Il sera beaucoup plus difficile de devenir prestataire de l'aide sociale au Québec, après l'adoption du projet de loi 70 déposé mardi à l'Assemblée nationale par le ministre de l'Emploi, Sam Hamad. Ceux qui frappent pour la première fois à la porte du programme de dernier recours ne pourront plus refuser un emploi «convenable» sans en subir les conséquences. Les récalcitrants pourraient perdre jusqu'à la moitié de leur prestation mensuelle.

Chaque année, environ 17 000 personnes demandent de l'aide sociale pour la première fois. De ce nombre, 60% ont moins de 29 ans, et 40% sont issues de familles vivant de l'assistance publique, a rappelé mardi le ministre Hamad en point de presse. Ces nouveaux demandeurs se verront offrir des emplois «convenables» ou de la formation et pourront en conséquence recevoir des prestations supplémentaires, a expliqué le ministre.

En revanche, ceux qui refuseront verront leur chèque amputé.

Pour le ministère de l'Emploi, un tel resserrement du suivi fera en sorte que 85% des 17 000 nouveaux demandeurs ne toucheront pas d'aide sociale, ce qui pourrait se traduire par des économies de 50 millions par année, une fois atteint le rythme de croisière. La pression s'exercera sur les premiers demandeurs «qui n'ont pas de contraintes à l'emploi, qui sont aptes à travailler et en santé», a précisé le ministre.

La distance ne sera pas un critère. Un prestataire sera tenu d'accepter un emploi loin de son domicile.

Approche critiquée

«Cette approche punitive est une atteinte à la dignité. Dire que les gens devront accepter un emploi à 300 kilomètres de chez eux, c'est inefficace», a déclaré Françoise David, de Québec solidaire.

Serge Petitclerc, du Collectif pour un Québec sans pauvreté, a dénoncé lui aussi les répercussions de cette obligation d'accepter un emploi, même loin de chez soi.

Pour le ministre Sam Hamad, toutefois, pas question de reculer: les refus multiples entraîneront un cumul des coupes. «Si la personne refuse et qu'il n'y a pas de justification de refus, alors la première chose qu'on fait, la première sanction, on enlève le montant de 250$ qu'on donne de plus [à ceux qui participent au programme]. La personne récidive, continue à refuser d'embarquer et de travailler dans les démarches. Bien là, on va être obligés de couper dans le chèque de l'aide sociale», explique. M. Hamad. Cette coupe pourra atteindre la moitié du chèque d'aide sociale.

«Le principe de ça, là, c'est que la société, le contribuable, le payeur de taxes québécois fait un effort envers les personnes, un geste de solidarité, de partage, de générosité. Puis ça, en passant, ça fait notre marque de commerce. De l'autre côté, on demande à l'autre personne de faire un effort pour elle», d'ajouter M. Hamad.

Programmes de formation

Mesure déjà annoncée par son prédécesseur François Blais et qui n'avait pas fait l'objet d'un projet de loi, Québec reverra le programme qui prévoit de consacrer 1% de la masse salariale à la formation afin d'éliminer les programmes de formation personnelle qui ne sont pas directement liés à l'emploi.

«On va concentrer les cours de 1% sur la formation des compétences, et pas pour l'amusement, mais les gens, s'ils veulent s'amuser, ça ne fera pas partie du 1%», a prévenu M. Hamad. Des cours de «rigologie» de «zénitude» et de yoga financés à même le 1% destiné à la formation des employés avaient fait les manchettes.

Finalement, Québec assouplit les règles pour les bénéficiaires de l'aide sociale qui ont des contraintes sévères à l'emploi et qui reçoivent un héritage. Les sommes reçues en succession ne seront pas comptabilisées dans le calcul des prestations.