500 mètres « autour des milieux humides » jusqu’à mardi, 15 h. Elle aurait en principe pu effectuer d’autres travaux. Dans une déclaration envoyée par courriel, Northvolt a précisé que tout serait à l’arrêt.

« Nous avons pris la décision d’arrêter tous les travaux sur le site, par respect pour le processus judiciaire, souligne-t-elle. Ceux-ci sont suspendus jusqu’à mardi. Nous avons démontré que nos projets respectent les normes parmi les plus élevées au monde et nous entendons continuer de nous soumettre aux réglementations environnementales en vigueur. »

L’immense terrain qui doit accueillir le complexe de 7 milliards de Northvolt abritait autrefois l’usine d’explosifs de la Canadian Industries Limited (CIL). À l’exception de la portion qui concernera le recyclage de batteries, le projet échappera aux procédures du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE).

En échange de son autorisation ministérielle pour abattre des arbres et empiéter sur des milieux humides, Northvolt devra restaurer, créer ou conserver de 30 à 50 hectares de milieux naturels contigus le plus près possible de son usine.

Québec lui accorde un délai de 36 mois pour déposer et faire approuver un plan, puis un autre délai de 36 mois pour le mettre en œuvre, soit six ans au total.

En savoir plus
  • 2,75 milliards
    Sommes offertes par Québec et Ottawa pour financer la construction de l’usine québécoise de Northvolt
    Source : la presse
  • 4,6 milliards
    Somme maximale des subventions à la production offerte à l’entreprise par les deux ordres de gouvernement
    Source : la presse