Le Conseil canadien des relations industrielles (CCRI) a reçu samedi le mandat d’examiner et, éventuellement, de mettre fin au conflit de travail dans les ports de la Colombie-Britannique, après que le syndicat représentant les travailleurs a rejeté une deuxième entente de principe.

Le ministre fédéral du Travail, Seamus O’Regan, a expliqué cette décision dans un communiqué, affirmant qu’il avait demandé au CCRI de déterminer s’il croit qu’il sera toujours possible de régler le conflit à la table des négociations.

Si le CCRI juge que le rejet de l’entente de principe par le syndicat, vendredi, a éliminé toute chance de régler le conflit par la négociation, il devra « imposer soit une nouvelle convention collective, soit un arbitrage contraignant afin de régler les derniers points de la négociation collective ».

« Cette incertitude ne peut plus durer. Bien que les activités aient repris dans les ports de la Colombie-Britannique, nous avons besoin d’une stabilité durable pour les innombrables travailleurs et entreprises qui en dépendent », a martelé le ministre O’Regan.

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Le ministre fédéral du Travail, Seamus O’Regan

« Notre économie ne peut supporter davantage de perturbations en raison de cette mésentente. À la suite d’une réunion du Groupe d’intervention en cas d’incident, à laquelle le premier ministre a assisté le 19 juillet dernier, le gouvernement est prêt pour toute option et éventualité », a-t-il rappelé.

Le Groupe d’intervention en cas d’incident, un club select de ministres et de hauts fonctionnaires, se réunit uniquement dans les situations de crise nationale.

Il s’agira de la deuxième intervention du CCRI dans ce différend qui dure depuis plusieurs mois entre le Syndicat international des débardeurs et magasiniers du Canada et l’Association des employeurs maritimes de la Colombie-Britannique.

Le 19 juillet, le CCRI a statué qu’un bref retour sur les lignes de piquetage par les débardeurs était illégal, parce qu’ils n’avaient pas fourni le préavis requis. Les travailleurs avaient auparavant débrayé du 1er au 13 juillet.

Retour de l’incertitude

La sortie du ministre O’Regan, samedi, est survenue au lendemain du rejet de la deuxième entente de principe intervenue dans ce dossier. L’accord rédigé par un médiateur fédéral a été rejeté par les membres du syndicat, qui représente 7400 travailleurs.

Plusieurs groupes d’affaires ont donc renouvelé leurs appels pour que le gouvernement fédéral légifère pour mettre fin au conflit. Au début du mois de juillet, lors de l’arrêt des opérations, des milliards de dollars en biens se sont retrouvés coincés dans les quelque 30 terminaux portuaires qui étaient touchés par les moyens de pression en Colombie-Britannique.

Dans un communiqué, la première ministre de l’Alberta, Danielle Smith, a décrit la situation comme un « cauchemar logistique » pour l’économie de l’Ouest canadien. Elle a appelé tous les partis fédéraux à « retourner immédiatement à Ottawa pour adopter une loi forçant le retour au travail ».

Le Conseil canadien des affaires, la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante et la Chambre de commerce du Grand Vancouver ont fait écho aux sentiments de Mme Smith.

« Des travailleurs et des entreprises œuvrant dans de nombreux secteurs à travers le Canada pourraient être touchés si le conflit se prolonge, sans parler de toutes les familles canadiennes qui font face à la hausse des prix », a plaidé le président et chef de la direction du Conseil canadien des affaires, Goldy Hyder. « Trop c’est trop. »

La présidente de la Chambre de commerce du Grand Vancouver, Bridgitte Anderson, a ajouté que le Canada ne pouvait se permettre de vivre avec les retombées négatives découlant d’une éventuelle nouvelle grève.

« Cela fait maintenant deux fois que le syndicat rejette des accords. Il est temps que le gouvernement fédéral et les partis d’opposition interviennent pour s’assurer que nos ports restent ouverts. C’est uniquement de cette façon que nous pourrons éviter d’alimenter inutilement l’inflation et d’affecter d’autres emplois. »

En discordance avec les milieux d’affaires, le chef du NPD, Jagmeet Singh, a plutôt soutenu que la meilleure chose à faire était de ramener les parties à la table des négociations.

« Nous ne devons pas perdre de vue ce qui est en jeu pour les travailleurs portuaires de la Colombie-Britannique, mais aussi pour tous les travailleurs, a écrit M. Singh dans un communiqué. Un emploi qui permet de gagner sa vie, nourrir sa famille et mettre un toit au-dessus de sa tête, ce n’est pas trop demander quand les PDG font des profits records. »

L’accord qui a été rejeté vendredi par le syndicat comprenait une augmentation de salaire de 19,2 % et une prime à la signature d’environ 3000 $ par travailleur à temps plein. L’entente aurait « potentiellement » augmenté le salaire annuel médian des débardeurs syndiqués de 136 000 $ à 162 000 $, sans compter la pension et les avantages sociaux.