Entre «l'autonomiste» Mario Dumont et la souverainiste Pauline Marois, Jean Charest estime avoir trouvé sa place. Affranchi de tout lien avec les partis fédéraux, le PLQ est la seule formation politique à pouvoir défendre le Québec.

Pour M. Charest, le chef adéquiste «s'est lié les mains» et attend «un retour d'ascenseur»; il a joué son avenir sur les chances des conservateurs au Québec. Pauline Marois, elle, doit accompagner servilement Gilles Duceppe dans les querelles constitutionnelles.

 

«Il y a un seul parti qui n'a pas de permission à demander à un grand frère fédéral quand c'est le temps de parler au nom des Québécois», a soutenu hier soir le chef du PLQ. «Nous ne marchanderons jamais les intérêts du Québec dans l'espoir d'un retour d'ascenseur», a-t-il lancé, devant 300 délégués réunis en conseil général ce week-end.

La journée sera fort avancée, aujourd'hui quand les délégués discuteront des résolutions politiques - un long texte sur le fédéralisme, laissé sur le carreau au congrès de mars 2007, promet un débat émotif sur la place du français dans l'appareil fédéral.

Dès 1964, sous Jean Lesage, les libéraux ont adopté à la quasi-unanimité une résolution qui coupait définitivement les liens entre les partis libéraux provincial et fédéral, a dit le premier ministre. «Depuis 45 ans, le PLQ est libre et indépendant des partis fédéraux, et il défend librement les intérêts du Québec», a-t-il lancé, ovationné par la salle.

Pas de permission

«Avant la création de l'ADQ, avant la fondation du Parti québécois, a-t-il poursuivi, les libéraux avaient senti qu'un parti digne des intérêts du Québec devait avoir les coudées franches, ne pas avoir à diluer son engagement à travers un grand frère fédéral. Je parle au nom des Québécois sans avoir à demander de permission à personne», a poursuivi M. Charest.

Selon lui, Mario Dumont a inféodé l'ADQ au Parti conservateur. Ses demandes dans la campagne fédérale «oublient» étrangement les compressions récentes en culture pratiquées par le gouvernement Harper. «Pas un son sur la culture, sur le développement économique régional, sur le financement postsecondaire», a dit M. Charest. «À l'ADQ de Mario Dumont, c'est le parti d'abord, le Québec ensuite», a-t-il ajouté.

Le PQ, sans surprise, «a appuyé le parti frère», le Bloc québécois. Comme Don Quichotte, avides de moulins à vent à pourfendre, les souverainistes ont vu dans le spectacle de Paul McCartney à Québec un retour des Britanniques sur les plaines d'Abraham et un vaste complot chinois «pour bâillonner le Québec» dans l'interdiction de brandir le fleurdelisé à Pékin, a-t-il lancé, ironique.

Plan Nord

Le conseil général se poursuivra jusqu'à demain midi. M. Charest compte alors parler de son «Plan Nord», une stratégie de développement nordique qui devrait déboucher sur un «sommet», au début de 2009.

Avant le débat télévisé des chefs des partis fédéraux, mercredi, M. Charest allongera la liste des «demandes» du Québec, des engagements réclamés aux chefs.

S'il avait été inféodé au fédéral, le gouvernement Charest n'aurait pas accordé d'importantes baisses d'impôts aux contribuables l'an dernier, a plaidé le premier ministre. Aujourd'hui, ce coup de fouet à l'économie s'avère salutaire. Le programme de 30 milliards pour les immobilisations et les routes tombe à point nommé, au moment où le ralentissement menace, a soutenu M. Charest.

Freiner les dépenses

Sans égard à la croissance économique anémique, le Conseil du Trésor vient d'appliquer les freins aux dépenses afin de ne pas dépasser les cibles de l'année 2008-2009, a appris La Presse. Cette fois, c'est un peu moins de 600 millions en dépenses imprévues qu'il s'agit de compenser par des réductions de programmes. Environ la moitié de cet excédent vient du secteur de la santé; il y a eu davantage d'opérations que prévu, et les urgences et les heures supplémentaires ont grevé le budget des hôpitaux. Le ministère de l'Environnement a aussi dépassé ses objectifs tout comme, dans une moindre mesure, la Sécurité publique.

Le ralentissement économique n'a pas encore touché les recettes du gouvernement. On misait sur une croissance du PIB de 1,5%, au dernier budget; elle sera plutôt d'environ 1%. Hier l'Institut de la statistique a indiqué que le Québec était passé à un cheveu de la récession, avec une croissance économique anémique de 0,2% au deuxième trimestre de 2008.

«Compte tenu de ce qui se passe en Europe et en Amérique du Nord, le Québec tire bien son épingle du jeu», a dit Raymond Bachand, le ministre du Développement économique. «Mais s'il y a un tsunami aux États-Unis, c'est évident qu'on va être touchés. Ce qu'on a mis en place actuellement devrait cependant nous permettre de passer au travers», a-t-il ajouté.