Le premier ministre Philippe Couillard s'est montré ouvert à la tenue d'une enquête publique sur les rapports entre les policiers et les autochtones, mardi. Il a dit avoir pris acte de la «frustration» et du «désespoir» des Premières nations dans la foulée de l'enquête sur les agissements allégués de policiers à Val-d'Or.

Alors que des autochtones manifestaient devant l'Assemblée nationale, M. Couillard a rencontré le chef de l'Assemblée des Premières nations du Québec et du Labrador, Ghislain Picard.

Au terme du face-à-face, le premier ministre a convenu de la nécessité de tenir rapidement une nouvelle rencontre avec les leaders autochtones pour «parler d'une suite concrète pour mettre à côté de ce qu'on a déjà annoncé».

Une telle suite pourrait prendre la forme d'une enquête publique, a convenu M. Couillard, mais il souhaite d'abord connaître l'opinion de ses interlocuteurs autochtones avant d'arrêter sa décision.

«Je n'ai pas dit qu'on ferme la porte à quoi que ce soit mais je ne suis pas en train de vous annoncer quelque chose, a-t-il expliqué. (...) Je dis que je prends conscience de l'énormité de l'enjeu pour les communautés touchées, de l'importance sous-jacente de l'enjeu du racisme par exemple autour de ça.»

Le premier ministre a fait valoir qu'une enquête publique a l'avantage de créer une discussion ouverte sur des problèmes, mais qu'il faut parfois attendre des années avant que l'exercice se traduise par des actions concrètes.

La semaine dernière, le ministre des Affaires autochtones, Geoffrey Kelley, a exprimé sa préférence pour la formation d'une table de concertation pour discuter des suites à donner aux événements de Val-d'Or. Mais cette solution a été rejetée par les leaders autochtones, qui réclament une enquête judiciaire provinciale sur les rapports entre les policiers et les membres des Premières nations.

Des femmes autochtones ont d'ailleurs réitéré cette demande mardi lors d'un point de presse avec la députée de Québec solidaire, Manon Massé.

Pénélope Guay, coordonnatrice à la Maison communautaire autochtone Missinak, a assuré que les autochtones ne lâcheront pas le morceau jusqu'à ce que Québec acquiesce à leur demande.

«Si on est tous unis, puis si on leur demande, puis sans arrêt... Je veux dire, ce n'est pas la dernière semaine que vous allez nous entendre parler, je pense qu'on va continuer», a-t-elle affirmé.

L'opposition réclame une enquête

En matinée, les trois partis de l'opposition ont réclamé une enquête publique pour faire la lumière sur les rapports entre policiers et autochtones au Québec.

Le chef du Parti québécois, Jean-François Lisée, a jugé que cette solution est nécessaire pour faire la lumière sur la «dynamique néfaste qui existe à Val-d'Or».

«Le gouvernement libéral dit: "Non, le fédéral s'en occupe". Il a complètement abdiqué de sa responsabilité», a dénoncé M. Lisée.

«On avait (...) dit: Il y a un risque, s'il y a seulement une enquête sur un certain nombre de policiers, que l'ensemble du problème ne soit pas bien examiné puis qu'on ne règle rien, a renchéri le chef de la Coalition avenir Québec, François Legault. Puis effectivement c'est ce qui est arrivé.»

La députée de Québec solidaire, Manon Massé, a fait valoir que la table de concertation proposée par le ministre Kelley ne permettra pas d'aller au fond du problème du «racisme systémique» à l'égard des autochtones. 

«Les Premières Nations nous disent que ce n'est pas de cela que nous avons besoin. Nous avons besoin que ce geste de reconnaissance des fossés qui nous séparent s'exprime, dans un premier temps, par la mise sur pied d'une enquête indépendante qui nous permettra de voir comment le racisme systémique opère sur l'ensemble du territoire québécois.»