La semaine qui s'achève par la folle ruée des consommateurs américains dans les magasins pour les promotions du Black Friday aura été avant tout marquée par une aggravation inquiétante de la crise fiscale aux États-Unis et surtout en Europe.

Hier, l'Italie a dû consentir un taux de 6,5% pour lever 8 milliards d'euros durant six mois. En octobre, les prêteurs exigeaient 4,62%.

Les taux que doit consentir la Péninsule pour les échéances plus longues sont insoutenables à terme: 7,82% pour deux ans, 7,34% pour 10. L'Italie doit renouveler plus de 320 milliards d'euros de sa dette l'an prochain, dont 200 au premier trimestre.

Certaines agences de notation qualifient désormais de spéculative la valeur du crédit du Portugal (Fitch) et de la Hongrie (Moody's). Cette dernière a dû demander de nouveau l'aide du Fonds monétaire international devant la rapide dépréciation de sa monnaie, le forint, qui alourdit sa dette contractée en euros en grande part. Elle l'avait appelé au secours une première fois en 2008.

L'Allemagne a semé tout un émoi mercredi en parvenant à écouler seulement 3,64 milliards d'euros sur 6 milliards d'une nouvelle souche d'obligations de 10 ans. Une fois refroidis les esprits, certains ont attribué l'insuccès de l'enchère à la nouveauté de l'obligation. Pour la première fois, son coupon était inférieur à 2%, reflétant la valeur des bunds sur le marché secondaire. L'échec montre néanmoins que toute la zone euro est désormais touchée par la crise de la dette publique.

Les tractations politiques se multiplient en vue de dénouer l'impasse. En début de semaine, le président de la Commission européenne, le Portugais Jose Manuel Barosso, a évoqué la probabilité d'émettre des euro-obligations. Cela permettrait aux 17 États membres de la zone à se financer à des taux soutenables.

Rebuffade immédiate de la chancelière allemande Angela Merkel pour qui toute solution passe par l'amendement des traités de l'Union pour converger vers une union et une discipline fiscales accrues de tous les États membres.

C'était avant mercredi, bien sûr. Jeudi, sa rencontre à Strasbourg avec Nicolas Sarkozy et Mario Monti aura permis de clarifier deux choses.

Uno, l'euro ne pourrait survivre à un défaut de l'Italie dont la dette est trop lourde pour être absorbée par le Fonds européen de stabilité financière (FESF). D'autant plus que sa cagnotte de 440 milliards d'euros repose en partie sur la contribution italienne, troisième économie de la zone.

Deuxio, la Banque centrale européenne (BCE) n'actionnera pas la planche à billets pour monétiser la dette des pays en difficultés, comme le souhaitait encore la France la semaine dernière, malgré l'opposition obstinée de l'Allemagne, la Finlande et les Pays-Bas.

Mais comment empêcher l'Italie de faire défaut avec des conséquences très dangereuses pour l'économie mondiale?

Les intervenants des marchés n'y croient plus sans que la BCE joue, à la manière de la Fed ou de la Bank of England, un rôle de prêteur de dernier ressort aux États, comme elle l'est depuis l'été pour les banques européennes. Elles lui larguent leurs paquets d'obligations souveraines des pays en difficultés en échange d'euros qu'elles ne peuvent plus trouver ailleurs.

Acheter de la nouvelle dette publique est cependant contraire à sa constitution.

Les chefs d'État des 17 tiendront aussi un sommet le 9 décembre, dans deux semaines!

D'ici là, la nervosité des investisseurs et spéculateurs ira grandissante alors que la Belgique, la France, l'Italie et l'Espagne doivent emprunter la semaine prochaine.

La classe politique devra multiplier les indications de sur quoi elle planche: modifications de traités suffisante et prochaine pour assouplir l'Allemagne et faciliter l'émission d'euro-obligations, rôle accru, mais circonscrit de la BCE?

D'une façon ou d'une autre, l'Allemagne devra jeter du lest. Elle est désormais touchée et le sera davantage quand elle goûtera à son tour aux morsures de la récession.

De ce côté-ci de l'Atlantique, l'incapacité du super-comité du Sénat américain à dégager une réduction de 1200 milliards du déficit américain sur 10 ans reste mal jaugée. Elle amputera 0,7 point de pourcentage à la croissance de 2012 et encore autant en 2013.

De quoi replonger les États-Unis en récession, comme si la contraction européenne ne suffisait pas!

Forcément, le Canada sera secoué par de tels chocs extérieurs. Par bonheur, il lui reste quelques munitions. Ses banques regorgent de liquidités. La Banque du Canada peut encore abaisser son taux directeur, si nécessaire. Les finances publiques sont, somme toute, enviables.

Qu'il était réconfortant d'apprendre hier que déficit fédéral s'élevait à 13,2 milliards après six mois, soit 4,2 milliards de moins que durant la même période l'an dernier. La cible de 31 milliards reste atteignable, même avec un net ralentissement prévisible!