Bien reçue par certains, critiquée par d’autres. La cellule de crise mise sur pied jeudi par le ministre Christian Dubé pour tenter de soulager la congestion dans les urgences du Grand Montréal suscite l’espoir chez les urgentologues. Mais pour les partis de l’opposition, plus sceptiques, il pourrait s’agir d’un simple « écran de fumée ».

Lors de cette première journée de rencontres, « des PDG, des experts des urgences et de la première ligne ont été mobilisés », a déclaré le cabinet du ministre Christian Dubé. La composition de ce groupe évoluera au fil des prochains jours.

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Christian Dubé, ministre de la Santé

Cette cellule, qui couvre le Grand Montréal, vise à réduire la pression sur les 25 urgences les plus problématiques. Pour y arriver, « toutes les solutions sont sur la table », a indiqué le ministre de la Santé, qui s’est rendu jeudi matin au CHU Sainte-Justine en compagnie d’une membre de la cellule de crise, la Dre Lucie Opartny.

À court terme, la cellule de crise souhaite notamment améliorer la fluidité hospitalière et le triage, « mais surtout améliorer [la] première ligne afin que les gens ne se rendent pas à l’urgence », a indiqué le cabinet.

Mercredi, La Presse rapportait que le personnel de santé n’arrivait plus à s’occuper de tous les patients dans les urgences. Le fort achalandage entraîne de lourdes conséquences telles que des crises cardiaques traitées trop tard ou des patients retournés à la maison malgré un lourd diagnostic.

Lisez l’article « On n’est plus capables de s’occuper de tous les patients »

Des réactions mitigées

« On est très heureux de la création de cette cellule et de voir que la ministre veut impliquer les PDG et les hauts gestionnaires. Ça nous donne espoir », dit le président de l’Association des spécialistes en médecine d’urgence du Québec, le DGilbert Boucher.

En mettant en place la cellule de crise, on reconnaît qu’il y a un problème, on reconnaît que ça peut être dangereux pour la population et on va tenter de trouver des solutions.

Le DGilbert Boucher, président de l’Association des spécialistes en médecine d’urgence du Québec

Le comité se concentrera sur la région de Montréal et ses couronnes, où la situation « est beaucoup plus problématique », dit-il. Le DBoucher est toutefois conscient que la situation est problématique ailleurs, notamment à Sherbrooke, à Gatineau et à Québec.

« S’attaquer à la province au complet, en ce moment, ce n’est pas réaliste. Chaque établissement a des problèmes qui lui sont propres. Il faut commencer quelque part, puis commencer par Montréal est peut-être la meilleure manière de fonctionner », dit-il.

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Le DGilbert Boucher, président de l’Association des spécialistes en médecine d’urgence du Québec

Le spécialiste, qui est impatient de savoir quelles mesures seront mises en place par le comité, craint toutefois que le manque de ressources humaines ne limite les interventions possibles. « Il y a plusieurs années, quand les urgences étaient pleines, on achetait 150 lits ou un hôtel. Maintenant, on ne peut plus acheter plus de ressources. Il faudra mieux répartir la charge de travail, être plus efficace et accélérer les processus », dit-il.

« Un écran de fumée »

Pour le député de Rosemont et critique en matière de santé pour Québec solidaire, Vincent Marissal, ce comité est un « nouvel écran de fumée ». « Le réseau de la santé est une cellule de crise permanente depuis des années. Ça fait des mois qu’on voit ça venir », déplore-t-il en entrevue avec La Presse.

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Vincent Marissal, critique en matière de santé pour Québec solidaire

Le député a demandé au ministre Christian Dubé une rencontre hebdomadaire avec des élus de l’opposition pour suivre l’état de la situation. « On a une vraie de vraie urgence. Les urgences au Québec sont souvent encombrées, mais de ce niveau-là, c’est du presque jamais vu. Dans l’immédiat, je lui demande de convoquer les partis de l’opposition pour entendre où est-ce qu’il en est et pouvoir lui soumettre quelques suggestions », dit-il.

Pour la cheffe du Parti libéral, Dominique Anglade, la cellule de crise « devra faire ses preuves rapidement ». « Il demeure essentiel de garantir un meilleur accès à la première ligne et de meilleures conditions de travail notamment en mettant en place les projets-ratios et en abolissant le travail supplémentaire obligatoire », a-t-elle déclaré.

Le député des Îles-de-la-Madeleine et porte-parole du Parti québécois en matière de santé, Joël Arseneau, juge quant à lui que l’annonce d’une cellule de crise pour Montréal paraît « improvisée, insuffisante et surtout incomplète dans sa composition », a-t-il déclaré par voie de communiqué.

Son parti demande plutôt de créer une cellule de crise pour tout le Québec, « qui regroupera non seulement des gestionnaires du réseau, mais des experts indépendants, des urgentistes et surtout les syndicats et du personnel de terrain ».

En savoir plus
  • 123 %
    Moyenne du taux d’occupation des urgences du Québec dans la dernière semaine
    Source : Indicateurs de performance du réseau de la santé et des services sociaux
  • 10 300
    Nombre de personnes qui se sont présentées aux urgences au Québec dans la dernière semaine
    Source : Indicateurs de performance du réseau de la santé et des services sociaux