Qu'il plaise ou non, qu'on le juge trop long ou pas, le titre du projet de loi sur la charte des valeurs est là pour rester.

Le ministre responsable des Institutions démocratiques, Bernard Drainville, a dû défendre, mercredi, le titre longuet choisi pour coiffer le projet de loi donnant suite au projet de charte des valeurs du gouvernement Marois.

Après des mois de spéculations, le projet de loi controversé et fort attendu sera déposé jeudi à l'Assemblée nationale.

Sitôt déposé, le projet de charte fera l'objet d'une consultation cet automne.

Au terme du processus, après le dépôt d'éventuels amendements et l'étude article par article, les parlementaires seront finalement appelés à voter pour ou contre le projet de loi intitulé : «Charte affirmant les valeurs de laïcité et de neutralité religieuse de l'État ainsi que d'égalité entre les femmes et les hommes et encadrant les demandes d'accommodement».

En point de presse, le ministre Drainville n'a pas pris ombrage du nombre de mots jugés nécessaires pour résumer le contenu du projet consistant à affirmer la laïcité de l'État.

Il a expliqué que c'étaient les juristes du conseil exécutif ayant rédigé le projet de loi qui ont proposé de le nommer ainsi.

Il ne faut pas chercher un sens caché au long titre du projet de loi, a-t-il commenté.

«Les juristes aiment ça les longs titres qui essaient de résumer tout ce qu'il y a dans le projet de loi», a-t-il indiqué.

Et il serait faux de prétendre, a-t-il ajouté, que le nom a changé par rapport au projet initial.

Ce qu'on appelait communément la «charte des valeurs», au cours des derniers mois, était en fait un document d'une vingtaine de pages qui a donné vie au projet de loi, et qui a été rendu public en septembre.

En termes de style et de longueur, le titre du document n'avait rien à envier à celui du projet de loi qui l'a suivi : «Orientations gouvernementales en matière d'encadrement des demandes d'accommodement religieux, d'affirmation des valeurs de la société québécoise ainsi que du caractère laïque des institutions de l'État». Ce document était accompagné d'une brochure plus succincte intitulée : «Parce que nos valeurs on y croit».

«Pourquoi faire simple?» s'est interrogé en point de presse le chef de la Coalition avenir Québec (CAQ), François Legault, en qualifiant le titre du projet de loi d'inutilement «compliqué».

M. Legault n'a pas voulu dire s'il était disposé à faire des compromis et faire en sorte que le projet de loi soit adopté.

Il a plutôt lancé la balle au gouvernement, en faisant valoir qu'un gouvernement minoritaire devait négocier avec un des partis d'opposition pour arriver à ses fins. Or, M. Legault a reproché au gouvernement de ne pas l'avoir consulté au moment de rédiger son projet de loi, ce qui augure mal pour la suite des choses.

La vraie question à surveiller, celle qui fera en sorte que le projet de loi passera ou ne passera pas, est sans contredit celle qui touche le port des signes religieux ostentatoires, a-t-il commenté.

Sur les autres questions (neutralité religieuse de l'État, égalité hommes-femmes, balises aux demandes d'accommodement), le consensus existe déjà entre les différents partis.

Mais quant à savoir «à qui interdit-on les signes religieux chez les employés de l'État, c'est ça, la vraie question et c'est là qu'il faut un compromis», a dit M. Legault, en se montrant «ouvert à discuter» avec le gouvernement pour trouver un terrain d'entente.

Sur ce point, les positions respectives du gouvernement et de la CAQ sont quand même relativement proches.

Le gouvernement veut étendre l'interdiction des signes religieux à tous les employés de l'État sans exception, tandis que la CAQ, d'accord avec le principe de l'interdiction, croit qu'il devrait s'appliquer uniquement aux personnes ayant un pouvoir de coercition (juges, policiers, gardiens de prison), de même qu'aux enseignants du réseau public des écoles primaires et secondaires, parce qu'ils incarnent des modèles pour les jeunes.

Le chef libéral Philippe Couillard, qui se trouvait à Montréal pour annoncer sa candidature en vue de l'élection complémentaire dans la circonscription d'Outremont, a pour sa part réitéré la position de son parti, qui consiste entre autres à exiger que les services publics soient offerts à visage découvert.

«Nous avons déposé notre position écrite sur la question; on aura enfin, demain, un texte devant nous. Évidemment, nous allons l'apprécier à sa juste mesure», a-t-il dit.

M. Couillard a ajouté que le PLQ est d'accord pour «clarifier l'encadrement des accommodements raisonnables et la neutralité de l'État», mais qu'il n'est pas question de «limiter les libertés des Québécois».