L'une des plus grosses firmes de gestion de placements dirigées de Montréal, Investissements PSP, participe à une poursuite contre la Norvège lancée par des fonds internationaux qui veulent préserver les revenus d'un réseau de gazoducs maritimes dans lequel ils ont investi des milliards de dollars ces dernières années.

Cette poursuite, dont l'issue pourrait, selon certains, compromettre de prochains investissements gaziers en mer du Nord, au large de la Norvège, a été inscrite officiellement hier par les coactionnaires de la société Gassled, qui gère les gazoducs.

Ils contestent la décision annoncée l'an dernier par le gouvernement norvégien de réduire considérablement - jusqu'à 90% à partir de 2016 - les futurs tarifs du transport de gaz naturel par Gassled. Ce réseau de 7970 kilomètres de conduits est l'un des plus complexes au monde, alimentant jusqu'à 20% du gaz naturel consommé dans l'Union européenne.

Les coactionnaires de Gassled, dont la montréalaise PSP, craignent que cette décision tarifaire leur coûte des milliards de dollars en manque à gagner à long terme et, du coup, qu'elle réduise considérablement le rendement attendu de leurs investissements.

Contre les règles

Pour contester cette décision, les coactionnaires de Gassled prétendent dans leur poursuite qu'elle aurait été prise de façon unilatérale par le gouvernement norvégien, en infraction des règles et des processus réglementaires qu'il a lui-même établis afin de régir de telles révisions tarifaires.

C'est aussi le principal argument du point de vue de la firme PSP, qui a investi l'équivalent de 600 millions de dollars à la fin de 2011 pour acquérir la part de 5% de Gassled qui était détenue par la pétrolière Shell.

«Comme dans tous nos investissements en infrastructures, nous évaluons toujours le risque réglementaire dans le pays ou la juridiction où nous effectuons ces investissements. En Norvège, autant nous chez PSP que nos partenaires au capital de Gassled n'avions eu la moindre indication qu'un changement [tarifaire] de cette ampleur pouvait survenir. Et surtout, hors des règles connues et établies», a commenté Mark Boutet, vice-président aux communications chez Investissements PSP.

Un placement sûr?

Établie à Montréal, avec ses 470 employés, PSP est l'un des plus gros gestionnaires d'actifs de caisses de retraite au Canada. Il gère quelque 86 milliards (au 1er décembre 2013) provenant de 4 régimes de retraite des employés fédéraux: fonction publique, Gendarmerie royale du Canada, Défense nationale et Forces de réserve.

En Norvège, l'investissement de PSP pour 5% de Gassled en 2011 s'inscrivait alors dans sa constitution d'un portefeuille de placements en infrastructures dans le but, notamment, d'en obtenir un rendement prévisible et régulier à long terme. Cette participation chez Gassled est aujourd'hui l'un des plus gros placements privés de PSP en infrastructures d'énergie.

Le rendement prévisible à long terme était aussi attendu par les principaux vis-à-vis de PSP au capital de Gassled, dont le fonds souverain d'Abu Dhabi, l'Office d'investissement du Régime de pension du Canada (RPC), la Caisse des dépôts et consignations de France ainsi que les géants financiers européens UBS et Allianz.

D'ailleurs, depuis l'émergence de la dispute en Norvège l'an dernier, des dirigeants de ces grandes sociétés d'investissement ont fait état d'un risque pour ce pays scandinave d'entacher gravement sa réputation d'affaires dans le marché mondial du placement et de l'énergie.