Au bout d’une année chaotique pour Hilo, marquée par le congédiement de son PDG et le départ de son responsable de la technologie, la filiale d’Hydro-Québec créée pour gérer la pointe hivernale affiche une performance meilleure que prévu.

Les 22 000 clients d’Hilo ont aidé Hydro-Québec à soulager son réseau de 62,5 mégawatts en moyenne lors de chacun des 19 épisodes de froid pour lesquels ils ont été sollicités. C’est l’équivalent de la consommation de 9000 résidences qui a été effacée pendant ces périodes où le réseau d’électricité est le plus sollicité.

Les résultats de l’hiver 2022-2023, le troisième de la courte histoire d’Hilo, surpassent de 33 % l’objectif de 47 mégawatts que s’était fixé Hydro-Québec. Selon son porte-parole, Cendrix Bouchard, ce résultat s’explique par l’élargissement de l’offre d’Hilo à la clientèle d’affaires et par l’ajout de nouvelles fonctionnalités, comme la charge des véhicules électriques, pour diminuer la consommation d’électricité pendant les heures critiques.

Les clients d’Hilo avaient aussi une nouvelle option, le défi extrême, qui s’est ajoutée cette année aux défis modéré et audacieux et qui offre la possibilité de réduire encore plus sa consommation d’électricité.

Les 22 000 clients d’Hilo qui ont réduit leur consommation d’électricité pour répondre aux besoins du réseau d’électricité se sont partagé des récompenses moyennes de 140 $.

Des tricheurs

La moyenne des récompenses versées par Hilo à ses clients recouvre une réalité très large. Beaucoup d’entre eux ayant relevé tous les défis proposés, soit 19 au total entre le 1er décembre et le 31 mars, ont pu recevoir beaucoup plus.

Certains d’entre eux ont aussi contourné les conditions d’utilisation d’Hilo pour optimiser leurs récompenses en argent, ce qui vient gonfler la moyenne des compensations versées.

Comme les récompenses sont calculées en fonction de l’écart entre la consommation d’un foyer et la réduction de la consommation pendant la période des défis, il suffisait par exemple de chauffer au maximum, quitte à ouvrir les fenêtres, avant le début de la période de restriction et de tout couper pendant la période de restriction pour toucher un maximum d’argent.

Alors que la moyenne des récompenses versées par Hilo est de 140 $ pour la saison, des clients d’Hilo se sont d’ailleurs vantés sur les réseaux sociaux de toucher 140 $ et même plus pour un seul défi.

Hydro-Québec pourrait sévir contre ces clients d’Hilo, a indiqué le porte-parole de la société d’État, qui assure qu’un très petit nombre d’utilisateurs « ont tenté de maximiser les récompenses ». Selon Cendrix Bouchard, bien qu’ils n’enfreignent aucune loi en agissant de la sorte, ces utilisateurs vont à l’encontre des objectifs d’efficacité énergétique qui sont la raison d’être d’Hilo et qui sont spécifiés dans les conditions d’utilisation du service.

« Hilo a la possibilité de mettre fin à l’entente », a-t-il dit. Jusqu’à maintenant, aucun de ces tricheurs n’a été sanctionné.

La tarification dynamique plus populaire

L’autre outil de gestion de la demande de pointe qui s’adresse au grand public, la tarification dynamique, a connu beaucoup plus de succès qu’Hilo cet hiver. Les deux options de tarification dynamique, soit le crédit hivernal et le tarif Flex D, ont intéressé 228 000 clients d’Hydro-Québec. Leurs efforts conjugués ont permis de déplacer 206 mégawatts de consommation pendant les périodes critiques.

La grande majorité des utilisateurs de la tarification dynamique, soit 202 000 sur 228 000, ont choisi le crédit hivernal. Cette option offre un crédit de 53,5 cents pour chaque kilowattheure de réduction de la consommation habituelle pendant les périodes critiques pour le réseau d’électricité annoncées la veille.

L’économie moyenne réalisée par les abonnés au crédit hivernal varie entre 27 $ et 71,40 $, selon l’implication des consommateurs, indique Hydro-Québec. Certains ont pu économiser beaucoup plus, comme le signale un des lecteurs de La Presse, qui a réduit sa facture de chauffage de 265,57 $ avec l’aide de thermostats intelligents.

L’autre option de tarification dynamique, le tarif Flex D, est moins populaire. Elle offre la possibilité de payer moins cher que le tarif ordinaire pendant toute la période hivernale, mais de payer le kilowattheure beaucoup plus cher en période de pointe, ce qui incite à réduire la consommation d’électricité.

Au total, les 228 000 utilisateurs de la tarification dynamique ont soulagé le réseau électrique de 206 mégawatts. C’est l’équivalent de la demande de 29 400 ménages.

Un coût élevé

Ces nouveaux outils de gestion de la demande de pointe coûtent cher à Hydro-Québec. Surtout Hilo, qui subventionne en partie l’équipement nécessaire et qui paie l’installation des thermostats par un électricien.

La société d’État a d’autres moyens de gérer la pointe hivernale, comme la possibilité de débrancher certaines grandes entreprises en échange d’une compensation financière, l’achat d’électricité sur les marchés voisins pendant les heures critiques ou encore l’utilisation de sa centrale d’urgence au gaz naturel située à Bécancour.

Hilo est probablement le plus coûteux et le moins efficace de tous ces outils de gestion de la pointe, avec 62,5 mégawatts effacés.

À titre de comparaison, les 3400 entreprises inscrites au programme d’énergie interruptible peuvent déplacer 425 mégawatts de puissance en période de pointe. Il n’a pas été possible d’obtenir une base de comparaison des coûts des différents moyens disponibles.

Selon la société d’État, Hilo ne doit pas être vue seulement comme un centre de profit, mais comme une centrale virtuelle qui permet de gérer plus efficacement le réseau de distribution d’électricité, ce qui se traduit par des économies.

La filiale Hilo est en train d’être restructurée par Hydro-Québec afin d’en augmenter l’efficacité. Déjà, l’offre d’Hilo pour les futurs clients est moins généreuse qu’à ses débuts, il y a trois ans.

« L’offre d’Hilo va continuer d’évoluer », indique Cendrix Bouchard, et les bénéfices pour Hydro-Québec vont aller en augmentant, assure-t-il. Avec sa centrale virtuelle, la société d’État pourra déplacer 620 mégawatts de demande de pointe d’ici cinq ans, soit multiplier par 10 les résultats de cette année.