(Ottawa) Dépenses incontrôlées, déficits à répétition, hausse substantielle des frais d’intérêt sur la dette, manque de rigueur budgétaire : la ministre des Finances Chrystia Freeland a été la cible d’un barrage de critiques de la part des députés conservateurs durant son passage mardi devant le comité des finances.

L’hostilité des élus conservateurs était telle que Mme Freeland a fini par lâcher qu’elle avait appris, lorsqu’elle était responsable de renégocier l’Accord de libre-échange nord-américain avec les négociateurs de l’administration de Donald Trump, que chercher à « apaiser un intimidateur est une erreur ».

La ministre était appelée à défendre la gestion des finances publiques du gouvernement Trudeau devant le comité des finances. Le comité étudie depuis quelques semaines le projet de loi C-47 visant à mettre en œuvre le budget fédéral qui a été déposé le 28 mars.

Ce budget prévoit de nouvelles dépenses, notamment des mesures totalisant près de 80 milliards de dollars au cours des prochaines années pour attirer des entreprises désirant investir dans la transition énergétique et rivaliser avec l’Inflation Reduction Act de l’administration Biden à Washington. Le Parti conservateur reproche aux libéraux de Justin Trudeau d’augmenter à nouveau les dépenses et de reporter aux calendes grecques le retour à l’équilibre budgétaire.

Reprenant certains des thèmes martelés par son chef Pierre Poilievre à la Chambre des communes, le député conservateur Jasraj Singh Hallan a accusé Chrystia Freeland d’avoir induit les Canadiens en erreur quand elle a projeté, dans sa mise à jour économique de l’automne dernier, un retour à l’équilibre budgétaire dans cinq ans.

Il a aussi fait valoir que la ministre avait jeté de l’huile sur le feu inflationniste en augmentant les dépenses de plus de 60 milliards dans son dernier budget.

« Les dépenses de votre gouvernement alimentent encore l’inflation. Ça a augmenté encore aujourd’hui », a lancé M. Hallan, en faisant allusion au dernier rapport de Statistique Canada sur l’inflation en avril.

Ces propos ont donné le coup d’envoi à une série d’échanges houleux entre la ministre et les quatre députés conservateurs qui sont membres du comité.

Les Canadiens « sont plus intelligents »

Gardant son calme, Mme Freeland a soutenu que les Canadiens « sont plus intelligents » et savent fort bien que « ce sont les conservateurs qui tentent de les induire en erreur » en écartant d’un revers de main la bonne tenue de l’économie canadienne et la position fiscale enviable dans laquelle le Canada, selon elle, se retrouve comparativement aux autres pays du G7.

« En matière de responsabilité fiscale, le Canada affiche le déficit le moins élevé des pays du G7. L’état des finances publiques du Canada a été jugé par les gens qui comptent, les agences de notation », a aussi dit Mme Freeland avant d’être interrompue à quelques reprises par son collègue conservateur.

« On va passer à une autre question parce que la ministre ne veut pas répondre », a finalement lâché le député Jasraj Singh Hallan. « J’ai une question simple pour vous. Quand le budget sera-t-il équilibré ? Je veux juste la date ! »

« Comme je l’ai indiqué, les conservateurs semblent peu désireux d’entendre des réponses étoffées. Il y a eu une question sur l’inflation. Il est important de dire aux Canadiens que l’inflation est en baisse constante depuis le sommet de 8,1 % en juin à 4,4 % », a dit la ministre.

« Elle ne répond pas aux questions », s’est alors plaint M. Hallan. Plus tard, la ministre a refusé de préciser les frais d’intérêt que le Canada paiera sur la dette accumulée l’an prochain, malgré l’insistance du député conservateur Adam Chambers. Dans le dernier budget, on prévoit que ces frais s’élèveront à 43,9 milliards.