(Toronto) L’organisme national de réglementation des télécommunications du Canada permettra à des concurrents indépendants de vendre des services internet sur les réseaux de fibre optique des grandes compagnies de téléphone en Ontario et au Québec, a-t-il indiqué lundi.

Le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) a annoncé cette décision lundi, à l’occasion du Sommet canadien des télécommunications à Toronto, dans le cadre d’un examen en cours de l’accès des tiers aux réseaux de fibre optique visant à stimuler la concurrence et à faire baisser les prix pour les clients.

Il s’agit d’une décision partielle, avec d’autres audiences à venir, dans le cadre d’un examen lancé par le CRTC en mars sur les tarifs que les petits concurrents paient aux grandes entreprises de télécommunications pour l’accès à leurs réseaux. À l’époque, la commission avait également annoncé qu’elle réduirait de 10 % certains tarifs de gros de l’internet.

L’examen, qui s’est penché sur plus de 300 interventions, comprenait une enquête accélérée pour savoir si les grands opérateurs devraient fournir aux petits concurrents un accès à leurs réseaux de fibre optique jusqu’au domicile.

Le CRTC affirme que son examen a révélé un déclin significatif de la concurrence en Ontario et au Québec, où les fournisseurs d’accès internet indépendants desservent actuellement 47 % moins de clients qu’ils ne le faisaient il y a deux ans.

« Entre-temps, plusieurs concurrents ont été rachetés par de plus grands fournisseurs d’accès internet. Cela donne moins d’options à de nombreux Canadiens en matière de services internet haute vitesse », a estimé la présidente du CRTC, Vicky Eatrides, dans un discours aux participants de la conférence, lundi.

« Le CRTC agit rapidement pour aider à stabiliser le marché. »

La décision oblige les grandes compagnies de téléphone, à savoir BCE et Telus, à fournir à leurs concurrents un accès à leurs réseaux de fibre optique jusqu’au domicile dans un délai de six mois. Ce délai permettra aux entreprises de préparer leurs réseaux et de développer les technologies de l’information et les systèmes de facturation.

Le CRTC indique qu’il fixe également des tarifs provisoires que les petits concurrents paieront pour accéder aux réseaux de fibre optique, ce qui soutiendra à la fois la concurrence et la poursuite des investissements dans des réseaux de haute qualité.

Le régulateur souligne que la décision de lundi vise à stabiliser le marché dans les domaines où elle aura un impact significatif sur le choix et l’abordabilité pour les consommateurs, conformément à la directive du ministre de l’Industrie, François-Philippe Champagne. Ce dernier a demandé au CRTC, plus tôt cette année, de renforcer les droits des consommateurs.

Cette décision a reçu des éloges prudents de la part du groupe Opérateurs des réseaux concurrentiels canadiens (ORCC), qui a qualifié la décision de « étape importante et essentielle vers un paysage concurrentiel plus équitable ».

Mais l’organisation, qui représente les fournisseurs d’accès internet indépendants, a ajouté que son « optimisme [était] tempéré », notant que la décision « ne met en œuvre qu’un régime régional provisoire pour deux grandes compagnies de téléphone, et que les tarifs sont toujours provisoires ».

« Un cadre national permanent applicable à tous les transporteurs dominants avec des tarifs justes et raisonnables est nécessaire pour permettre une véritable concurrence qui n’a pas encore été établie », a fait valoir le président d’ORCC, Paul Andersen.

Dans un communiqué, la porte-parole de Telus, Kalene DeBaeremaeker, a affirmé que la société examinait la décision provisoire « et [attend] avec impatience de participer au reste de la procédure du CRTC ».

Bell Canada n’a pas immédiatement répondu à une demande de commentaires.

La semaine dernière, le chef de la direction de Bell, Mirko Bibic, a prévenu que si la décision du régulateur dans le cadre de l’examen favorisait la position des petits acteurs par rapport aux grandes entreprises, elle inciterait Bell à ralentir ses projets de construction de fibre optique.

« C’est aussi simple que cela », a affirmé M. Bibic aux analystes lors d’une conférence pour discuter de ses résultats financiers du troisième trimestre.

« Ce serait regrettable, car lorsque nous pénétrons dans une communauté dotée de la fibre optique, nous augmentons en fait la concurrence […] Le client obtient un meilleur service, une meilleure valeur, des prix plus bas et c’est ce qui est en jeu ici dans le débat que nous avons généralement en ce qui a trait à la procédure réglementaire. »

Le CRTC a précisé que son examen plus large était toujours en cours, et que la prochaine audience publique était prévue pour le 12 février.

Aucune décision n’a encore été prise quant à savoir si une décision similaire affecterait les services internet dans d’autres provinces.