La construction de son complexe à Lévis n’est pas terminée, la première pelletée de terre de sa deuxième antenne n’a pas eu lieu, mais QScale regarde déjà où elle implantera son troisième site. Malgré la nouvelle approche d’Hydro-Québec à l’endroit des projets énergivores, l’entreprise québécoise n’a pas trop à s’inquiéter.

Spécialisée dans le traitement de données à haute densité avec valorisation des rejets thermiques – par exemple, pour chauffer des serres de fruits et légumes –, QScale est essentiellement à la recherche d’espace et d’un accès au réseau de la société d’État.

Avec ses partenaires, le président Martin Bouchard – fondateur du moteur de recherche Copernic, puis des centres de données 4 Degrés – a dressé une liste de 20 municipalités avec qui des échanges sont prévus d’ici la fête nationale du Québec. Terrebonne est la plus récente ville qui y figure. Une rencontre entre la municipalité et l’entreprise a eu lieu il y a environ deux semaines.

On pense que d’ici un an, on va avoir choisi notre prochaine région. Sur une décennie, on aimerait exploiter quatre ou cinq sites de grande envergure au Québec. Nous regardons ces villes pour arriver à cinq sites.

Martin Bouchard, en entrevue avec La Presse

En juillet dernier, QScale avait obtenu 90 millions de Québec pour son complexe de Lévis, un investissement estimé à environ 870 millions et qui doit se décliner en huit phases. Ses campus visent à répondre aux besoins de l’apprentissage machine, en demande croissante avec l’arrivée de l’intelligence artificielle. Un exemple : les calculs de données requis pour faire avancer les voitures autonomes.

QScale veut aussi récupérer la chaleur dégagée par les serveurs pour chauffer les serres agricoles, notamment. Son deuxième complexe doit voir le jour à Saint-Bruno-de-Montarville, en banlieue sud de Montréal.

Les premiers contacts de l’entreprise avec certaines villes ont suscité l’engouement dans ces dernières. À Baie-Comeau, Saguenay et Thurso, les médias locaux ont tous évoqué la potentielle implantation de QScale et des projets milliardaires.

M. Bouchard veut calmer le jeu.

« Toutes ces villes ont été ciblées parce qu’elles ont des papetières ou des alumineries dans leur environnement, dit M. Bouchard. Elles ont accès au réseau d’Hydro-Québec. On ne demande pas de traitement de faveur. On est dans un processus global. Mais ce n’est pas fini. »

Un nouveau contexte

Les complexes de QScale sont très énergivores. La capacité du complexe de Lévis est estimée à 140 mégawatts (MW), tandis que celle du site de Saint-Bruno-de-Montarville pourrait atteindre 70 MW. L’entreprise discute toujours avec la société d’État.

Mais au moment où l’entreprise voit grand, Hydro-Québec, qui dit avoir reçu une « quantité exceptionnelle de projets représentant plusieurs milliers de mégawatts », a prévenu qu’elle serait plus sélective.

« Nous travaillons de concert avec le gouvernement à développer des lignes directrices qui permettront de déterminer, parmi les projets reçus, les plus porteurs pour le Québec », explique la société d’État dans une lettre envoyée à plusieurs promoteurs, que La Presse a pu consulter.

M. Bouchard estime que QScale coche toutes les cases. L’entreprise est québécoise, génère des retombées locales et veut arrimer ses centres de traitement des données à des complexes qui bénéficieront de la chaleur dégagée par ses serveurs.

Le gouvernement Legault semble voir la chose du même œil.

« Le complexe de Lévis est le genre de projet à valeur ajoutée qui va être souhaité », explique une source gouvernementale qui n’est pas autorisée à s’exprimer publiquement.

Sérieux

La Presse s’est entretenue avec les maires de Baie-Comeau (Côte-Nord) et Thurso (Outaouais), Yves Montigny et Benoit Lauzon, qui, de manière distincte, ont participé à des rencontres avec les représentants de QScale.

Les deux maires ont brossé le portrait d’une entreprise sérieuse dans ses démarches, à la recherche d’éléments précis (grands espaces et accès au réseau d’Hydro-Québec) pour son troisième complexe.

Le maire de Baie-Comeau estime que sa municipalité a tout pour répondre aux besoins de QScale, et que « cela n’aurait pas de bon sens que l’entreprise aille ailleurs qu’ici ».

« La papetière [usine à papier journal de Résolu] qui consommait plus de 100 MW est fermée, souligne M. Montigny. La capacité en mégawatts est là. Baie-Comeau est près des lignes électriques. Nous travaillons déjà sur un projet de serres chauffées [par la chaleur d’ordinateurs]. Les avantages pour Hydro-Québec de faire cela ici sont majeurs. Ils doivent le voir. »

De son côté, le maire de Thurso s’est montré prudent dans ses commentaires en soulignant n’avoir reçu aucune promesse de QScale. À Terrebonne, la porte-parole Émilie St-Jacques a affirmé que la rencontre avec l’entreprise était « exploratoire ». Terrebonne veut créer un parc industriel, où des serres pourraient être aménagées.

2022

QScale prévoit avoir terminé la construction de la première phase de son complexe de Lévis cette année. Ses activités devraient démarrer avant la fin de 2022.

Source : Qscale