L’automne, la rentrée scolaire et le retour au bureau coûteront plus cher aux consommateurs qui voudront revêtir de nouveaux habits. Si le prix des vêtements est demeuré stable au cours de la dernière année, « le vent risque de tourner » en septembre, préviennent les commerçants interrogés par La Presse.

De nombreux détaillants qui avaient, jusqu’à maintenant, absorbé les différentes hausses de coûts devront se résoudre à refiler une partie de la facture à leurs clients en augmentant le prix sur les étiquettes.

« Ça, c’est sûr et certain, confirme Jessika Roussy, copropriétaire de 10 magasins Mode Choc à travers le Québec. On ne peut pas tout absorber. Malheureusement, il faut augmenter nos prix tout en restant [concurrentiels]. Donc, c’est très challengeant. Il y a beaucoup de décisions à prendre. »

Contrairement à ceux de l’essence et de l’épicerie, le prix des vêtements pour femmes et pour enfants a légèrement diminué en un an, affichant respectivement une baisse de 0,1 % et de 2,3 %, selon les chiffres révélés par Statistique Canada, pour la période de mars 2021 à mars 2022. Du côté des hommes, les consommateurs ont assisté à une augmentation de 1,2 %.

Or, les détaillants affirment pour la plupart avoir bel et bien subi des augmentations en raison notamment de la hausse du coût des transports et des matières premières. Mais ils ont décidé d’épargner leurs clients. Ils rappellent également que les pantalons, chandails et manteaux actuellement offerts dans les boutiques ont été commandés il y a un an. Bien que les prix aient été en hausse à cette époque, l’augmentation était moins grande que maintenant.

Ainsi, au cours de la dernière année, ils ont eu recours à toutes sortes de stratégies pour adoucir la hausse. « On a diminué le nombre de promotions, mentionne Lili Fortin, présidente de Tristan. Ce qui fait que le prix original, on essaie de le garder le plus stable possible. On sait que le client voit des hausses partout : l’épicerie, l’essence. »

« Nos concurrents, ce sont les magasins de vêtements, mais c’est aussi le restaurant, l’épicerie, la SAQ, ajoute-t-elle. Le client a un certain montant à dépenser par semaine et il priorise. On est conscients de ça. On sait que le client a beaucoup d’options. »

Les commerçants ne pourront toutefois pas épargner les clients encore bien longtemps, selon Mme Fortin. « Est-ce que ce ça va durer éternellement ? Non, dit-elle. On fait attention, mais il faut quand même opérer une business. »

« On sent que le vent va tourner pour l’automne », croit Louis Dessureault, vice-président à l’exploitation du Groupe Marie Claire (Claire France, Marie Claire, San Francisco, Grenier, Dans un jardin). Il soutient que les différentes hausses « vont se refléter dans le prix du détail ».

Difficile toutefois pour les détaillants de chiffrer cette augmentation. Lili Fortin explique que d’un fournisseur à l’autre, les hausses varient. Les commerçants tentent donc de jongler avec ces différents éléments.

Concrètement, Isabelle Deslauriers, fondatrice d’Alice et Simone, une collection de vêtements pour enfants, calcule que sa populaire jupe réversible qu’elle vend actuellement à 60 $ passera à 67 $.

PHOTO CATHERINE LEFEBVRE, LA PRESSE

Portrait de Isabelle Deslauriers fondatrice de Alice et Simone pour un article sur l’augmentation du prix des vêtements

Si l’augmentation des coûts est trop élevée, il va falloir que je trouve une stratégie pour couper sur la production. Ça peut vouloir dire changer de matière première, diminuer le nombre de coutures.

Isabelle Deslauriers, fondatrice d’Alice et Simone

Convaincue que ses clients ne broncheront pas trop devant ces changements de prix, Mme Deslauriers est toutefois consciente qu’elle doit jouer les équilibristes. « Dans le vêtement pour enfants, il y a quand même un plafond à ne pas dépasser. »

De son côté, Jessika Roussy tente de se faire rassurante concernant la saison automnale. « Ça va être un petit peu plus cher, reconnaît-elle. Je pense que ça va être beaucoup moins drastique que pour l’essence ou pour certains fruits et légumes, mais il va y avoir des augmentations graduelles, c’est inévitable. »

Si elle admet que les soldes se feront plus rares, Mme Roussy tient à dire que Mode Choc « a une stratégie de conserver des prix qui demeurent tout de même très abordables et très compétitifs ».

Retard de livraison

Par ailleurs, en plus de l’augmentation des coûts, le retard dans les livraisons des collections cause bien des maux de tête, souligne Lili Fortin. À un point tel que pour s’assurer d’avoir des vêtements en magasin, les détaillants commandent actuellement leurs stocks… pour le printemps 2023.

Les usines ferment à cause des cas de COVID-19, elles ont du mal à s’approvisionner en matières premières comme le fil ou certaines composantes de vêtements. Donc, les délais de production sont retardés. Il faut commencer le cycle de développement plus tôt.

Lili Fortin, présidente de Tristan

Pour la saison en cours, le mauvais temps en avril a fait le bonheur de bien des commerçants qui ont dû composer avec des retards dans la livraison de leurs collections de vêtements de printemps et d’été. « On n’a pas eu un mois d’avril extraordinaire, alors ça ne nous a pas trop nui », souligne Louis Dessureault.

« Le temps à l’extérieur est du côté des détaillants de vêtements cette saison-ci. L’été est en retard, ajoute Jessika Roussy. C’est dur sur le moral, mais c’est plus facile pour le commerce de détail. »