(Québec) Le président et chef de la direction de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain (CCMM), Michel Leblanc, affirme que « les entreprises ont peur » de certaines exigences de la réforme de la loi 101, qui risquent selon elles de « fragiliser notre base d’affaires » au Québec.

M. Leblanc a eu un échange musclé mardi avec le ministre responsable de la Langue française, Simon Jolin-Barrette, à l’avant-dernier jour des auditions publiques du projet de loi 96 modernisant la Charte de la langue française. Le président de la CCMM s’est inquiété des dispositions prévues par Québec pour encadrer les employeurs qui exigent la connaissance d’une autre langue que le français à l’embauche.

PHOTO JACQUES BOISSINOT, LA PRESSE CANADIENNE

Simon Jolin-Barrette

Selon lui, quand l’État tente d’influencer la langue de travail des sièges sociaux qui font des affaires avec le marché international, où l’anglais est dominant, il risque de les pousser à réfléchir à l’opportunité de déménager leurs opérations à Toronto.

« Le développement économique et la performance de nos entreprises pourraient être affectés négativement si elles n’arrivent pas à embaucher des ressources bilingues [quand] elles le jugent nécessaire […]. C’est le Québec en entier qui va en souffrir », a affirmé M. Leblanc, qui affirme soutenir autrement l’objectif principal du projet de loi 96 d’assurer la vitalité du français au Québec et à Montréal.

Qui contrôlera ?

Dans son mémoire, la CCMM rappelle que le projet de loi 96 prévoit que les entreprises ne pourront pas exiger la connaissance d’une autre langue que le français « à moins que l’accomplissement de la tâche nécessite une telle connaissance ». Or, ajoute la Chambre, « l’enjeu est de déterminer qui décide de la nécessité de connaître l’anglais : l’entreprise, le candidat au poste, un fonctionnaire ou encore un processus gouvernemental normé ? »

Ce sujet a provoqué des flammèches mardi entre Michel Leblanc et le ministre Jolin-Barrette, ce dernier accusant le président de la CCMM d’essayer « de faire peur aux entreprises » en suggérant qu’un fonctionnaire pourrait enquêter sur les processus d’embauche des entreprises. « Les entreprises ont peur, monsieur le ministre », lui a répondu ce dernier.

Selon M. Leblanc, le gouvernement Legault risque aussi de fragiliser la base d’affaire du Québec en cessant de renouveler après trois ans l’attestation qui permet aux titulaires d’un permis de travail temporaire d’envoyer leurs enfants à l’école anglaise.

« À partir du moment où on va dire à des ressources hautement mobiles que tes enfants, au bout de trois ans, iront à l’école française, […] on joue dans la zone qui va nous affaiblir sur les talents qu’on cherche à attirer », a-t-il affirmé.

Selon lui, « la vraie game qui se joue » en ce moment mène des organismes qui recrutent des travailleurs hautement qualifiés à Toronto à pointer du doigt certaines mesures prévues par le projet de loi 96, les incitant s’établir en Ontario plutôt qu’au Québec. Pour Michel Leblanc, cette situation nuit à la compétitivité de Montréal quand elle souhaite attirer dans la métropole des entreprises et des employés des secteurs de pointe.