Une société montréalaise a mis au point un logiciel de détection automatique des mammifères marins à partir d’images aériennes, satellites et de bateaux. Une nouvelle étude valide son approche.

« Pêches et Océans nous a donné un gros contrat d’examen de 100 000 images aériennes en Arctique », dit Emily Charry Tissier, PDG de Whale Seeker. « Nous regardons tous les mammifères marins, mais notre étude porte sur les bélugas dans 5334 images. »

Publiée dans Frontiers in Marine Science, l’étude conclut que le taux de succès de l’algorithme d’IA est légèrement supérieur à celui des humains. Le taux de succès est défini comme l’accord entre la détection d’animaux par l’IA et la détection par des observateurs humains.

« Nous avons eu l’idée du projet en 2018, explique Mme Charry Tissier. Bertrand Charry et moi sommes tous les deux biologistes. Nous avons eu un contrat de WWF pour détecter des narvals dans des images aériennes. Il y avait beaucoup de différences entre la détection que chacun de nous faisait. Nous avons vu le besoin de standardiser la détection des mammifères marins à partir des images. »

PHOTO FOURNIE PAR WHALE SEEKER

Bertrand Charry, Antoine Gagné Turcotte et Emily Charry Tissier, de la société montréalaise Whale Seeker

Le troisième cofondateur, Antoine Gagné Turcotte, était alors programmeur dans une grande entreprise. « Je cherchais un autre emploi, qui ferait davantage de place à des valeurs, dit M. Gagné Turcotte. En parlant avec Emily au parc à chiens Père-Marquette, on a décidé de lancer l’entreprise. »

Le nom est en anglais parce que le marché de cette technologie est mondial.

Beaucoup de sociétés s’intéressent à notre produit. Ça peut aider à faire les études d’impact environnemental avant un projet minier ou d’infrastructure.

Emily Charry Tissier, PDG de Whale Seeker

Concurrence

Y a-t-il des concurrents dans le domaine ? « Il y a des chercheurs qui font appel à l’IA pour la détection de mammifères marins, mais ils utilisent des logiciels open source. On ne sait pas ce qu’il y a dans la boîte du logiciel, notamment s’il est entraîné par des experts. »

L’entraînement d’un logiciel d’IA est une étape cruciale. Dans le cas de l’étude, le logiciel de Whale Seeker a été entraîné avec 100 images où des experts humains ont désigné des bélugas.

Pour le moment, les résultats du logiciel d’IA sont validés par des humains. Le logiciel leur demande aussi de l’aide pour les photos où il est difficile d’identifier des mammifères marins. « Je pense que d’ici un ou deux ans, on pourra limiter l’implication des humains aux cas difficiles et aux vérifications aléatoires », dit M. Gagné Turcotte.

Satellites

Les images pourront provenir de satellites, de stations au sol ou de navires. « Avec les satellites, il y a une limitation de résolution, alors il est plus difficile de distinguer une espèce d’une autre, dit Mme Charry Tissier. À bord des navires, on va utiliser des détections infrarouges du souffle des mammifères marins. »

Pourquoi ne pas utiliser un sonar ? « On se spécialise dans la détection passive, dit Mme Charry Tissier. Un sonar crée du bruit, on trouve qu’il y en a déjà beaucoup dans l’océan. »

L’utilisation de drones pourrait permettre une surveillance en temps réel dans les zones maritimes importantes sur le plan commercial. « On pourrait par exemple fermer et ouvrir les zones de pêche de manière plus dynamique, pour limiter au minimum les interdictions », dit Mme Charry Tissier.

En savoir plus
  • 900
    Nombre de bélugas dans l’estuaire
    du Saint-Laurent
    Source : Pêches et Océans Canada