Jean-François Lisée refuse de s'excuser ou de revenir sur ses propos associant Alexandre Cloutier au prédicateur controversé Adil Charkaoui. Il considère avoir été lui-même victime d'attaques du même acabit de la part du clan Cloutier.

Mais globalement, après les récents échanges acrimonieux des derniers jours, les candidats à la direction du Parti québécois ont baissé le ton, dimanche, lors d'un débat sur la souveraineté à Saguenay.

Lors de sa déclaration d'ouverture, Jean-François Lisée a tenu à dire aux quelque 300 militants réunis qu'il se rallierait à Alexandre Cloutier si celui-ci prend la barre de la formation. De façon surprenante, il a d'ailleurs cité un analyste de sondages, Bryan Breguet, qui chiffre à 95% les chances de M. Cloutier de l'emporter. 

« S'il le devient (chef), je travaillerai avec lui pour faire en sorte que son programme se réalise. Je veux que tout le monde sache ça », a-t-il affirmé. Si M. Lisée perd la course, « 5% des chances ce n'est pas complètement nul », il s'engage à se « battre » pour que la démarche d'accession à l'indépendance du candidat choisi soit celle qui sera adoptée au congrès de 2017. Il a également lancé quelques fleurs à M. Cloutier durant le débat, saluant quelques-unes de ses « excellentes idées ».

Mais il ne faut pas voir dans ces déclarations des excuses envers son adversaire. M. Lisée voulait surtout envoyer le signal d'un changement de ton.

Il a mis le feu aux poudres vendredi soir en écrivant que le prédicateur Adil Charkaoui avait donné son «appui public» à Alexandre Cloutier. Le député de Rosemont faisait alors référence à un message publié mercredi dernier par le Collectif québécois contre l'islamophobie qui soulignait «l'ouverture et le renouveau» d'Alexandre Cloutier et critiquait les positions de M. Lisée.

M. Cloutier a dénoncé samedi les «propos mensongers, grossiers et non fondés» de son principal opposant dans la course. Il a même fait appel à la Sûreté du Québec (SQ) à la suite de la publication de «nombreuses insultes violentes et de propos haineux» sur les réseaux sociaux.

Lors d'une mêlée de presse après le débat de dimanche, Jean-François Lisée n'a pas voulu renier ses propos, déplorant ceux tenus contre lui par le clan Cloutier. Il en veut à sa collègue Agnès Maltais d'avoir dit qu'il tente de mousser sa campagne en faisant peur aux Québécois. La députée faisait allusion au fait que M. Lisée se montre ouvert à bannir le voile intégral de l'espace public.

« Vendredi, on a de part et d'autre fait une campagne avec un niveau de décibels très élevés, à mon avis trop élevés. Je ne demande pas d'excuses, je n'en offre pas. Je tourne la page », a déclaré M. Lisée. Il disait à La Presse vendredi que ses propos sur MM Cloutier et Charkaoui étaient « facétieux ».

« Il n'y a rien de drôle là-dedans », a lancé Alexandre Cloutier. « J'aurais préféré des excuses, maintenant j'ai toujours dit que j'allais laisser ça au bon jugement » de Jean-François Lisée.

Il se défend de vouloir instrumentaliser cette histoire aux fins de sa campagne en annonçant publiquement avoir appelé la police. « Je voulais simplement rappeler que lorsqu'on on mesures mal ses propos, il y a des conséquences », a-t-il dit.

Il nie que les attaques de son clan sont du même ordre. « La sortie de Mme Maltais s'inscrit dans les règles habituelles. Je pense qu'on est sorti du carré de sable » avec les propos de M. Lisée.

Dans un discours juste avant le débat, le chef intérimaire Sylvain Gaudreault a senti le besoin de demander aux candidats de « poursuivre cette course, dans le calme, la dignité, le respect, le partage des idées. C'est comme ça que nous allons gagner, qu'on va continuer d'être uni le 8 octobre pour aller vers la victoire ».

MM Cloutier et Lisée ont eu deux duels, vigoureux mais courtois, au sujet de la souveraineté. 

La controverse des derniers jours inquiète manifestement des militants. L'une des questions du public demandait au candidat comment rétablir l'unité après les événements des derniers jours. 

Martine Ouellet a accusé ses adversaires Cloutier et Lisée de « détourner » la campagne avec leurs attaques respectives pour éviter de parler de l'enjeu de la souveraineté. Pour Paul St-Pierre Plamondon, « ça ressemble à une escalade où il y a toujours une décibel de plus, une décibel de plus. Ce n'est pas souhaitable ».

Le débat était organisé par l'antenne régionale des Organisations unies pour l'indépendance (OUI-Québec), dont la présidente est l'ex-chef syndicale, Claudette Carbonneau.