Les automobilistes du Québec subissent la forte hausse du coût de l’essence en raison des répercussions du conflit en Ukraine. Le litre de carburant a frôlé les 2 $ dans la région métropolitaine ce week-end. Assez pour changer les habitudes de consommation des Québécois ? Probablement pas, selon les experts.

Le coût de l’essence à la pompe a atteint 1,99 $ le litre à certaines stations-service de Montréal au courant de la fin de semaine, selon le site internet Essence Québec, où les membres peuvent noter les prix qu’ils constatent. Dimanche soir, selon les observations de La Presse, les prix affichés dans la métropole tournaient plutôt autour de 1,95 $ le litre.

Il s’agit d’une hausse de près de 10 cents le litre par rapport à la moyenne recensée vendredi à Montréal, selon les données de la Régie de l’énergie du Québec. Et de 30 cents, si on se réfère au prix moyen en début de semaine, alors qu’il variait entre 1,62 $ et 1,69 $ le litre à Montréal.

L’aggravation du conflit entre l’Ukraine et la Russie et l’arrêt quasi total des exportations russes affectent fortement le marché mondial. Le baril de Brent de la mer du Nord a frôlé lundi matin les 140 dollars, proche du record absolu.

Cette augmentation ne risque pas de se stabiliser avant plusieurs mois, analyse Mehran Ebrahimi, professeur de gestion à l’Université du Québec à Montréal. « Le marché pétrolier est très sensible à toutes sortes de variations et conjonctures économiques, explique-t-il. Déjà, avant même le conflit russo-ukrainien, on voyait la demande mondiale monter. »

« C’est le prix mondial qui dicte le prix qu’on paie ici, renchérit George Iny, directeur de l’Association pour la protection des automobilistes (APA). Les pays exportateurs [de pétrole] sont tous des pays qui pourraient connaître une certaine instabilité ou des problèmes d’approvisionnement. »

Plusieurs industries touchées

La hausse du coût du pétrole ne touche pas que les automobilistes. Aviation, transport, secteur manufacturier : un grand nombre d’entreprises vont se retrouver avec une majoration de leur coût de production, avertit le professeur Ebrahimi.

Le prix des billets d’avion pourrait par ailleurs monter, et ce, même s’ils ont été achetés à l’avance (si certaines clauses du contrat d’achat le permettent), ajoute le spécialiste.

Plusieurs industries souffrent déjà des conséquences de la pandémie et de la pénurie de main-d’œuvre. Dans ce contexte, l’augmentation du prix de l’énergie « n’est pas une équation très favorable », observe M. Ebrahimi.

Québécois et VUS

La hausse du prix de l’essence fait aussi mal au portefeuille des Québécois, qui optent de plus en plus pour des véhicules énergivores. « La COVID-19 a amené plus qu’un engouement, je dirais une folie pour acheter des véhicules plus luxueux et plus gros, remarque George Iny. Les gens échangent un véhicule pour acheter un VUS [véhicule utilitaire sport] ! »

Or, la hausse des coûts n’a généralement que peu d’impact sur les habitudes des consommateurs, selon MM. Ebrahimi et Iny. « Si les comportements se maintiennent, d’ici 2026, tous les Québécois auront des VUS », affirme Mehran Ebrahimi.

Même si les Québécois voulaient changer leur VUS pour une plus petite voiture, les problèmes d’approvisionnement actuels les freineraient, signale aussi George Iny.

Au-delà de changer de véhicule, d’autres solutions s’offrent aux automobilistes pour réduire leur facture, selon M. Iny. D’abord, « retomber en amour avec les transports en commun », malmenés depuis la pandémie. Puis covoiturer. « Si vous êtes deux dans un véhicule, rappelle-t-il, vous venez d’augmenter de façon remarquable son efficacité. »

Avec l’Agence France-Presse