Lors de la dernière campagne électorale, quatre jours avant le vote, le gouvernement Charest a assuré par écrit à une association de centres de la petite enfance que la structure actuelle du réseau des garderies sera maintenue. Il est revenu sur sa parole après avoir été reporté au pouvoir.

L'affaire a débuté le 24 novembre, au beau milieu de la campagne, lorsque le gouvernement Charest a décidé de ne pas porter en appel le jugement Grenier et de permettre la syndicalisation des responsables des garderies en milieu familial.

Le 1er décembre, le ministère de la Famille a présenté différents scénarios à l'Association québécoise des centres de la petite enfance (AQCPE) en vue de respecter cette décision. Ces scénarios impliquaient une révision de la structure actuelle du réseau des garderies.

Depuis décembre 2005, en vertu d'une loi adoptée sous le bâillon, la gestion des garderies en milieu familial est sous la responsabilité d'une centaine de centres de la petite enfance qui sont devenus des bureaux coordonnateurs.

Furieuse de constater de nouveaux bouleversements à l'horizon, la présidente de l'AQCPE, Johanne Roy, a envoyé, le 4 décembre, une lettre à la ministre de la Famille d'alors, Michelle Courchesne, pour lui demander de préserver la structure actuelle.

Le jour même, donc quatre jours avant le scrutin, Michelle Courchesne a tenu à rassurer les CPE. Elle a répondu à Mme Roy par écrit. «Je tiens à vous assurer qu'il n'a jamais été dans mes intentions de bouleverser (...) la structure actuelle de la gestion de la garde en milieu familial. Dans toutes les solutions administratives qui seront mises de l'avant, j'entends privilégier la structure des CPE-Bureaux coordonnateurs », dit-elle dans une lettre dont La Presse a obtenu copie.

À la suite de la décision de respecter le jugement Grenier, «je vous confirme également que la refonte de la loi et des règlements préservera la responsabilité et la structure des CPE-Bureaux coordonnateurs en regard de la garde en milieu familial».

Or le gouvernement Charest est revenu sur sa parole. Le 13 mai, le nouveau ministre de la Famille, Tony Tomassi, a déposé un projet de loi afin de respecter le jugement Grenier et autoriser la syndicalisation des éducatrices en milieu familial. Il a modifié du même coup la structure du réseau. Le projet de loi prévoit en effet que les CPE ne pourront plus être des bureaux coordonnateurs. Ces derniers, qui gèrent la garde en milieu familial, devront être totalement autonomes et avoir leur propre conseil d'administration. Ils auront un mandat plus limité, perdront leur mandat de soutien pédagogique et d'encadrement.

La lettre du 4 décembre, «ce n'était pas un engagement électoral», a répondu hier à La Presse Isabelle Mercille, attachée de presse du ministre Tomassi.

«À l'époque, le modèle qu'on mettait de l'avant était employeur-employé. Ç'a évolué pour que les responsables des services de garde en milieu familial demeurent des travailleuses autonomes tout en ayant des bénéfices fiscaux. Pour ça, il faut créer une entité distincte.»

Depuis le dépôt du projet de loi, l'AQCPE accuse le gouvernement de créer une nouvelle structure qui coûterait quelque 12 millions de dollars, l'équivalent de 1200 places en garderie. La CSN s'oppose aussi au changement de structure du réseau. Isabelle Mercille n'écarte pas l'idée que le ministre Tomassi revienne au modèle des CPE-Bureaux coordonnateurs. Mais l'association des éducatrices en milieu familial milite pour que les bureaux coordonnateurs soient indépendants des CPE comme le prévoit le projet de loi, afin que ses membres aient une plus grande autonomie. Les consultations publiques sur le projet de loi débutent aujourd'hui, à l'Assemblée nationale.