Les ministres des Finances de la zone euro ont indiqué samedi à Bruxelles que les créanciers privés de la Grèce pourraient bien devoir accepter une décote pouvant aller jusqu'à 60% sur leurs titres souverains afin que la dette grecque redevienne soutenable, à environ 110% du PIB. Face à cette perspective, ils étaient proches d'un accord sur une recapitalisation des banques à hauteur de 100 milliards d'euros (139 milliards $), afin de faire face à ces pertes.

L'accord sur la recapitalisation des banques devrait être signé dimanche lors du sommet européen de dimanche à Bruxelles, a-t-on indiqué de source européenne. Il contraindrait les grandes banques européennes à augmenter leur ratio de fonds propres à 9%, contre les 5 à 6% exigés pour passer avec succès les tests de résistance («stress tests») l'été dernier.

Le chiffre de 100 milliards d'euros devrait toutefois être insuffisant pour nombre d'analystes. Dans un rapport, le Fonds monétaire international (FMI) préconise en effet une recapitalisation jusqu'à 200 milliards d'euros (279 $ milliards).

Face à l'ampleur de la crise grecque et aux menaces sur d'autres pays de la zone euro, les créanciers privés, parmi lesquels les banques, devraient donc commencer par accepter une décote allant jusqu'à 60 % sur leurs titres souverains afin de ramener la dette d'Athènes à environ 110 % du PIB.

«Nous nous sommes mis d'accord (vendredi) pour dire que nous devions avoir une augmentation substantielle de la contribution des banques» au sauvetage de la Grèce, a déclaré samedi à la presse le Premier ministre luxembourgeois Jean-Claude Juncker, par ailleurs président de l'Eurogroupe. Lors du sommet européen de juillet, l'objectif de décote avait été fixé à 21 %.

Reste aux argentiers européens à aplanir leurs différends sur le caractère volontaire ou non d'une telle participation des investisseurs privés à un nouveau plan de sauvetage. La ministre autrichienne des Finances, Maria Fekter, a indiqué à la presse que le négociateur européen Vittorio Grilli, directeur général du Trésor italien et président de la Commission économique et financière (EFC) de la zone euro, avait reçu pour mandat de reprendre langue avec les banques.

La tâche s'annonce compliquée, Charles Dallara, directeur de l'Institut de la finance internationale (Ifi), impliqué depuis des mois dans les négociations sur la dette grecque, ayant prévenu samedi que les conditions imposées aux banques n'étaient pas satisfaisantes en l'état. «Nous sommes loin d'un accord», a-t-il déclaré à l'Associated Press, plaidant pour «une approche qui prévoie des efforts supplémentaires de la part de chacun».

Cette contribution supplémentaire des créanciers privés a été mise en avant vendredi dans un rapport de la troïka (Commission européenne, Banque centrale européenne, FMI) qui indique que la situation de l'économie grecque s'est encore aggravée depuis l'été.

Selon le document, si les banques n'acceptent pas une plus forte décote, la dette grecque s'établira à 186 % de son PIB en 2013 et ne redescendra qu'à 152 % en 2020. La Grèce ne pourrait alors pas emprunter sur les marchés avant 2021, contraignant la zone euro et le FMI à lui accorder 252 milliards d'euros (352 milliards $) de prêts supplémentaires jusqu'en 2020.

Malgré les avancées annoncées samedi, les pays de la zone euro n'avaient toutefois toujours pas trouvé d'accord sur le renforcement du Fonds européen de stabilité financière (FESF), actuellement doté de 440 milliards d'euros (615 milliards). Cette mesure est présentée par nombre d'observateurs comme capitale pour rassurer les marchés sur la capacité de la zone euro à empêcher que certaines de ses économies fragilisées, comme l'Espagne ou l'Italie, ne connaissent le même sort que la Grèce.

Ce renforcement, défendu par la France, est toujours rejeté par l'Allemagne. Il devait être au menu des discussions entre le président Nicolas Sarkozy et la chancelière Angela Merkel, qui devaient se retrouver ce samedi soir à Bruxelles pour une réunion préparatoire au sommet de dimanche.