La région de Montréal s’est fait retirer l’an dernier 30 postes de médecins de famille. Une décision « tout à fait arbitraire », selon le président de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec (FMOQ), le DMarc-André Amyot, qui s’inquiète de « la pénurie d’omnipraticiens qui touche la province ».

« Le ministre, il aime ça, les données […] Mais le fait de couper 30 PREM à Montréal, ça, ce n’était pas appuyé sur des données. C’était appuyé sur des données si vous regardez la couleur de la carte électorale », a déclaré vendredi le DAmyot.

Ce dernier a tenu ces propos alors que les principaux intervenants du réseau de la santé du Québec étaient réunis à Montréal pour un congrès sur la première ligne en santé.

Un peu avant le DAmyot, le ministre de la Santé et des Services sociaux, Christian Dubé, a indiqué que la « décision difficile » de retirer des médecins de famille à Montréal était justifiée par les grands besoins dans les couronnes : « On savait qu’on devait aller vers le 450, car il en manquait plus là. Ça ne veut pas dire qu’il n’en manque pas à Montréal. »

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Christian Dubé, ministre de la Santé et des Services sociaux

Postes vacants

Selon le DAmyot, il manque environ 1400 omnipraticiens au Québec. Et jeudi, le CARMS, organisme qui jumelle les futurs médecins résidents en fonction des différents postes de spécialité dans le pays, a annoncé qu’il y aurait cette année 65 postes vacants en médecine de famille dans la province. « C’est deux fois plus que tout le reste du Canada confondu […] On a un enjeu important d’attractivité », déplore le président de la FMOQ.

Le ministre Christian Dubé a reconnu que dans certaines régions, comme les Laurentides, « l’écart entre les besoins et ce qui est offert est inacceptable ». Mais il croit tout de même qu’il faut obtenir plus de données en lien avec le manque d’omnipraticiens. M. Dubé affirme que le projet de loi 11 lui permettra d’« avoir des faits sur le nombre de médecins par région » et d’ajuster les postes en conséquence.

Sous-ministre adjointe à la Santé, la Dre Lucie Opatrny a reconnu que le réseau de la santé avait « clairement un problème de capacité », mais elle croit elle aussi que plus de données sont nécessaires. La Dre Opatrny estime toutefois que « les astres sont alignés » pour que les soins de première ligne s’améliorent au Québec.

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La Dre Lucie Opatrny, sous-ministre adjointe à la Santé

Je vois des gens mobilisés et motivés.

La Dre Lucie Opatrny, sous-ministre adjointe à la Santé

M. Dubé a annoncé qu’il publierait la semaine prochaine une quinzaine d’indicateurs sur le système de santé. Il a laissé entendre que ces résultats ne seraient pas nécessairement tous reluisants. Mais il affirme justement que c’est « le bon temps de les publier » pour permettre au réseau de s’améliorer.

S’il estime que « la cabane brûle actuellement », le DAmyot veut y mettre du sien et croit que « les médecins de famille doivent faire partie de la solution ». Parmi les pistes étudiées actuellement par la FMOQ : la possibilité pour un groupe de médecins de famille de faire des inscriptions collectives de patients et d’être rémunérés en conséquence. Le DAmyot a tout de même soulevé la question de l’écart de rémunération entre les médecins spécialistes et les omnipraticiens au Québec. « Si le différentiel de rémunération était de 20 % supérieur en médecine familiale par rapport aux spécialistes, pensez-vous vraiment qu’on aurait 460 postes de résidences de non comblés depuis 2013 ? Ben non ! Il va falloir se dire les vraies affaires. »

Pépins avec les guichets d’accès en première ligne

Parmi les solutions pour améliorer l’accès aux soins de première ligne au Québec, le ministre de la Santé déploie actuellement des guichets d’accès en première ligne (GAP). Jeudi, La Presse a rapporté que des problèmes dans le déploiement d’un autre projet informatique, le HUB, nuisaient actuellement à celui des GAP dans certaines régions du Québec. Aussi appelé l’« orchestrateur », le HUB vise à faciliter la prise de rendez-vous.

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Qualifiant le projet de HUB de « révolution dans la prise de rendez-vous », M. Dubé a invité la population à « regarder au-dessus de la montagne ». Il a affirmé que les pépins rencontrés étaient « normaux ».

Le ministre a donné l’exemple de la plateforme de prise de rendez-vous en vaccination Clic Santé, qui a éprouvé des problèmes à ses débuts, mais s’est finalement avérée être « un succès ». « Il y a des choses difficiles […] Mais le projet avance très bien », a-t-il dit.

En chiffres

Nombre d’omnipraticiens au Québec : 9772 (47 %)

Nombre de médecins spécialistes : 10 899 (53 %)

Nombre de médecins de famille pour 100 000 habitants

Québec : 78

Reste du Canada : 95

Source : ministère de la Santé et des Services sociaux