L’un des plus hauts dirigeants d’Investissement Québec vient de se faire montrer la porte pour avoir « enfreint une règle de gouvernance ».

La société d’État refuse de fournir plus de détails pour expliquer le congédiement de Jocelyn Beauchesne, qui était premier vice-président au réseau régional. D’aucuns le considéraient comme le numéro trois chez Investissement Québec (IQ), après le PDG Guy LeBlanc et la première vice-présidente exécutive aux placements privés, Bicha Ngo.

Les responsables des communications du bras financier de l’État n’ont pas répondu au téléphone.

Dans un courriel à La Presse signé par la vice-présidente aux affaires publiques Gladys Caron, Investissement Québec indique que Jocelyn Beauchesne aurait « enfreint une règle de gouvernance ».

« En notre qualité de société d’État, la direction a considéré qu’il ne pouvait plus occuper ses fonctions. Toutefois, il n’a tiré aucun avantage pour lui-même, n’a eu aucun comportement inapproprié ou fait de harcèlement à l’égard d’un individu et il n’y a eu aucune conséquence pour les clients. »

« Aucune indemnité de départ »

Le message précise que Jocelyn Beauchesne ne recevra « aucune indemnité de départ ». « Nous ne donnerons pas de détails additionnels sur la situation. »

À l’interne, les employés sont d’autant plus surpris que Jocelyn Beauchesne était l’homme de confiance de Guy LeBlanc. Il était à la tête du réseau de centaines d’employés déployés dans toutes les régions pour appuyer les entreprises. Il supervisait aussi la vice-présidence à l’innovation, dont relève le Centre de recherches industrielles du Québec, qui vise à améliorer les procédés manufacturiers.

Les employés ont appris la nouvelle de son départ dans un courriel laconique du grand patron mercredi.

« C’est avec regret que je vous annonce le départ de Jocelyn Beauchesne après plus de six ans chez Investissement Québec, écrit Guy LeBlanc dans le message, que La Presse a obtenu. Son parcours au sein d’IQ a été rempli de défis. Jocelyn a été au cœur de la transformation du Réseau régional et plus récemment, il a accueilli la vice-présidence, Innovation dans sa grande équipe. »

Joint au téléphone, Jocelyn Beauchesne n’a pas voulu expliquer les raisons de son congédiement. « Dans les circonstances actuelles, je ne peux pas commenter plus que ce qui a été annoncé », a-t-il dit.

Un autre départ à la gestion du risque

Jeudi, le PDG Guy LeBlanc a également annoncé le départ d’un autre dirigeant relevant directement de lui : David Stréliski, qui était directeur principal de la gestion du risque et de la gouvernance financière.

PHOTO TIRÉE DE LINKEDIN

David Stréliski, ex-directeur principal de la gestion du risque et de la gouvernance financière chez Investissement Québec

« Après quelque dix mois au sein de l’organisation, nous nous sommes entendus mutuellement pour une fin d’emploi, puisque le profil de M. Stréliski et les besoins du poste se sont avérés ne pas être suffisamment alignés, selon le courriel en provenance de Gladys Caron. Une indemnité de départ lui a été offerte, selon les barèmes normalement appliqués pour ce type de poste. »

Contacté par La Presse, cet ancien du cabinet d’audit comptable EY et d’Élections Canada évoque « un manque de fit avec des membres du conseil d’administration », sans plus de détails.

L’ex-directeur de la gestion intégrée des risques Alexandre Bercovy prend sa place par intérim.

« Comme si le feu était pris »

Les deux cadres sont les derniers d’une série de hauts dirigeants d’Investissement Québec ayant quitté l’organisation depuis avril 2022. En fait, trois des sept premiers vice-présidents qui figurent dans le dernier rapport annuel sont partis : Christian Settano (finances et risques de crédit), Sylvie Pinsonnault (stratégies et innovation), puis Jocelyn Beauchesne.

En avril 2022, Alexandre Sieber, ex-premier vice-président au financement corporatif, avait déjà quitté le bateau, encaissant une indemnité de départ de 379 080 $, selon le rapport annuel.

En février 2023, le vice-président à la gestion des risques Yves Bourque s’est aussi séparé de l’organisation.

Après son départ d’Investissement Québec, Christian Settano a rejoint les rangs de la Banque de développement du Canada à titre de chef de la direction financière, en septembre dernier.

« C’est comme si le feu était pris, déplore un employé qui demande l’anonymat parce qu’il n’a pas l’autorisation de parler et qu’il veut protéger son emploi. Il n’y a plus du tout de relève. »

À force d’encaisser le départ de dirigeants expérimentés l’un après l’autre, il croit que l’organisation a perdu « tous ses pare-feu » face au ministre de l’Économie, responsable de la société d’État.

Contacté à ce sujet, le cabinet de Pierre Fitzgibbon affirme qu’« à titre de directeur du réseau régional, M. Beauchesne n’a pas eu à travailler [sur des] dossiers qui l’ont amené à rencontrer le ministre ».

« Le ministre a totalement confiance en l’organisation, ajoute son directeur des communications, Mathieu St-Amand, dans un courriel. L’équipe de direction d’Investissement Québec est solide. »

En savoir plus
  • 428 304 $
    Rémunération globale annuelle de Jocelyn Beauchesne selon son contrat avec Investissement Québec, incluant une prime incitative de 25 % et une allocation pour voiture de 19 000 $
    source : investissement Québec