Afin d’assurer le succès de la réforme d’Investissement Québec (IQ), il faudra mettre de l’avant une gestion du changement qui dissipera les craintes à l’égard de son mandat élargi, estiment deux des principales associations patronales.

Il s’agit de l’un des messages livrés par le Conseil du patronat du Québec (CPQ) et Manufacturiers et Exportateurs du Québec (MEQ), mercredi, devant la commission de l’économie et du travail, à l’Assemblée nationale, dans le cadre de la deuxième journée de travaux, à laquelle participait notamment le ministre de l’Économie, Pierre Fitzgibbon.

La commission se penche sur l’intention du gouvernement Legault de donner plus de moyens au bras financier de l’État québécois dans le cadre du projet de loi 27, notamment afin de doubler les investissements étrangers, qui sont d’environ 3,5 milliards par année, en cinq ans, et donner un élan aux exportations. Dans l’ensemble, la pièce législative a été accueillie favorablement par le milieu des affaires.

« À 90 %, les gens ont toujours des craintes par rapport au changement », a lancé le président-directeur général du CPQ, Yves-Thomas Dorval, alors qu’il était interrogé à la suite de sa présentation, ajoutant que ces craintes étaient « normales », mais qu’il fallait « très rapidement » se montrer rassurant.

La taille d’IQ devrait doubler, accaparant des ressources actuellement éparpillées dans l’appareil gouvernemental, comme les bureaux régionaux du ministère de l’Économie. On mettra sur place un segment international et certaines entités, comme le Centre de recherche industrielle du Québec (le CRIQ), seront avalées par la société d’État.

Des questions entourent également le rôle de Montréal International, dont le président-directeur général Hubert Bolduc a été nommé chez IQ, et de Québec International, qui effectuent entre autres du démarchage à l’étranger.

« Cette gestion du changement, c’est majeur, a dit M. Dorval. C’est la clé du succès. Vous pouvez implanter la plus belle technologie, […] si vous ne vous êtes pas occupés de façon importante de la gestion du changement, […] c’est là où les restructurations provoquent des enjeux négatifs plutôt que positifs. »

La réforme de la société d’État créée en 1998 avant d’avaler la Société générale de financement en 2011 fait en sorte qu’il faudra briser beaucoup de silos pour faciliter la collaboration avec plusieurs structures.

Après avoir présenté cinq recommandations, la présidente-directrice générale de MEQ, Véronique Proulx, a elle aussi abordé la question du changement, estimant qu’il s’agissait d’un aspect important qu’il ne faut pas sous-estimer pour mener à bien la réforme.

« Il faut s’assurer que les entreprises aient accès aux services, que les délais de traitement ne soient pas retardés et qu’il y ait un bon plan de communication pour bien aiguiller et outiller les entreprises pour ne pas qu’elles se perdent pendant la transition, qui pourrait se dérouler sur quelques années. »

Main dans la main ?

Pour sa part, Montréal International, qui voit d’un bon œil la réforme d’IQ, a plaidé pour une collaboration étroite avec la société d’État en matière de démarchage à l’étranger.

Selon son économiste en chef et vice-président communication marketing, Charles Bernard, l’attraction des investissements étrangers est un « sport d’équipe ». Ainsi, le segment international d’IQ devrait se concentrer davantage sur les régions et, par exemple, laisser plus de place à Montréal International et Québec International dans leurs marchés respectifs.

« On a beau avoir les meilleures intentions du monde […] si on veut vraiment que la collaboration fonctionne, il faut des ententes, il faut la provoquer, a dit M. Bernard, en réponse à une question de M. Fitzgibbon. Autrement, cette collaboration va fonctionner selon les affinités des individus en place, ou le manque d’affinité, dans le cas contraire. »

Cela n’a toutefois pas convaincu les porte-parole des trois partis d’opposition, notamment parce que rien ne laisse entendre, dans le projet de loi 27, le maintien de Montréal International.

« J’ai un petit malaise, a dit le porte-parole solidaire en matière d’économie, Vincent Marissal. J’ai l’impression d’être dans une télé-réalité où vous êtes sur un siège éjectable puis vous êtes venu ici pour nous dire de vous sauver parce qu’il n’y a pas, dans le projet de loi, ce qui permettrait d’assurer la pérennité de votre organisme. »

D’autres intervenants, dont l’Union des municipalités du Québec, Fondaction, le Fonds de solidarité FTQ et la Fédération des chambres de commerce du Québec, défileront jusqu’à mercredi prochain.