Cette semaine, Jean-Martin Côté, directeur général du Manoir D’Youville, à Châteauguay, qui a lancé un projet de potager dans l’île Saint-Bernard qui sera exploité par des gens vivant avec un trouble du spectre de l’autisme ou une déficience intellectuelle, répond à nos questions sur le leadership.

Q. D’où est venue l’idée de créer un potager de 5000 pi⁠2 et d’embaucher des gens vivant avec une déficience intellectuelle ou un trouble du spectre de l’autisme ?

R. Les Sœurs grises, qui ont occupé les lieux durant 200 ans, ont toujours été très impliquées dans la communauté. D’ailleurs, les légumes qu’elles cultivaient étaient, en partie, destinés à nourrir les malades de l’Hôpital général de Montréal. Au Manoir D’Youville, nous avons toujours eu à cœur de perpétuer cet héritage social et de redonner à la communauté. Chaque fois que nous implantons une nouveauté, nous le faisons dans le but d’avoir un impact positif dans notre communauté immédiate. Notre projet de potager n’y fait pas exception.

Comme toutes les industries du moment, nous faisons face à la pénurie de main-d’œuvre. D’un autre côté, nous savons que les personnes atteintes du trouble du spectre de l’autisme ou d’une déficience intellectuelle sont encore stigmatisées ou oubliées sur le marché du travail, même dans le contexte économique actuel. Nous avons donc eu l’idée de donner à cette clientèle des occasions d’emploi et d’évolution au sein de notre équipe. C’est donc 10 jeunes de la région atteints du trouble du spectre de l’autisme ou d’une déficience intellectuelle qui travaillent dans notre équipe à l’année. Ils sont jumelés à des employés chevronnés et recevront à terme un diplôme attestant de leur réussite selon les principes du Programme d’apprentissage en milieu de travail. En leur offrant du travail, nous nous engageons dans notre communauté tout en assurant une relève au sein de notre équipe. Tout le monde y gagne !

Q. Comment une entreprise peut-elle faire face au défi d’intégration et d’apprentissage quand on embauche des personnes ayant une déficience intellectuelle ou vivant avec un trouble du spectre de l’autisme ?

R. Pour assurer la pérennité d’un projet de la sorte, je crois qu’il est judicieux d’être accompagné par des organismes compétents ou des programmes spécialisés. Pour notre projet, nous avons souscrit à un programme d’intégration au travail pour les personnes atteintes d’une déficience intellectuelle ou du trouble du spectre de l’autisme, en collaboration avec le Centre intégré de santé et de services sociaux de la Montérégie-Ouest. De plus, les jeunes que nous avons embauchés sont supervisés par deux intervenants en réadaptation, qui les appuient dans leur cheminement pour acquérir des aptitudes sociales et professionnelles. Ces organismes et intervenants sont indispensables pour nous aider à créer un environnement de travail favorable au développement et à l’épanouissement de ces jeunes et de nos employés, et ce, de la conscientisation des autres employés à la répartition des tâches, en passant par la livraison des instructions de travail et la rétroaction.

Q. Est-ce une obligation pour les entreprises d’être ouvertes à la diversité ?

R. Sans être une obligation, je crois que les entreprises ont tout intérêt à s’ouvrir à la diversité ! Premièrement, je trouve que la diversité est une des plus grandes richesses d’une entreprise. Avoir au sein de son équipe des personnes issues de milieux différents et aux aptitudes et à l’expérience variées permet d’apprendre les unes des autres et favorise la créativité. Deuxièmement, je crois que la diversité est très bonne pour la marque employeur. Nous vivons présentement dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre où les futurs candidats ont l’embarras du choix quand il s’agit de choisir un emploi. Ils cherchent davantage à travailler pour une organisation représentative de la société qui partage leurs valeurs. Ainsi, je crois que les entreprises qui affichent leur ouverture à la diversité renforcent leur attractivité sur le marché de l’emploi.