(Montréal) D’abord encouragé par la volonté exprimée du ministre de la Santé « d’entendre l’ensemble (des) partenaires, ainsi que les gens du terrain », le regroupement des Médecins québécois pour le régime public (MQRP) se dit maintenant consterné de ne pas avoir été invité aux consultations sur le projet de loi 15.

Dans un communiqué transmis jeudi, le regroupement fondé en 2005 soutient avoir été « de toutes les discussions importantes sur l’organisation des soins de santé » depuis plus d’une décennie. Or, malgré « plusieurs demandes par les canaux officiels de la commission » ainsi que des sorties publiques, aucune invitation ne lui a été transmise pour aller échanger avec les élus afin de bonifier la future « Loi visant à rendre le système de santé et de services sociaux plus efficace ».

La Presse Canadienne a pu confirmer que deux des trois partis d’opposition à l’Assemblée nationale avaient demandé à la commission d’inviter le regroupement. Québec solidaire dit même avoir proposé à nouveau d’accueillir le MQRP à la suite du désistement d’un autre intervenant.

Sur Twitter, le porte-parole du Parti québécois en matière de santé, Joël Arseneau, déplore l’absence de ces médecins et jette le blâme sur le ministre Christian Dubé qui aurait « choisi de les écarter ».

Les libéraux n’avaient pas inscrit le regroupement sur leur liste initiale, mais soutiennent avoir appuyé la demande de participation.

Au cabinet de Christian Dubé, on souligne que les invitations à la consultation ont été déterminées au terme d’un processus de négociation entre les leaders des quatre partis représentés à l’Assemblée nationale.

Le ministre laisse tout de même planer la possibilité d’une voie parallèle. « Nous allons prendre le temps de lire le mémoire de ce regroupement, comme tous les mémoires de ceux qui n’ont pu être reçus en commission. Il nous fera aussi plaisir de les rencontrer afin d’entendre leurs idées », peut-on lire dans la déclaration transmise par son cabinet.

Ce sont des centaines de médecins et d’étudiants en médecine qui sont membres du MQRP. Comme le dit le nom du regroupement, c’est principalement la défense du caractère public du réseau qui interpelle ces professionnels de la santé.

Ils estiment que « le choix incontestable […] de faire plus de place au privé en santé » aura des impacts profonds et durables sur le réseau. Ces médecins souhaitent donc pouvoir être accueillis en personne pour débattre de ce qu’ils considèrent comme « un enjeu fondamental » de la société québécoise.

À la suite de la sortie publique le mois dernier d’un vaste collectif d’organismes communautaires nommé « Riposte au Plan santé », dont le regroupement MQRP fait partie, le cabinet du ministre Christian Dubé avait dit tendre la main à la coalition et l’avait invitée à se faire entendre dans le cadre des consultations. Il semble toutefois que la portée de cette invitation ne se limite qu’au dépôt d’un mémoire.

Comme tout autre citoyen peut le faire, le regroupement va soumettre un mémoire par écrit, mais l’impact n’est pas le même aux yeux de la Dre Camille Pelletier Vernooy.

« Par expérience, le grand avantage (d’être présent) c’est qu’on peut discuter. On peut poser des questions et répondre aux questions non seulement du ministre, mais aussi des autres partis politiques par rapport à la privatisation des soins de santé que l’on voit au Québec », explique celle qui siège au conseil d’administration de MQRP.

La Dre Pelletier Vernooy ajoute que les membres de son groupe sont d’abord « des cliniciens sur le terrain » qui sont bien placés pour témoigner « des impacts immenses à long terme » d’une place de plus en plus grande accordée au privé en santé.

« Les études, les données, les exemples dans les autres provinces canadiennes nous ont montré que ce n’est pas des impacts positifs », précise-t-elle en énumérant l’accès aux soins, l’équité et l’exode de la main-d’œuvre.

Le projet de loi 15 vise notamment la création de l’agence Santé Québec, une société d’État qui aura le mandat de superviser les opérations de l’ensemble du réseau de la santé alors que le ministère conservera le rôle de déterminer les orientations et les budgets.

Les consultations particulières sur le projet de loi, menées par la Commission de la santé et des services sociaux, doivent reprendre mardi, mercredi et jeudi prochains. Des ordres professionnels et des syndicats vont alors défiler devant les élus. Au total, ce sont 38 groupes qui auront été entendus.

Le contenu en santé de La Presse Canadienne obtient du financement grâce à un partenariat avec l’Association médicale canadienne. La Presse Canadienne est l’unique responsable des choix éditoriaux.