Installer une prothèse ne se fait pas en criant ciseau. Prenons l’exemple d’un genou. Le chirurgien doit réaliser des coupes osseuses dans le tibia et le fémur pour installer la prothèse. De nouvelles technologies permettent d’améliorer la précision de ce travail. Et c’est ce que fait au quotidien Karine Duval, directrice de la R & D en robotique chez Zimmer Biomet.

« Nous développons des outils pour que le chirurgien puisse faire la meilleure coupe possible en lui permettant de voir en temps réel sur un écran ce qu’il doit couper et en l’aidant à planifier sa coupe », explique Karine Duval, ingénieure mécanique.

Par exemple, entre 2008 et 2013, elle s’est concentrée sur ce qui allait devenir l’iAssist Knee. Au lieu d’une caméra infrarouge, dont la vue peut être obstruée par exemple par une infirmière qui se place devant, l’outil utilise des capteurs de gravité. « On les place directement sur l’instrument pour pouvoir bien le positionner sur l’os du patient, explique-t-elle. L’idée vient de mon patron, Louis-Philippe Amiot, qui est chirurgien orthopédiste. Cette technologie était nouvelle, alors nous avons essayé plusieurs choses, nous nous sommes trompés, nous avons recommencé à zéro. Il a fallu plusieurs années pour faire la preuve de concept et arriver au produit fini. »

Une nouvelle version d’iAssist Knee est sur le point de sortir sur le marché.

Karine Duval est également à la tête d’une équipe établie à Montpellier et à Montréal pour continuer à développer le robot Rosa Brain. Il est souvent utilisé pour traiter des cas d’épilepsie.

PHOTO DOMINICK GRAVEL, LA PRESSE

L’entreprise Zimmer Biomet, qui fait à la base des prothèses, investit également dans la conception d'outils d'aide aux chirurgiens. Le robot Rosa Brain permet de placer les électrodes dans la boîte crânienne en faisant seulement de petites incisions.

« Traditionnellement, le chirurgien enlève une partie de la boîte crânienne pour installer des électrodes sur le cerveau de la personne pour ensuite la garder en observation afin de voir la région problématique à traiter, explique l’ingénieure. Plusieurs personnes avaient peur et refusaient de se faire traiter. Rosa Brain permet de placer les électrodes en faisant seulement de petites incisions. Cela réduit grandement le temps d’intervention, et c’est moins traumatisant. »

Savoir sortir de sa zone de confort

Pour réaliser ses mandats, Karine Duval travaille avec une équipe multidisciplinaire. « Nous avons besoin d’ingénieurs mécaniques, parce qu’il y a toujours une portion instrumentation, précise-t-elle. Nous avons aussi besoin d’ingénieurs logiciels, électriques, biomédicaux, et souvent aussi de systèmes embarqués. Nous sommes généralement une vingtaine de personnes sur des projets qui durent entre 18 et 24 mois. »

Elle travaille aussi de près avec des chirurgiens et des fournisseurs qui fabriquent les différents produits. « Il faut avoir une grande curiosité et ne pas avoir peur de sortir de sa zone de confort, d’aller parler aux différents experts, de leur poser des questions pour s’assurer de bien comprendre leurs enjeux afin de pouvoir bien faire son travail », explique-t-elle.

C’est d’abord Orthosoft que Karine Duval a rejoint comme stagiaire alors qu’elle était encore au baccalauréat en génie mécanique à Polytechnique Montréal. La société comptait alors une quarantaine d’employés et a été acquise par l’entreprise américaine Zimmer Biomet en 2007.

Nous avons fait preuve de beaucoup de rigueur et de dynamisme en développant plusieurs produits, et Zimmer Biomet, qui fait à la base des prothèses, a par la suite beaucoup investi à Montréal, surtout depuis 2015.

Karine Duval, directrice de la R & D en robotique chez Zimmer Biomet

Si bien que Zimmer Biomet compte maintenant environ 400 employés dans la métropole.

« Nous menons plusieurs projets et pour certains, nous intégrons maintenant de l’intelligence artificielle, par exemple lorsque nous voyons qu’elle pourrait aider à mieux planifier une intervention chirurgicale », précise l’ingénieure.

Le principal marché pour les outils d’assistance pour la chirurgie développés par l’équipe de Montréal de Zimmer Biomet est les États-Unis, mais d’autres sont en développement, comme l’Europe, l’Australie, la Nouvelle-Zélande, le Japon et, tranquillement, le Canada.