Le Centre Bell continue à échapper au sort de la quasi-totalité des immeubles montréalais et verra son compte de taxes baisser pour la cinquième année consécutive l’an prochain.

L’évaluation municipale du domicile du Canadien de Montréal a diminué d’environ 40 % depuis 2011, entraînant dans sa chute la facture à acquitter.

Selon la Ville de Montréal, le Centre Bell vaut actuellement 150 millions, alors qu’il était évalué à 256 millions en 2011. Parallèlement, ses taxes foncières ont fondu et sont passées de 10,8 millions à 5,3 millions sur la même période.

L’immeuble a été construit en 1996 pour 265 millions, incluant le terrain. En 2015, une cure de rajeunissement de 100 millions avait été annoncée par la famille Molson.

Le Groupe CH, propriétaire du Centre Bell, n’a pas rappelé La Presse.

« Les évaluations sont faites par l’évaluateur de la Ville et elles sont faites en toute indépendance, avec une méthode qui est objective et qui est reconnue », a commenté le président du comité exécutif de la mairesse Valérie Plante, Luc Rabouin, à la dernière séance du conseil municipal. Il répondait à une question d’un citoyen qui s’indignait de cette facture en baisse.

Il a souligné que le rôle foncier 2023-2025 fait référence à la valeur des immeubles en date du 1er juillet 2021. « Vous vous souvenez dans quel genre de contexte on était ? », a ajouté l’élu. « Les immeubles à vocation commerciale au centre-ville, plusieurs ont eu une croissance beaucoup plus limitée que les immeubles à vocation résidentielle et il y a même eu des baisses […] à cause de la pandémie. C’est ça qui explique la baisse de la valeur d’un immeuble comme le Centre Bell. »

Évaluation contestée

Un autre facteur pourrait toutefois contribuer à expliquer cette évaluation foncière en baisse importante.

Il y a 15 ans, le Centre Bell a contesté son évaluation municipale. Dans une décision, le Tribunal administratif a conclu que le Centre Bell valait 139 millions pour le rôle 2004-2006 et 172 millions pour le rôle 2007-2010 (la Ville voulait 230 millions et le Groupe CH, 65 millions).

Il existe trois méthodes pour faire l’évaluation foncière d’un immeuble : le coût, le revenu et la comparaison. La méthode du coût se base sur la valeur de reconstruction de l’immeuble (moins les dépréciations) ; la méthode du revenu, sur l’anticipation des revenus générés ; et la méthode de comparaison, sur l’analyse de la valeur foncière des bâtiments semblables.

Dans le cas du Centre Bell, le tribunal a privilégié la méthode du revenu. Même si la décision ne vaut que pour les années 2004 à 2010, la Ville a décidé de continuer d’en appliquer les principes.

« J’aimerais bien mieux que ça vaille plus cher »

Alors que le Centre Bell perd chaque année en valeur, d’autres grandes salles de spectacles de Montréal sont sur la trajectoire inverse. Malgré la pandémie, les évaluateurs de la Ville de Montréal ont estimé que la Place des Arts valait 20 % de plus en 2021 (283 millions) qu’en 2018 (236 millions). La valeur du Théâtre St-Denis a crû au même rythme, passant de 7,1 millions à 8,5 millions. Croissance à peine moins soutenue pour le MTelus (ancien Metropolis), dont la valeur est passée de 4,4 millions à 5,2 millions.

Le stade Saputo, domicile du CF Montréal, a suivi le chemin inverse, passant de 25 millions à 23,1 millions.

La valeur de l’ensemble du parc immobilier de l’île de Montréal a augmenté de 32,4 % entre 2018 et 2021, tous types de propriétés confondus.

Le Centre Bell, « j’aimerais bien mieux que ça vaille plus cher », avait affirmé l’actuel responsable des finances de l’administration Plante, Benoit Dorais, en 2019, à QUB Radio. « Si ça vaut plus cher, c’est sûr et certain qu’il y a moyen d’aller chercher un peu plus d’argent par rapport à la moyenne. »

« Ce n’est pas les élus qui font le choix de l’évaluation foncière, on n’a même aucun droit de regard. […] L’évaluateur en chef, c’est lui qui a le pouvoir selon la loi », avait-il précisé.

Avec Valérie Plante, M. Dorais a annoncé le 15 novembre dernier une hausse de taxes foncières de 4,9 % pour le secteur résidentiel et de 4,6 % pour le secteur non résidentiel. Cette hausse représente toutefois la hausse moyenne des factures envoyées par la Ville, incluant l’augmentation des valeurs foncières. En fait, la Ville de Montréal diminue presque chaque année son taux de taxation pour chaque tranche de 100 $ d’évaluation.