Les lundis après-midi, des réfugiés se rendent sur le toit du Palais des congrès pour jardiner et récolter des légumes qu’ils rapporteront à la maison, avec quelques conseils pour les apprêter. Nous les avons accompagnés, entre les tournesols et les vignes.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

Lundi dernier, de jeunes réfugiés comme Maxwell, 14 ans, originaire du Cameroun, faisaient la corvée de jardinage sous le soleil, dans une ambiance joyeuse. Le directeur scientifique du Laboratoire sur l’agriculture urbaine, Éric Duchemin, supervise les récoltes. Il y a 3500 mètres carrés utilisés pour l’agriculture sur le toit du Palais des congrès, sur une possibilité de 30 000 mètres carrés.

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« Le jardinage est très présent dans les communautés immigrantes », dit Sylvie Guyon, coordonnatrice concertation et partenariat au Centre social d’aide aux immigrants, qui participe au projet des récoltes sur le toit du Palais des congrès. Les légumes servent souvent de lien vers la terre d’accueil, dit-elle, et favorisent les contacts entre jardiniers, ce qui est excellent pour briser l’isolement.

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Parfois, explique Sylvie Guyon, des participants à l’atelier de jardinage reconnaissent des légumes qui leur rappellent leur terre natale. Ç’a été le cas un lundi du début du mois d’août, alors que des Ukrainiennes ont reconnu des groseilles à maquereau qu’elles cuisinaient à la maison. Et ç’a créé un moment d’émotion, relate Sylvie Guyon. Les réfugiés qui participent à l’activité sont à Montréal depuis quelques années, quelques mois ou quelques jours, comme c’était le cas d’un jeune Syrien arrivé au Canada trois jours avant de se retrouver à jardiner sur le toit du Palais des congrès, lundi dernier.

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Arrivé au Canada il y a un peu plus de deux ans, Mahmoud s’est d’abord installé à Toronto, comme on le lui avait indiqué, mais a choisi Montréal. Lundi, son activité de jardinage allait lui donner les légumes de base pour cuisiner des mets syriens, ce qu’il adore faire. Depuis son arrivée à Montréal, le jeune homme a réussi à trouver les meilleures adresses pour dénicher les ingrédients typiques de la cuisine de son pays d’origine. Il a également réussi avec brio ses cours de francisation, puisque notre discussion s’est faite exclusivement en français.

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Ruben Salazar, intervenant communautaire interculturel et jeunesse au Centre social d’aide aux immigrants, et Youssef, arrivé de Syrie il y a un peu plus de trois mois, échangent des conseils pour bien apprêter les légumes récoltés. Après la corvée, chaque participant repart avec au moins 1 kg de légumes, parfois jusqu’à 2 kg.

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Selon Éric Duchemin, les jardins communautaires et les jardins collectifs participent à la souveraineté alimentaire. Les fermes urbaines qui produisent des légumes de niche participent plutôt à « un renouveau de la ville par le biais de l’économie circulaire », surtout si on y utilise des ressources urbaines qui seraient autrement jetées. Selon lui, il faut voir l’agriculture urbaine comme contribuant au développement de la gastronomie locale, si ce n’est qu’en remplaçant certains ingrédients importés. « Ça n’a pas de sens que l’on utilise des pleurotes de Chine, dit-il. Elles sont pleines d’eau ! »

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« Les fermes urbaines sont un épiphénomène de l’agriculture urbaine », dit Éric Duchemin. « Juste à Montréal, il y a autour de 208 hectares de jardins privés, poursuit-il. C’est de l’agriculture urbaine. » Selon le directeur scientifique du Laboratoire sur l’agriculture urbaine, l’été, à Montréal, 250 000 personnes pourraient se nourrir uniquement de légumes frais cultivés en ville. Il n’y a pas de réelles fermes sur les toits à Montréal, déplore Éric Duchemin. À part celle du Palais des congrès, il y a celle sur le toit du supermarché IGA de Saint-Laurent, dit-il. « On est loin de la situation parisienne. »