Le climat de travail semble tendu au Marriott Château Champlain, l’un des hôtels emblématiques du centre-ville de Montréal, où le syndicat montre du doigt l’employeur en affirmant qu’il s’adonne à des pratiques antisyndicales. Une manifestation est prévue ce samedi en guise de geste de solidarité avec la présidente du syndicat qui a été congédiée injustement aux yeux de ceux qui représentent les travailleurs de l’établissement.

Selon la Fédération du commerce, affiliée à la Confédération des syndicats nationaux (CSN), la direction de l’hôtel enfreint la convention collective, qui est échue depuis plus d’un an, en se tournant vers des sous-traitants et des cadres pour effectuer des tâches qui relèvent habituellement des travailleurs syndiqués.

Cette pratique, explique Michel Valiquette, responsable du secteur de l’hôtellerie à la Fédération, fait en sorte de ralentir la cadence des rappels de travailleurs qui ont été mis à pied depuis le début de la pandémie de COVID-19.

Il n’y a que de « 15 à 25 personnes » qui ont été rappelées depuis la réouverture de l’hôtel à la suite d’importants travaux de rénovation, a affirmé M. Valiquette, au cours d’un entretien téléphonique, comparativement à un effectif de 220 syndiqués – personnel d’entretien, cuisiniers et plongeurs, par exemple – avant la crise sanitaire.

« On commence à voir des taux d’occupation plus intéressants, mais il y a peu de rappels », a déploré M. Valiquette, en ajoutant qu’il s’expliquait mal pourquoi on tardait à rappeler des employés au moment où plusieurs entreprises du secteur de l’hôtellerie ont indiqué manquer de main-d’œuvre.

Des élus interpellés

La Fédération du commerce a même décidé d’interpeller des ministres des gouvernements Legault et Trudeau pour leur souligner que le Marriott Château Champlain et son propriétaire agissaient de la sorte même s’il bénéficiait de programmes de soutien gouvernementaux comme le Programme d’action concertée temporaire pour les entreprises (PACTE) et la Subvention salariale d’urgence du Canada (SSUC).

Au 31 mars, la Société en commandite Château Champlain avait reçu 6,2 millions du PACTE, tandis que le groupe hôtelier et immobilier Tidan, propriétaire de l’hôtel, avait obtenu environ 10,7 millions. Tidan a également bénéficié de la SSUC, selon le registre fédéral du programme.

« Ce faisant, non seulement la direction [de l’hôtel] se trouve à transgresser de manière répétitive la convention collective en vigueur, mais elle est directement responsable de maintenir au chômage des travailleurs qui ne demandent qu’à être rappelés au travail », fait valoir la lettre que La Presse a pu consulter.

Dans une déclaration transmise par courriel, Tidan a fait savoir que sa réponse viendrait la semaine prochaine, en soulignant qu’il y avait un processus de médiation pour renouveler la convention collective.

La présidente du syndicat tassée

Lundi, le Tribunal administratif du travail a décidé que la présidente du Syndicat des travailleuses et travailleurs du Marriott Château Champlain, Aida Gonçalves, pouvait avoir accès au local syndical de l’hôtel même si elle a été congédiée le mois dernier.

Mme Gonçalves a perdu son gagne-pain le 14 juillet dernier à la suite d’une manifestation organisée la semaine précédente dans le hall de l’hôtel. La direction lui avait également interdit d’avoir accès au local syndical du Marriott.

Le Tribunal a estimé qu’il s’agissait d’une atteinte « aux droits fondamentaux du syndicat ». Il a aussi ordonné à l’employeur de permettre à Mme Gonçalves de participer aux séances de conciliation ou de négociation en vue du renouvellement de la convention collective.

Selon la Fédération du commerce, la manifestation devrait débuter devant le siège social de Tidan, rue Sherbrooke Ouest, et se terminer devant le Marriott Château Champlain.

Inauguré en 1967 pour accueillir les visiteurs d’Expo 67, l’hôtel, qui compte plus de 600 chambres, a fait l’objet d’une cure de rajeunissement intérieure qui s’est terminée le printemps dernier.