Tout, absolument tout dans la vie de la famille Jones était payé avec l'argent des clients: vêtements, électroménagers, croisière, condos, réceptions de mariage, entretien paysager, etc. La femme d'Earl Jones, Maxine, plaide toutefois l'innocence, affirmant qu'elle n'en savait rien.

Ces renseignements sont tirés de l'interrogatoire de Maxine Jones par Neil Stein, l'avocat qui représente le syndic de faillite RSM Richter. L'interrogatoire hors cour a été tenu le 9 novembre, mais sa transcription a été rendue publique mardi après-midi. Maxine Jones était la cinquième personne interrogée par Neil Stein pour faire la lumière sur cette affaire.

> Exemples de dépenses de la famille Jones (fichier excel)

Rappelons que plus de 150 clients d'Earl Jones allèguent avoir perdu 75 millions de dollars. Ces clients étaient pour la plupart des familles de successions testamentaires.

En tant que femme au foyer, Maxine Jones affirme qu'elle s'occupait de payer les dépenses mensuelles du couple. Chaque fin de mois depuis 1994, elle dressait une liste des dépenses et son mari, Earl Jones, lui faisait un chèque pour la somme demandée.

Les chèques étaient tirés du compte Earl Jones in Trust, celui-là même où était déposé l'argent des victimes.

Ces chèques faits à son nom variaient de 10 000$ à 35 000$ par mois. Ils servaient à acquitter les paiements hypothécaires, les factures de téléphone et de gaz naturel, les impôts fonciers, les assurances et tout le reste.

Avant l'éclatement du scandale, en juin dernier, Maxine Jones ne s'était jamais interrogée sur la provenance des fonds, même si les chèques portaient l'en-tête «Earl Jones in Trust».

La femme de M. Jones, qui n'a qu'un diplôme du secondaire, ne s'interrogeait guère plus sur les états de compte mensuels qu'elle recevait de la Banque des Bermudes. À ce sujet, Earl Jones lui avait dit qu'il s'agissait de fonds virés par un de ses clients. Dans les derniers mois, elle se rappelle y avoir vu 6000$.

«Je ne posais aucune question. Il s'occupait de tout l'argent. Je ne posais aucune question», dit-elle.

«Est-il possible que vous ne vouliez pas savoir?» lui a demandé Neil Stein.

«Non. J'avais plusieurs autres choses qui occupaient mon esprit avec mes enfants. Tant que j'étais en mesure de payer certaines factures, je le faisais», répond-elle.

Maxine Jones ne déclarait pratiquement pas de revenus à l'impôt, étant sans emploi. Ses déclarations étaient transmises au fisc, mais elle ne se rappelle pas les avoir signées. Elle ne se rappelle pas non plus de la liste des actifs familiaux, une liste qu'elle a pourtant retrouvée dans ses documents et transmise à Neil Stein par l'entremise de son avocat.

Maxine Jones n'avait guère plus de souvenirs des sommes mensuelles réclamées à son mari pour les dépenses courantes avant que Neil Stein lui montre les chèques.

Certaines de ses dépenses étaient payées avec des cartes de crédit de la Banque Royale, d'American Express ou des magasins chics Ogilvy ou Holt Renfrew.

Neil Stein lui a demandé des précisions sur des chèques faits au nom de tiers pour des dépenses familiales. Il s'agissait toujours d'argent tiré du compte «in Trust» des clients.

Parmi ces chèques, mentionnons ceux visant l'acquisition et la rénovation des condos de Mont-Trembant, de Dorval et de Floride (plus de 200 000$) et ceux pour les frais annuels pour le condo adapté de sa fille handicapée (24 000$ par année).

Mentionnons également l'abonnement annuel à un club de golf floridien de Boca Raton (environ 4100$US), l'arrosage de la pelouse (2177$), l'achat de meubles et d'électroménagers (9357$) et l'achat de billets de saison pour le Canadien.

Le syndic RSM Richter a également retracé la location d'un service de limousine et l'achat de divers billets d'avion vers les États-Unis.

Maxine Jones dit n'avoir pas eu de réel problème de paiement des comptes avant juin dernier, au moment où le scandale a éclaté. En outre, elle affirme qu'elle n'a su qu'en juin que son mari avait monnayé les polices d'assurance du couple six mois plus tôt, même la police à son nom.

Avant l'interrogatoire, son avocat, Leonard Kliger, a indiqué que Maxine Jones avait besoin d'aide médicale, au dire de sa famille, étant donné le traumatisme vécu. Au moment de l'interrogatoire, elle n'était toutefois pas sous supervision médicale.