Davantage de recours pour les petits actionnaires, une simplification des procédures, des moyens plus modernes: Québec a procédé à une grande réforme de sa Loi sur les compagnies, inchangée depuis près de 30 ans.

«C'est une actualisation de la loi du XXe siècle qui la modernise au niveau du XXIe siècle, dit Me Charles Denis, avocat chez Réso Gestion Corporative. Le droit a évolué, les entreprises ont évolué, le vote de l'assemblée a changé. On a voulu niveler avec les autres provinces et amener plus de souplesse.»

Le projet de loi, qui prendra maintenant le nom de Loi sur les sociétés par actions, a été adopté par l'Assemblée nationale lundi.

Il n'entrera en vigueur qu'en 2011, question de laisser le temps au Registraire des entreprises de mettre à jour le nouveau système, notamment.

La majorité des 300 000 PME enregistrées au Québec seront alors automatiquement soumises à la nouvelle législation.

La loi prévoit entre autres une plus grande protection pour les actionnaires minoritaires.

«Avant, on n'avait pas de régime détaillé qui donnait des recours à des petits actionnaires qui se seraient sentis floués, explique Me André Vautour, associé chez Lavery. Maintenant, on a un régime clair en cas d'abus.»

La loi québécoise va même plus loin que la Loi canadienne sur les sociétés par actions en introduisant la notion de «risque» d'abus ou d'injustice, qui a soulevé quelques réserves.

«Personnellement, je pense que la nuance est ténue. C'est plus théorique qu'autre chose, souligne Me Vautour. Les tribunaux ne vont pas se mêler de gestion.»

Si les recours contre les abus sont prévus dans la loi fédérale et dans celles d'autres provinces, les cas qui se retrouvent devant les tribunaux restent relativement rares, estime Me Vautour. «En sachant que les recours existent, ça devrait garder les actionnaires majoritaires plus honnêtes», ajoute-t-il.

Malgré tout, une plus grande protection des petits actionnaires n'éliminera pas complètement les risques de voir se répéter les scandales financiers. Les actionnaires doivent continuer à faire leurs devoirs, rappelle Me Vautour.

Droit à la dissidence

Un autre grand changement pour les actionnaires minoritaires concerne le droit à la dissidence.

En cas de changement important d'activités au sein d'une société, tout actionnaire pourra exiger le rachat de ses actions s'il est en désaccord avec la décision.

Il sera aussi possible pour tout actionnaire de discuter au cours d'une assemblée annuelle d'une proposition soumise au conseil d'administration, pour les sociétés de 50 actionnaires ou plus.

«La nouvelle loi fait que les actionnaires auront un rôle plus actif, moins passif», précise Me Denis.

Québec souhaite également favoriser l'incorporation des entreprises au provincial, puisqu'un grand nombre d'entre elles s'enregistrent au fédéral, où la loi a été réformée en 2001.

«L'objectif de la loi est de la rendre plus attrayante, d'avoir plus de compagnies enregistrées au provincial», dit Me Martine Guimond, associée chez Gowlings.

Outre la possibilité de recours, la loi provinciale reprend beaucoup de notions déjà en vigueur dans la loi fédérale.

Elle maintient cependant une notion qui pourrait attirer les filiales étrangères à s'enregistrer à Québec plutôt qu'à Ottawa: l'absence d'exigence de résidence canadienne des administrateurs.

La loi a aussi pour but d'alléger et de moderniser les procédures. Ainsi, un actionnaire unique ne se verra plus dans l'obligation de tenir une assemblée annuelle ou de désigner un vérificateur. Les votes à distance et les dépôts en ligne seront aussi rendus possibles.